Les métamorphoses du « Je » dans les Fables de La Fontaine
Publié le 27/03/2015
Extrait du document
C'est généralement le « Je « du fabuliste auquel nous avons affaire ; il se rencontre dans les morales ou dans les discours introducteurs du récit et il est fréquent qu'il s'associe aux lecteurs par un « nous « (VII, 10 ; VII, 12 ; VII, 13), qui fonde la portée générale de la leçon à tirer. Il s'introduit parfois dans le corps du récit (« Ma commère la carpe... « VII, 4).
«
E X P 0 S É S F C H E S
gagne » XII, 4), qui la lui a inspirée (X, 14), à l'intention de qui il l'a écrite
(Madame de la Sablière, XII, 15).
C'est ce« Je» hybride, à la fois conteur et au
teur, qui apparaît dans la réflexion esthétique sur le rôle de la fable ( « Le pouvoir
des fables», VIII, 4).
Le« Je» lyrique
De même, à travers les passages lyriques des fables, on retrouvera le même « Je » à la fois auteur et conteur lorsque la confidence laisse à penser qu'elle
est d'ordre autobiographique ( « Les deux pigeons », IX, 2 ; « J'ai quelquefois
aimé
...
»), lorsqu'elle s'inscrit dans un propos où l'expérience et les goûts person
nels sont mis en avant (XI, 4) .
...
Ill -L'ENTRETIEN INFINI
Le dédoublement ironique
Le« Je» du conteur-auteur s'interroge parfois sur l'objet de l'œuvre qu'il pour
suit, mais
il ne se dissimule pas l'influence qu'elle peut avoir dans la réalité :
«Hélas! j'ai beau crier et me rendre incommode/ L'ingratitude et les abus/ N'en
seront pas moins à la mode» (XII, 16).
D'autres paradoxes peuvent apparaître qui
voient
a priori s'opposer plusieurs« Je», comme le« Je» du conteur et le« Je»
du fabuliste au début de la fable « Le loup et le renard » (XI, 6).
Le «Je » et ses lecteurs
C'est d'abord à des auditeurs-lecteurs que s'adresse La Fontaine: ils font partie
de ses ami(e)s
et lui témoignent leur intérêt et leur sympathie (Madame de Montes
pan, Madame de
La Sablière, le duc de La Rochefoucauld, ...
).
Ces figures jouent le rôle d'intercesseurs pour les lecteurs futurs, qui pénètrent ainsi à leur tour dans
l'espace intime et amical des Fables.
Du monde aux Fables
Les Fables décrivent un monde le plus souvent dur et cruel, que la suprême hon
nêteté de l'auteur et du conteur-fabuliste s'attache à transfigurer dans la création
poétique.
Mais parfois la cruauté perdure dans les fables elles-mêmes; alors la fonc
tion du conteur est de
« ménager une distance esthétique entre la vérité des « choses
de la
vie» et les sentiments délicats de ses auditeurs civilisés.
Il s'interpose entre la
fable et ses auditeurs, quand la fable elle-même aurait tendance à réfléchir trop
directement
et trop durement l'expérience du vaste monde» (M.
Fumaroli).
Conclusion : Il est difficile de « fixer » les « Je » de La Fontaine.
Cepen
dant, comme le fabuliste-conteur déclarait:« Diversité, c'est ma devise»,
on pourra chercher à identifier, lorsqu'il se nomme, à quel titre il inter
vient.
Finalement c'est la fonction et la situation du « Je »dans chaque
fable qui semble pouvoir définir efficacement son statut.
LES FABLES DE LA FONTAINE~.
»
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