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LES ORIGINES D'HAMLET

Publié le 11/03/2011

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   Six ans séparent Hamlet de La Mégère Apprivoisée!. Ce passage du comique au tragique n'est pas brusque, puisque, entre les deux pièces, voici Richard II, Le Roi Jean, Le Marchand de Venise, les deux parties de Henry IV, Henri V et Jules César. « Passage de la puissance à l'acte, de l'implicite à l'explicite «, dit J. Paris ; plus de voile, « l'homme s'atteint dans sa nudité «. Formules ambitieuses. Plus clairement, H. Fluchère déclare que Shakespeare « va de l'extérieur à l'intérieur de l'homme «, et qu'il aborde ainsi des problèmes moraux, grâce au développement et à l'enrichissement de ses connaissances. Donc, après les thèmes mineurs, les thèmes majeurs. Soit. Encore entre-t-il parfois autant de psychologie dans une comédie que dans une tragédie.   

« un mince éloge.

Cette pièce a fixé et codifié en quelque sorte les lois du genre. Tel est l'essentiel.

On peut négliger d'autres sources, ou prétendues sources, d'intérêt secondaire et mêmediscutable (1).

Mais il faut retenir l'influence de Montaigne, dont les Essais, traduits en anglais, eurent un grandretentissement* en Angleterre.

C'est après les avoir lus que Shakespeare modifia le texte d'Hamlet, qui n'était, danssa forme primitive, qu'un mélodrame et qui, en 1596, joué au Cygne, au Globe et en province, était un spectaclegrandiloquent, sans portée réelle.

Entre le texte de 1603 et celui de 1604, la différence est considérable : le premiera 2.143 lignes, le second 3.719.

Ainsi Shakespeare, après coup amplifie singulièrement le drame, le modifie dans lesens psychologique, accentue et nuance le caractère d'Hamlet, parce que Montaigne lui ouvre des horizons sur lanature humaine, la relativité de nos connaissances, la fragilité de notre destin, l'attitude que nous devons avoir,même sceptiques, en face de la vie et de la mort.

L'introspection lui permet alors de mieux analyser l'âme de sespersonnages, de les obliger à raisonner sur eux-mêmes et sur autrui, à douter, à tout remettre en question.

Gainappréciable dont bénéficie Hamlet, car le drame, au lieu de se dérouler extérieurement à lui, va se dérouler en lui. Mais la question des origines est secondaire.

Il ne faut ni la négliger ni en exagérer l'importance.

L'exemple de LaMégère Apprivoisée a montré que la matière n'appartient presque jamais au créateur, dont le seul souci est d'animercette matière inerte ou poussiéreuse et de la transformer en œuvre d'art.

Belleforest, Kyd, Montaigne, c'est bien.Shakespeare, ce sera mieux.

Toutefois, Shakespeare ne réalise son dessein que peu à peu.

Hamlet est « l'exempleet le type des pièces retapées ».

Soit, « retapée » maintes et maintes fois, entre 1593 et 1603.' Après tant deretouches, de remaniements, d'additions, de substitutions, sommes-nous, en présence d'un texte authentique ?Gordon Craig, qui a monté la pièce à Moscou, prétend que Hamlet, comme toutes les pièces de Shakespeare, est dûà la collaboration de l'auteur avec le régisseur du théâtre, les acteurs, la troupe entière qui monte le spectacle,joue, invente, improvise en pleine représentation.

Bref, la pièce est de plusieurs mains ; Shakespeare, en dernierlieu, supervise.

Berthold Brecht est du même avis ; le théâtre de Shakespeare, dit-il, est un travail collectif, etl'auteur d'Hamlet, dont la personnalité est la plus forte, en est le « chef-dramaturg ».

Sa tragédie aurait étéretravaillée et remodelée au fur et à mesure des représentations, car il avait paru difficile d'arriver, avec un Hamletaussi hésitant, au massacre final. Cette argumentation n'est pas sans valeur, mais il n'y a pas lieu de s'y arrêter, d'abord parce que, au théâtre, lepublic ne se préoccupe nullement du texte écrit, ensuite parce que Hamlet existe en tant que pièce, et que, mêmesi elle n'est pas entièrement l'œuvre de Shakespeare, elle porte sa marque exceptionnelle.

Il n'est pas nécessairenon plus de chercher dans Hamlet des allusions aux événements contemporains ; il y en a sans doute, mais si ellesétaient saisies au passage par le public de 1601, elles nous échappent aujourd'hui.

Peut-on affirmer, par exemple,que les sautes d'humeur d'Hamlet sont le reflet de celles du Comte d'Essex, qui paya de sa tête la révolte qu'il avaitsuscitée ? Trop de commentateurs subtils finissent, à force de vouloir tout expliquer, même l'inexplicable, par brouiller lescartes et rendre obscur ce qui est clair.

Alain disait : « Si Hamlet nous tombait du ciel tout nu, sans le long cortègedes admirateurs, les critiques s'en moqueraient, non sans apparence de raison.

Il ne se trouverait peut-être pas unhomme de goût pour prendre l'œuvre comme elle est ».

Essayons donc de voir Hamlet tel qu'il est, et la tragédie oùil se débat telle qu'elle est.

Ce n'est pas facile, car on a tout embrouillé à plaisir, sous le prétexte que Hamlet est ledrame par excellence, en tout cas, le plus connu, le plus joué, le plus mystérieux, dope le plus discuté, et qu'unebibliothèque entière a été consacrée à son exégèse.

Il convient donc de simplifier les problèmes et d'essayer de lesrésoudre avec plus de bon sens que de science. 1° Comment l'action se déroule-t-elle ? Quelles en sont les étapes ? 2° Comment faut-il comprendre le caractère d'Hamlet ? Là est la pierre angulaire.

Est-il une énigme ? Quel sensdonne-t-il au drame ? 3° Répond-il aux questions que posent la création et l'élaboration d'une œuvre d'art ? Autrement dit, en quoiconsiste ici l'art de Shakespeare ? 4° Hamîet est-il, comme on le prétend, le sommet de cet art et « la véritable plaque tournante » de l'universshakespearien ? Autant de questions qui gagneront à être éclaircies.. »

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