Devoir de Philosophie

LES ORIGINES, L'ENFANCE ET L'ADOLESCENCE DE LECONTE DE LISLE

Publié le 01/07/2011

Extrait du document

de lisle

I

Il existait vers la fin du XVIIe siècle, à Pontorson, en Normandie, sur les confins de la Bretagne, une famille de petite bourgeoisie dont les membres étaient, de père en fils, apothicaires, chirurgiens ou médecins. L'un d'eux, Michel Le Conte, sieur de Préval-—un apothicaire celui-là— épousa la fille d'un contrôleur aux recettes foraines, François Estienne, sieur de Lisle. Ces « noms pompeux «, comme eût dit Molière, ne doivent pas faire illusion. Ce n'étaient pas des titres de noblesse, mais de simples surnoms empruntés à des terres très roturières pour distinguer entre eux les nombreux enfants des familles bourgeoises de ce temps-là. L'Isle, ou plus exactement l'Isle-Saint-Samson, était une ferme sise dans la commune actuelle de Pleine-Fougères, département d'Ille-et-Vilaine, arrondissement de Saint-Malo. A la mort de François Estienne, elle passa à sa fille et à son gendre. Le fils de ceux-ci, Jacques-François-Michel, sieur de Préval, se fil recevoir docteur en médecine et s'installa à Avranches, qui est à quelques lieues de Pontorson. Des douze enfants qu'il eut, l'aîné, Charles-Marie, né en 1759, que l'on appela Leconte de Lisle, émigra de Normandie en Bretagne, s'établit comme apothicaire à Dinan, s'y maria avec la fille d'un ancien négociant et échevin de la ville, Guillemette-Louise Bertin. et y mourut en 1809, laissant deux enfants, Charles-Guillaume-Jacques, né en 1787, et Guillemette-Marie, née en 1790.

de lisle

« hautes montagnes y mêlaient la neige éternelle de leurs cimes aux rayons toujours brûlants du ciel... Tel est, décrit par Leconte de Lisle lui-même, l'aspect qu'offre l'île de la Réunion — Bourbon, comme on disait encoreen ce temps-là — aux voyageurs qui l'aperçoivent de la pleine mer ; ils la comparent volontiers à «une corbeille defleurs et de fruits aux pénétrants arômes » ; les premiers qui la virent l'appelèrent Eden, Si, après l'avoir contempléede loin, nous voulons, au moins en imagination, pénétrer dans ce séjour de délices, nous n'avons qu'à prendreencore le poète pour guide : L'île Bourbon, nous dit-il, est plus grande et plus élevée que l'île Maurice.

Les cimes extrêmes sont de dix-sept à dix-huit cents toises au-dessus du niveau de mer ; et les hauteurs environnantes sont encore couvertes de forêtsvierges où le pied de l'homme a bien rarement pénétré.

L'île est comme un cône immense dont la base est entouréede villes et d'établissements plus ou moins considérables.

On en compte à peu près quatorze, tous baptisés de nomsde saints et de saintes, selon la pieuse coutume des premiers colons.

Quelques autres parties de la côte et de lamontagne portent aussi certaines dénominations étranges aux oreilles européennes, mais qu'elles aiment à la folie :V Étang Salé, — les Trois Bassins, — le Boucan-Canot.

— l'Ilette aux Martins, — la Ravine à malheur, — le BassinBleu, — la Plaine des Cadres, etc..

Il est rare de rencontrer entre la montagne et la mer une largeur de plus de deuxlieues, si ce n'est à la Savane des Galets et du côté de la rivière Saint-Jean, l'une sous le vent et l'autre au vent del'île.

Au dire des anciens créoles, la mer se retirerait insensiblement et se brisait autrefois contre la montagne elle-même.

C'est sur les langues de sable et de terre qu'elle a quittées qu'ont été bâtis les villes et les quartiers.

Il n'enest pas de même de Maurice qui, sauf quelques pics comparativement peu élevés, est basse et aplanie.

On n'ytrouve point les longues ravines qui fendent Bourbon des forêts à la mer, et qui, dans la saison des pluies, roulentavec un bruit immense d'irrésistibles torrents et des masses de rochers dont le poids est incalculable.

La végétationde Bourbon est aussi plus vigoureuse et plus active, l'aspect général plus grandiose et plus sévère.

Le volcan, dontl'éruption est continue, se trouve vers le sud, au milieu de mornes désolés, que les noirs appellent le Pays Brûlé ,C'est dans la région qu'on appelle les Hauts de Saint-Paul, c'est-à-dire sur les collines qui dominent de sept à huitcents mètres la ville du même nom, entre deux de « ces déchirures de montagnes qu'on nomme des ravines », ques'étendait la plantation, ou, comme on disait là-bas, l'habitation possédée par la famille Leconte de Lisle.

Dans unede ses nouvelles, le poète en a fait, sous un nom supposé, une très précise description : L'habitation de Villefranche.

comprise du nord au sud entre les ravines de Saint-Gilles et de Bernica, était bornée,dans sa partie basse, par la route de Saint-Paul à Saint-Leu, qui séparait les terres cultivées de la savane deBoucan-Canot.

C'était une vaste lisière qui, d'après la concession faite au premier marquis de Villefranche (entendez: au marquis de Lanux), devait s'étendre de la mer aux sommets de l'île...

L'emplacement où s'élevait la demeure dumarquis était situé sur la cime aplanie d'un grand piton, d'où la vue embrassait la baie de Saint-Paul, la plaine desGalets et les montagnes qui séparent le quartier de la Possession de Saint-Denis.

Vers l'ouest, en face de lavarangue sous laquelle fumait M.

de Villefranche, la mer déroulait son horizon infini.

C'était un vaste tableau, oùresplendissait, aux premières lueurs du soleil, cette ardente, féconde et magnifique nature qui ne s'oublie pas... Et voici comment, du haut de ce belvédère naturel, Leconte de Lisle put voir bien des fois, à l'aurore, ce paysagemagnifique s'éclairer peu à peu et se colorer à ses yeux : Rien n'est beau comme le lever du jour du haut des mornes du Bernica.

On y découvre la plus riche moitié de lapartie sous le vent, et la mer à trente lieues au large.

Sur la droite, aux pieds de la Montagne à Marquet, la savanedes Galets s'étend sur une superficie de trois à quatre lieues,, hérissée de grandes herbes jaunes que sillonne d'unelongue raie noire le torrent qui lui donne son nom.

Quand les clartés avant-courrières du soleil luisent derrière laMontagne de Saint-Denis, un liséré d'or en fusion couronne les dentelures des pics et se détache vivement sur lefeu sombre de leurs masses lointaines.

Puis il se forme tout à coup, à l'extrémité de la savane, un imperceptiblepoint lumineux qui va s'agrandissant peu à peu, se développe plus rapidement envahit la savane tout entière et,semblable à une marée flamboyante, franchit d'un bond la rivière de Saint-Paul, resplendit sur les toits peints de laville et ruisselle bientôt sur l'île, au moment où le soleil s'élance glorieusement au delà des cimes les plus élevéesdans l'azur foncé du ciel.

C'est un spectacle sublime qu'il m'a été donné d'admirer bien souvent... Derrière lui, sur les pentes supérieures, s'étendait, « dans toute l'abondance de sa féconde virginité », la forêt deBernica. Gonflée de chants d'oiseaux et des mélodies de la brise, dorée par-ci par-là des rayons multipliés qui filtraient autravers des feuilles enlacée de lianes brillantes aux mille fleurs incessamment variées de forme et de couleur, et quise berçaient capricieusement des cimes hardies des nates et des bois-roses aux tubes arrondis des papayers-lustres, on eût dit le Jardin d'Arménie aux premiers jours du monde, la retraite embaumée d'Êve et des Anges amisqui venaient l'y visiter.

Mille bruits divers, mille soupirs, mille rires se croisaient à l'infini sous les vastes ombres desarbres, et toutes ces harmonies s'unissaient et se confondaient parfois, de telle sorte que la forêt semblait s'enformer une voix magnifique et puissante.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles