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LES PREMIERS POÈMES DE VIGNY

Publié le 30/06/2011

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La vocation poétique de Vigny s'est éveillée de bonne heure : ses pièces les plus anciennes, La Dryade, Symétha, sont datées de 1815. Le premier poème imprimé, Le Bal, est publié en 1820, l'année même où triomphent les Méditations de Lamartine. Deux ans plus tard paraît un recueil de Poèmes, qui s'enrichira au cours d'éditions successives. Parmi ces vers de jeunesse, beaucoup portent les traces du pessimisme qui domine déjà la pensée de l'écrivain.

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« Car la Valse bondit dans son sphérique empire ;Des couples passagers éblouissent les yeux,Volent entrelacés en cercle gracieux,Suspendent des repos balancés en mesure,Aux reflets d'une glace admirent leur parure,Repartent ; puis, troublés par leur groupe riant,Dans leurs tours moins adroits se heurtent en criant. Le jeune poète est évidemment attiré par les plaisirs de son âge.

Il se risque même aux évocations charnelles.Chénier encore, à cet égard, pouvait lui donner l'exemple.

Mais Vigny a imité aussi la poésie sensuelle de l'ancienOrient.

Développe-t-il, dans La Femme adultère, un récit évangélique ? Il mêle à l'édifiante histoire des traitsvoluptueux : Mon lit est parfumé d'aloès et de myrrhe ;L'odorant cinnamome et le nard de PalmyreOnt chez moi de l'Égypte embaumé les tapis.J'ai placé sur mon front et l'or et le lapis ;Venez, mon bien-aimé, m'enivrer de délices... Évoque-t-il la légende biblique de Suzanne ? Il décrit longuement l'héroïne au bain ; et dans un fragment nonrecueilli qu'il destinait au même poème, il transpose presque littéralement le Cantique des cantiques : De l'époux bien-aimé n'entends-je pas la voix ?Oui, pareil au chevreuil, le voici, je le voisIl est blanc entre mille et brille le premier ;Ses cheveux sont pareils aux rameaux du palmierJe préfère sa bouche aux grappes d'Engaddi.Quand son cœur sur le mien bat dans un doux transport,Je me meurs, car l'amour est fort comme la mort. Mais le recueil de 1822 contient trois poèmes d'un tout autre ton, et qui pourraient être appelés déjà poèmesphilosophiques.

Dans La Prison, un captif illustre, le Masque de Fer, reçoit, à l'article de la mort, la visite d'un prêtrequi l'invite à la soumission et au repentir ; mais l'agonisant clame sa révolte contre l'injustice du ciel.

Dans LeMalheur, le rythme de l'ode scande la menace d'une fatalité cruelle :Où fuir ? Sur le seuil de ma porte Le Malheur, un jour, s'est assis ; Et depuis ce jour je l'emporte A travers mes joursobscurcis...Enfin la rigueur divine est dénoncée avec une particulière énergie dans La Fille de Jephté.

Vigny, qui s'appuie sur unrécit emprunté à l'Ancien Testament, y évoque le sacrifice d'une vierge d'Israël : or, l'esprit qui l'anime est biendifférent de l'esprit biblique.

Dans le livre des Juges, le vieux Jephté se résigne sans murmure aux exigences deJéhovah, qui vient de protéger sa victorieuse campagne contre Ammon : « J'ai fait un vœu au Seigneur, et je nepuis faire autrement que d'accomplir mon vœu.

» Dans le poème, il prononce des paroles d'une violence impie : Seigneur, vous êtes bien le Dieu de la vengeance.C'est la vapeur du sang qui plaît au Dieu jaloux ! II La Fille de Jephté est le premier en date des poèmes où Vigny recourt à la tradition biblique pour instruire le procèsde Dieu.

Moïse, composé en 1823, répond à un dessein semblable.

Vigny a relu et utilisé le Deutéronome, lesNombres, l'Exode ; mais son Moïse, comme son Jephté, est différent du modèle sacré.

Le livre des Nombresn'atteste, chez le prophète hébreu, qu'une passagère fatigue : « Pourquoi avez-vous affligé votre serviteur ?...

Jene puis porter seul tout ce peuple, parce que c'est une charge trop pesante pour moi.

Que si votre volonté s'opposeen cela à mon désir, je vous conjure de me faire mourir...

» La plainte, chez Vigny, prend un caractèreplus âpre et plus profond.

Moïse, comblé des faveurs divines, les déclare illusoires et même funestes ; sa puissanceet sa science, en éveillant chez les Hébreux un respect craintif, l'ont privé des joies proprement humaines qui,seules, auraient pu le rendre heureux : J'ai vu l'amour s'éteindre et l'amitié tarir.J'ai marché devant tous, triste et seul dans ma gloire,Et j'ai dit dans mon cœur : Que vouloir à présent ?Pour dormir sur un sein mon front est trop pesant,. »

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