L'opposition entre les littératures antique et moderne.
Publié le 17/03/2011
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Matière. — Expliquez et discutez, en l'appuyant au besoin sur des exemples à votre choix, ce jugement de Mme de Staël : « La littérature des Anciens est chez les Modernes une littérature transplantée : la littérature romantique ou chevaleresque est chez nous indigène, et c'est notre religion et nos institutions qui l'ont fait éclore... La littérature romantique est la seule qui soit susceptible encore d'être perfectionnée, parce qu'ayant ses racines dans notre propre sol, elle est la seule qui puisse croître et se vivifier de nouveau ; elle exprime notre religion ; elle rappelle notre histoire ; son origine est ancienne, mais non antique. « Poitiers, juin-juillet 1949. Conseils.— La matière est tirée du livre De l'Allemagne, 2e partie, ch. xi : « De la poésie classique et de la poésie romantique. « Il serait fort utile de vous reporter au texte et de lire tout le chapitre.
Plan proposé : Introduction. — Grouper un certain nombre de passages essentiels du chapitre xi de la deuxième partie, par exemple : « Le nom de romantique a été introduit nouvellement en Allemagne pour désigner la poésie dont les chants des troubadours a été l'origine, celle qui est née de la chevalerie et du christianisme...
«
C) Conclusion.
La poésie chrétienne, moins simple, moins saillante, moins pure aussi que celle des anciens, est plus variée, pluspathétique.
Elle est plus populaire, d'autre part, ou plutôt elle est la seule littérature populaire, nationale, la seulequi ne se contente pas de s'adresser aux esprits cultivés, mais qui aille jusqu'au cœur même du pays qui lui a donnénaissance.
II.
— Objections.
Elles sont nombreuses.
Contentons-nous d'exposer les principales.
A) Objections historiques.
1° Rapide résumé de notre littérature chrétienne et chevaleresque jusqu'à la Renaissance.
2° Le mouvement de la Renaissance, magnifique éclosion de la littérature française (pour ces deux parties, cf.
M.Roustan, La Littérature française par la Dissertation, t.
IV, et en particulier le sujet suivant : « La Renaissance, endétournant de ses voies l'esprit français, a-t-elle substitué à l'originalité gauloise, un caractère d'emprunt qu'il nousa fallu tardivement dépouiller pour venir à notre vraie nature ? »).
3° La littérature du XVIIe siècle est encore bien plus gênante pour la théorie de Mme de Staël : l'esprit français,grâce à la discipline des littératures antiques, a pris pleinement possession de toutes ses qualités originales (cf.
LaLittérature française parla Dissertation, t.
I, et en particulier chap.
iv : Tragédie, nos 63 et 64, p.
88 et 89).
Il est vrai que Chateaubriand répondrait : la littérature classique du XVIIe siècle est païenne de forme et chrétienned'inspiration.
Ce qu'il faut penser de cette thèse.
4° Enfin, la littérature du XVIIIe siècle, qui n'est certes pas chrétienne d'inspiration, n'est donc pas nationale ?
B) Confusion fâcheuse entre « la poésie des Germains » et la poésie française.
Les Germains, eux, n'avaient pas trois siècles de traditions classiques.
Mme de Staël s'élève dans le même chapitrecontre les critiques français qui considèrent que « la littérature des peuples germaniques est encore dans l'enfancede l'art ».
Elle rappelle que les poèmes de Gœthe et de Burger sont chantés des rives du Rhin à la Baltique.
Maisdepuis combien de temps ? Et ne restait-il pas vrai que l'Allemagne n'avait pas trois siècles de chefs-d'œuvre dus àl'inspiration de l'antiquité.
On ne supprime pas trois cents ans d'histoire d'un trait de plume.
C) Cette théorie littéraire s'accorde fort mal avec la philosophie générale de Mme de Staël.
La théorie du progrès, la théorie de la littérature expression de la société.
Comment elle est en contradiction aveccette idée qu'il faut revenir au Moyen âge, aux troubadours, à la chevalerie.
Le catholicisme de ce temps-là était-ildonc celui des premières années du XIXe siècle ? Depuis Pascal, rien n'était donc changé ? C'étaient là les « racinesprofondes » qui plongeaient dans « notre propre sol ».
D) Les résultats.
1° Les fantaisies moyenâgeuses dans la première partie du siècle.
Marchangy et le vicomte d'Arlincourt (cf.
M.Roustan, La Composition française : Conseils généraux, la Lecture, chap.
III, p.
90 et notes).
Le « poncif » romantique; ce qu'il y a d'artificiel dans cette résurrection.
2° Il serait cependant tout à fait injuste de rendre Mme de Staël responsable de cet engouement.
Mme de Staël abien vu ce qui séparait la littérature allemande en général de la littérature française.
« Tout en admirant les œuvresoriginales remarquables de l'Allemagne, tout en goûtant fort peu et en critiquant les produits de la poésie françaised'alors, elle ne persista pas à prétendre que le salut était dans le retour au Moyen âge.
Comme bien d'autres, ellefut arrêtée, embarrassée par le XVIIe siècle ».
(P.
Albert, La Littérature au XIXe siècle, p.
249.) Elle a trop bien vuque la littérature devait être renouvelée pour ne pas comprendre qu'elle le serait par le progrès et par la liberté : iln'y avait pas d'autre moyen pour la littérature de « croître et de vivifier de nouveau ».
Conclusion.
— Malgré les réserves que nous avons indiquées, la distinction établie par Mme de Staël fut fécondeentre toutes, et l'auteur du livre De l'Allemagne a dirigé la littérature dans des voies où elle allait produire d'immortelschefs-d'œuvre..
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