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MICHAULT TAILLEVENT : sa vie et son oeuvre

Publié le 25/11/2018

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MICHAULT TAILLEVENT (1390/1395-1458). Ce poète, qui avait adopté pour devise un jeu de mots sur son nom (« a grant froidure demy chaut »), est le premier représentant d’une école bourguignonne qui fut féconde au xve siècle.
 
Mentionné une trentaine de fois dans les comptes de la cour de Bourgogne, rangé parmi les humbles serviteurs (de 3 à 6 sous par jour), il est le factotum de la culture, organisateur de fêtes, poète chargé de célébrer l’événement quand le duc Philippe le Bon n’a pas encore de chroniqueur. A ses gages s’ajoutent de nombreuses gratifications : il accompagnait le duc comme « chevau-cheur d’écurie » et remplissait diverses missions.
 
La gloire du règne et les séductions du lyrisme courtois
 
On pourrait parler à son sujet de poésie de circonstance si son but n’était pas justement d’élever la circonstance hors de l’anecdotique. Le Songe de la Toison d’or (1431) évoque la fondation du célèbre ordre de chevalerie et la rattache aux origines de celle-ci. Le poème est un moyen de propagande, destiné à créer l’enthousiasme pour les initiatives princières, un instrument de communication avec l’opinion. En 1435, Michault fait jouer une Moralité sur le traité d’Amiens (« Povre commun », endurant le martyre de Guerre, essaie d’apitoyer « Pouvoir papal »). En 1443, il célèbre l’entrée de Philippe au Luxembourg, exaltation de l’ardeur patriotique. Le Lay sur la mort de Catherine lui permet d’étaler sa virtuosité en raffinant sur les contraintes formelles pour en tirer plus de solennité (division des couplets en deux quartiers équivalents, emploi de deux rimes au plus, vers impairs).
 
Dans le Jardin de plaisance, on trouve de lui un « Débat du Cœur et de l’Œil » (pendant une chasse, le narrateur rêve d’un combat entre Œil, qui a arraché Cœur de sa quiétude en se laissant fasciner par Beauté, puis en se détournant sans avoir obtenu merci, et Cœur, devant Amour). La Bien Alliée comporte sept ballades sur le renoncement à l’amour, et le Congé d'amour, sur un thème identique, assimile les malheurs du poète avec ceux des héros antiques (Orphée, Narcisse, Samson), autres « amans malades » (« Plus d’amours ne de ses délis/Ne veul : ma liesse est finee »). L’Edifice de l’hôtel douloureux d’amour, la Ressource et relèvement du douloureux hôtel sont des variations sur le motif de l’architecture allégorique.

« En écho au Bréviaire des nobles de Chartier, Michault compose sur le même schéma (treize ballades, dont douze sont un discours de Vertus qui enseignent une sagesse pratique aux grands) un manuel de morale aristo­ cratique contre>,Je Psautier des Vilains.

Gen­ tillesse, Noble Vertu, Bonté de cœur, Franchise ...

criti­ quent surtout les déviations par rapport à l'idéal d'une classe sommairement définie ( « Est ch il gentil qui cheval esperonne/Ou cil vilain qui son asne talonne >>, vers 450/451).

Le Régime de Fortune propose, en sept balla­ des, un rondeau et un envoi, une sagesse de résignation aux «hommes de Fortune attains >>, sur l'image de la maison de Fortune.

La poésie cc personnelle '' Cette expression trahit bien 1' intérêt -anachronique -de la critique moderne pour un aspect de l'œuvre qui lui est plus familier, les pièces où l'individu se met en scène, où «il raconte sa vie >>.

Ainsi, la Destrousse retrace la mésaventure d'une embuscade dans la forêt de Pont-Sainte-Maxence et demande le remplacement du cheval volé; le Voyage à Saint-Claude manifeste l'éton­ nement du poète devant le paysage de la montagne ( « roches horribles » ), les ac ti vi tés économiques (Salins) : expression d'un «sentiment de la 11ature >> et d'une attention au concret rares au Moyen Age.

Mais c'est le Passe-temps qui lui a valu sa célébrité, au point que « contempler Je Passe-temps Michault >>était devenu une expression proverbiale.

C'est un long monologue (quatre-vingt-treize strophes) sur la fuite du temps, la nostalgie de la jeunesse, les misères de la vieillesse, qui annonce le Tes•ament de Villon (« A l'iver qui est grans et frois/Suis ve1u; hors de joye j'is [ ..

.

] Car en ung hoste! loge et gis/Ou de toutes pars bise vente » ).

Le poète rencontre Vieillesse et Povreté, «pire que mort»: il faut changer de style de vie et d'écriture : .

Michault Taillevent est le premier de ces poètes « fonctionnaires » grâce auxquels la cour de Bourgogne a pu briller d'un éclat soudain; il y en eut de plus presti­ gieux : Chastellain, La Marche, Molinet, mais, chez ses successeurs, l'inspiration officielle et la sophistication des jeux formels de «rhétoriqueurs >> ont étouffé ce qui, du moins supe�ficiellement, fait le charme de Michault pour le public moderne : une poésie parfois spontanée, mais qui, paradoxalement, l'est aussi peu que celle d'un Villon.

BIBLIOGRAPHIE G.

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1975: W.H.

Riec.« Deux Poè m es sur la chevalerie : le Bréviaire des nobles d'Alain Chartier et le Psatttier des vilains de Michault Taillevent».

Romania.

LXXV.

1954.. »

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