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PAGNOL Marcel : sa vie et son oeuvre

Publié le 27/11/2018

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PAGNOL Marcel (1895-1974). Marcel Pagnol est né à Aubagne (Bouches-du-Rhône). Il compléta ses études, commencées à Marseille, en suivant les cours de la faculté des lettres d’Aix-en-Provence : c’est l’époque où il écrit des poèmes pour la revue Massilia, puis pour Fantasio, qu’il a fondé et qui deviendra les Cahiers du Sud. Licencié d’anglais, il est d’abord nommé professeur au lycée de Tarascon, puis à Marseille, enfin à Paris au lycée Condorcet. En 1925, il fait représenter les Marchands de gloire, âpre satire de ceux qui exploitent la mémoire des soldats morts au champ d'honneur, puis Jazz (1926), histoire poétique d'un universitaire qui a raté sa vocation pour le bonheur. Mais il n'obtient le succès u’avec Topaze (au théâtre des Variétés, 1928) et surtout Marius (théâtre de Paris, 1929, avec Rai mu dans le rôle de César). Pagnol est aussi l’un des premiers à avoir su porter ses pièces à l’écran : Marius, adapté en 1931, Fanny et César (écrit d’abord pour le cinéma) en 1932 et 1936. Il fonde les Cahiers du film en 1935 et réalise d’autres œuvres cinématographiques notamment à partir des récits de Giono (Angèle, d’après Un de Bau-mugnes, 1934; Regain, 1937). Les tentatives romanesques de Pagnol sont moins prisées du grand public, malgré leur charme (l'Eau des Collines, tome I : Jean de Florette, tome II : Manon des sources, 1963); et son retour au théâtre, après son élection à l’Académie française (1946) est accueilli avec des fortunes diverses (Judas, 1955; Fabien, 1956). Ce sont en fait des recueils de souvenirs, empreints de l’amour qu'il a toujours eu pour sa terre natale et son milieu familial, qui lui vaudront un regain de succès à partir de 1957, année où sont publiés la Gloire de mon père et le Château de ma mère. Paraîtront ensuite le Temps des secrets (1960) et, après sa mort, survenue à Paris, le Temps des amours (1977).

 

Le sens du (mélo-) drame

 

C’est d’abord sur l’efficacité d'une intrigue simple mais entraînante que reposent les tragédies du début comme les comédies bouffes, les drames ou les scénarios de Marcel Pagnol. Son art consiste essentiellement à transformer en situation théâtrale une anecdote : c’est ainsi que le dénouement pathétique du film la Femme du boulanger (1938) est issu d'un épisode très dépouillé de Jean le Bleu, de Giono (1932), mais peut-être aussi d'une liaison éphémère qu’eut le père de l’écrivain avec une voisine lors de la grossesse de sa mère (il y est fait allusion en quelques lignes dans la Gloire de mon père : « On m’a dit que Joseph le père de l’auteur] profita de sa liberté pour conter fleurette à la boulangère, dont il mit en ordre la comptabilité : voilà une idée déplaisante, et que je n’ai jamais acceptée »). De même, l’émotion un peu facile, mais contagieuse, qui se dégage de la célèbre trilogie Marius, Fanny et César, repose en partie sur l’habileté à ménager le suspense à partir d’une situation de vaudeville, voire de roman-photo : un veuf (César), une pulpeuse poissonnière marseillaise (Honorine), la petite marchande de coquillages (Fanny), le turbulent jeune premier (Marius), enfants respectifs du (futur) couple précédeni, etc. Des amours de Fanny et Marius naîtra un enfant naturel, auquel le vieux mais riche et bon Panisse voudra bien servir de père.

 

A la scène de reconnaissance près, Pagnol n'hésite pas à user de toutes les ficelles qui font le succès du mélodrame : aux bouleversements spectaculaires provoqués par le tumulte des passions, un dénouement invraisemblable mais conventionnel fait succéder l’apaisement affectif et le retour à l'ordre (social) : le père retrouve son fils prodigue, le boulanger sa boulangère... et l’instituteur tombe dans les bras du curé.

 

En fait, par-delà les nécessités (ou les facilités) de la mise en scène, Pagnol semble avoir une conception essentiellement dramatique, parfois même manichéenne, des rapports interpersonnels. Le couple formé par l’instituteur et le curé qui se détestent cordialement est le symbole le plus évident des rivalités ancestrales et des querelles d’amour-propre régissant de façon quasi obsessionnelle les actes des personnages dans l’ensemble de l’œuvre de Pagnol. Celui-ci cherche à concilier les antagonismes et les divergences d’opinion. D’où le dialogue philosophique entre le marquis libertin et le curé, ou encore, dans la Femme du boulanger, la parabole de l’instituteur portant sur ses épaules ce même curé à la recherche de la femme adultère. La réconciliation du clergé et de l’école laïque, le curé voulant bien photographier le père du narrateur au retour de sa chasse héroï-comique, et la leçon de sagesse humaine que l’enfant en tire, c'est aussi la morale qui sert de dénouement à la Gloire de mon père.

 

Le mythe du bon Méridional

 

Pagnol est conscient de l’existence du mal, du tragique de l’existence et, au premier chef, de l’injustice sociale : la critique du rôle de l'argent s’inscrit dès Topaze dans la veine d'une satire impitoyable des faiblesses humaines. Les rapports sentimentaux eux-mêmes sont le plus souvent empreints de cruauté et de violence (cf. la jalousie exacerbée de la grand-mère dans le Temps des secrets : « Ecoute! dit le grand-père, tu n'appelles pas ça de la folie furieuse? — Non, dit ma mère, c’est ça l’amour »). Mais Pagnol envisage avec bienveillance les vicissitudes du destin : les personnages qui en sont victimes sont trop simples pour sentir l’horreur métaphysique de leur condition. Marius est, à ce titre, exemplaire : veuf, Panisse est prêt à tout... même à se remarier! L'ironie dans ses répliques, jointe à la naïveté des personnages, permet à Pagnol de réagir à la souffrance non par la révolte mais par l’acceptation bon enfant du mal. Certes, « il y a des fois que le bon Dieu n’est pas gentil », mais, avec des êtres simples et, par définition, sains, tout finit par s'arranger — autour d’un bon repas, par exemple : « César. — Moi, j’ai beaucoup de choses à te dire, tout en mangeant la daube que Félicie a faite ce matin. Réchauffée, c’est un délice. Surtout qu'elle y a mis une bonne poignée d’olives noires. Viens, mon fils ». Rideau (dernière réplique de Fanny).

 

Apparemment « pris sur le vif », faussement naturels mais tout à fait conformes à l’image de la bonne nature, stéréotypés jusqu’à la caricature, les Marseillais de Pagnol ne semblent guère préoccupés que par les cornes que le mariage dispose immanquablement sur leur tête. Tradition gauloise obligeant, les femmes se partagent les rôles de la fille perdue, de la vieille fille acariâtre ou de

« ---------·-··-· l'innocente séduite que l'amour rachètera.

Mais l' exagé­ ration dans la simplifi catio n des caractères et dans la distribution des rôles est contrebalancée par une ten­ dresse non moins artificielle et une bonté idéale qui pour­ raient faire sourire si les répliques grandiloquentes qu'elles suscitent parfois n'étaient mises dans la bouche d'acteurs exceptionnels (Raimu, Fernandel, Delmont.

..

) qui ont su les faire passer avec des accents poétiques sinon naturels (cf la scène du pardon dans la Femme du b o ula ng er).

La Femme du boulanger.

-Dans un village de Pro­ vence, où chaque habitant a son ennemi personnel, arrivent le nouveau boulanger et sa femme.

Aurélie.

Le marquis présente aux nouveaux arrivants le berger qui viendra.

deux fois par semaine.

chercher le pain pour le château.

Le soir même, quelques bergers viennent chanter une sérénade sous les fenêtres du boulanger et de sa jeune et très belle épouse.

Celle-ci descend leur offrir une fougasse.

Au réveil, le boulanger ne trouve plus sa femme.

Il ne parvient pas à croire.

malgré divers témoignages, qu'elle ait pu le quitter : sa confiance en elle est aveugle et absolue.

Lorsqu'il doit finir par se rendre à l'évidence.

il dépérit et refuse de conti­ nuer à faire du pain.

Alarmé.

tout le village se réunit et décide.

à l'issue d'une assemblée.

de retrouver la jeune femme et le berger qui l'a enlevée.

Les antagonismes s'es­ tompent.

et tous s'attellent.

le curé et l'instituteur en tête.

à cette quête tragi-comique.

Retrouvé sur une ne.

le couple d'amants est traqué.

Le berger s'enfuit à la nage.

La femme du boulanger est ramenée à la faveur de la nuit.

Son mari lui pardonne.

Aurélie réplique : «Une bonté comme la tienne, c'est pire que des coups de bâton ».

Cependant le boulan­ ger sermonne la chatte.

Pomponnette, qui avait abandonné Pompon pour un chat de gouttière! Très émue.

Aurélie ral­ lume le four.

A nouveau.

on peut voir la fumée noire s'éle­ ver du foyer.

Réalisé par Pagnol.

le film eut pour interprètes princi­ paux Raimu (le boulanger).

Ginette Leclerc (Aurélie) et Ch.

Moulin (le berger).

Les gens du village étaient campés par d'excellents seconds rôles, Robert Vattier.

Charpin, Del­ mont, etc.

la magie du langage On sent chez Pagnol l'héritage culturel d'un passé universltat re: scènes moliéresques emre Fanny et Panisse, rappelant les duos de l'Ecole des femmes, jeux de scène empruntés à la farce classique, goût pour les formules symétriques : «,LE CURË.

-Vous êtes, je crois, tout frais émoulu de l'Ecole normale ...

L'INSTITUTEUR.

- Vous êtes, je crois, tout récemment éclos du Grand Séminaire?» (la Femme du boulanger).

Les souvenirs de Chateaubriand se retrouvent chez le mémorialiste qui évoque le Château de ma mère; l'éloquence poétique imprègne une description de la nature proche de la vision d'un Virgile (Pagnol a publié une traduction en vers des Bucoliques en 1958).

Mais Pagnol a surtout réussi à exprimer une certaine image de la Provence et, à travers elle, un passé folklori­ que, peut-être trop idyllique, fait de plaisirs simples et de souffrances atténuées par un fatalisme naïf.

Dans un monde humble, dominé par les préoccupations essentiel­ les de la vie, l'attachement à la famille, le go û t du métier, un bon sens spontané sont les valeurs essentielles que les personnages incarnent.

Le mérite de Pagnol est d'avoir su traduire cette philosophie réconfortante de la « médiocrité », à la fois avec humour et avec la saveur de ces nouveaux Persans que l'instruction n'a pas encore déformés et pour qui ferry boat se prononce fériboite; et la tour Eiffel, la tourifèle.. »

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