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PAPILLON Marc de : sa vie et son oeuvre

Publié le 27/11/2018

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PAPILLON Marc de, seigneur de Lasphrise (1555-1599). Taxée, non sans cause, d’obscénité par les prudes esprits classiques, la poésie de Papillon de Lasphrise a été longtemps victime d’une censure opiniâtre. Comprenant des centaines de sonnets et des dizaines d’élégies, de chansons, de stances, cette œuvre abondante renferme quelques-uns des plus purs joyaux de l’Éros baroque. Par son lyrisme et la sensualité polymorphe qu’elle exalte, elle apparaît comme l’une des créations les plus personnelles et les plus originales de la Renaissance.

 

Un éloquent soudard

 

Né près d’Amboise, Marc Papillon de Lasphrise est le cadet d’une famille de petite noblesse originaire de Gascogne. Tôt orphelin de père et élevé par sa mère, Marie du Plessis-Prévost, il abrège assez vite ses études pour embrasser la carrière des armes. En 1568, âgé de quatorze ans à peine, il combat dans les rangs catholiques à l’occasion de la troisième guerre civile. Presque aussitôt « blessé et reblessé », il fait ensuite la guerre aux Turcs sur les galères de la Méditerranée, dans les mois qui suivent la bataille de Lépante (1571). En 1575, de retour en France et séjournant au Mans, Papillon s’éprend, entre deux combats, de la novice Renée 

« son lyrisme et la sensualité polymorphe qu'elle exalte, elle apparaît comme l'une des créations les plus person­ nelles et les plus originales de la Renaissance.

Un éloquent soudard Né près d'Amboise, Marc Papillon de Lasphrise est le cadet d'une famille de petite noblesse originaire de Gascogne.

Tôt orphelin de père et élevé par sa mère, Marie du Plessis-Prévost, il abrège assez vite ses études pour embrasser la carrière des armes.

En 1568, âgé de quatorze ans à peine, il combat dans les rangs catholiques à l'occasion de la troisième guerre civile.

Presque aussi­ tôt «blessé et reblessé )>, il fait ensuite la guerre aux Turcs sur les galères de la Méditerranée, dans les mois qui suivent la bataille de Lépante (1571).

En 1575, de retour en France et séjournant au Mans, Papillon s'éprend, entre deux combats, de la novice Renée Le Poulchre, qu'il chantera dans ses vers sous le nom de Théophile (=aimée de Dieu).

Malgré les plaintes pas­ sionnées du soudard, 1 'honnête Théophile se refuse et finit par prononcer ses vœux.

Pour oublier cette infor­ tune, le capitaine Lasphrise se dépense en cent lieux : on le voit successivement en Bourgogne, en Normandie et en Saintonge, pourfendant de mêlée en mêlée protestants et reîtres allemands.

A la faveur d'une trêve, en 1577, il tombe amoureux de sa cousine, Polyxène de Papillon, et goûte avec elle le repos du guerrier.

En dépit du mariage de celle-ci avec un barbon, leur liaison se poursuit, ardente et libertine, plusieurs années durant.

De 1580 à 1589, la vie militaire reprend le dessus, et Lasphrise guerroie sous le commandement du duc de Mayenne, le futur champion de la Sainte Ligue, en Dauphiné et en Gascogne.

En 1589, année de l'assassinat de Henri Ill, il prend une sorte de retraite anticipée, accablé qu'il est par les séquelles de ses blessures.

Il s'emploie dès lors à peaufiner ses Premières Œuvres (1597 et 1599), qui contiennent notamment les Amours de Théophile et l'Amour passionnée de Noémie, cette dernière n'étant autre que l'ineffable cousine.

Cependant, il compose quelques pièces d'une inspiration plus éthérée, oraisons et testament, et veille à 1' éducation de sa fille Margue­ rite, née dans des circonstances inconnues.

la nonne et la cousine Dans sa forme, l'entreprise poétique du capitaine Las­ phrise n'a rien d'original.

La célébration de la femme en vain adorée à travers un recueil d'Amours qui la divini­ sent -et qui, à cette fin, rassemble une « hécatombe» de pièces de mètres variés -, obéit au schéma imposé par le pétrarquisme.

En cela, Lasphrise s'inspire de ses aînés du Bellay et Ronsard et rivalise brillamment avec ses contemporains Desportes et d'Aubigné.

Mais la mar­ que personnelle du poète soldat se fait sentir dès le choix de l'objet aimé.

L'impossibilité de la quête amoureuse - thème traditionnel s'il en fut- y atteint à son expres­ sion la plus périlleuse, puisque au refus de la belle s'ajoute l'interdit ou le tabou.

Interdiction religieuse, dans le cas de !a nonne Théophile, que le soupirant rêve d'arracher à l'Epoux mystique; tabou moral de l'inceste, dont la piquante cousine a vite fait d'effacer la hantise une fois qu'elle s'est rendue aux assauts du bouillant capitaine.

Lasphrise commence donc par jeter son dévolu sur une novice promise à Dieu, et ses vers travestissent le style pieux en une parodie franchement blasphéma­ toire de la poésie mariale.

C'est ainsi qu'il présente à Théophile son« Oblation >> et qu'il ne rêve Oue de nager un jour dans la mer de Isla grace.

Cette tonalité insolente, qui confond volontiers l'amour sacré et l'amour profane et voit dans la nudité fantasmée de la nonne une sainte apothéose, amène le poète à se vouer au diable : Vive Satan, pourvu que j'aye mes amours! ou à exalter cette hérésie qu'il a, sa vie durant, com­ battue par les armes : « Vive le huguenot, et vive Je papiste! ».

A ces cris d'une déraison à peine feinte suc­ cède, avec Noémie, la plénitude d'un accomplissement physique renouvelé à chaque instant.

Mais pour corser le bonheur d'étreintes répétées qui s'expriment dans des avalanches de soupirs («Ha mes yeux! ha mon cœur! ha mon Tout! ha ma vie!»), il est encore besoin d'ajouter aux postures les plus variées et aux situations les plus scabreuses la proximité du sacrilège.

Aux jeux débridés sur le lit du cocuage se mêlent l'image du mari bafoué et surtout le souvenir de la Pentecôte, où l'aimée a répondu aux avances du soupirant : Ce fut le jour que le saint Paraclit Aux envoyez illumina la vie ...

La béatitude du jour saint engendre, quelques vers plus loin, l'image vigoureuse du «paladin luisant>> tendu pour le combat d'amour.

Le triomphe de la petite mort Le sacrilège apparent est en même temps une sanctifi­ cation.

Le rapprochement opéré entre l'illumination par le Saint-Esprit et le corps glorieux de l'orgasme témoi­ gne d'une même réalité essentielle ici et là.

De la Pente­ côte à l'extase charnelle, le vent Paraclet remplit les êtres et leur communique une sorte d'éternité immédiate.

Sans doute l'individu s'y perd-il.

Le coït est souvent évoqué par Lasphrise en termes de « petite mort» ( « Mignonne, je me meurs après ces coups friands»), et le poète en vient à souhaiter parfois qu'elle se confonde avec la vraie: La belle mort d'amour est le co nten teme nt.

Mais 1' « ardeur immortelle » qui anime les amants au moment suprême leur fait éprouver leur essence divine.

Lasphrise a donc ressourcé l'antithèse pétrarquiste en la replongeant dans la réalité physique des corps.

L' oxy­ more vécu de l'amour -mort et éternité -va se tra­ duire alors dans les mythes privilégiés de 1' envol sexuel d'Icare ou de Phaéton: en brûlant, le poète amoureux « phaétonnise >> et s'abîme en plein ciel.

On ne saurait donc réduire la poésie de Lasphrise à ces évocations gauloises du plaisir partagé ou solitaire, non plus qu'à ces allusions grivoises où de savantes postures s'allient à un exhibitionnisme patent.

Les jeux de la langue et de l'amour y indiquent en filigrane, par­ delà l'euphorie des mots et des corps, ume vérité plus grave: Langottant mignottez, mordillez suçotant, Baisotant riotez.

babillez combatant Et mourez glorieux en si belle escarmouche.. »

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