Par quels traits de son caractère et de sa poésie Lamartine plait-il aux jeunes gens ?

« Malgré son prestige littéraire, il n'a rien de la vanité de l'homme de lettres; lui-même considère la poésie ~omme un délassement agréable, une distraction élevée, propre à .

·~harmer.

sèS loisirs.

Aux douceurs d'une vie consacrée à la littérature, il préfère même les mâles vertus de l'homme d'action.

C'est d'ailleurs avec un égal bonheur qu'il entre dans la vie poli­ tique.

Il improvise de.

brillants discours,; fait preuve d'une compétence étonnante dans les questions les plus diverses, devient le défenseur attitré de toutes les nobles causes, sans être l'esclave d'aucun parti.

Son courage ·est au niveau de son esprit; il réalise en lui l'union d'un beau génie et· d'un grand caractère.

Il ne craint pas de braver l'émeute pour défendre l'hon­ neur du drapeau tricolore, et sait pardonner à ses ennemis personnels avec une dignité et une générosité qui forcent l'estime de ses adversaires eux­ mêmes ..

.

** Mais sa biographie me fût-elle .

inconnue, que j'aimerais.

encore ce grand homme .pour l'incomparable noblesse de son œuvre poétique.

Nul n'a su comme.

lui,, toucher la lyre pour en tirer des soupirs plus mélodieux, des accents pl!ls émus.

Il traite tous l~s grands thèmes, avec une sincérité d'émotion, une hauteur de.

pensée, une justesse et une délicatesse d'expres­ sion qui ravissent le lecteur.

Tout y est d'un sentiment exquis, d'une sua­ vité si' harmonieuse qu'il semble avoir exprimé l'âme humaine elle-même dans la.

musique de ses vers.

·La notation de s.es états d'âme .est.

si achevée, que ses élégies traduisent les plus vagues aspirations et les mouvements les plus délicats de nos cœurs.

Nos rêveries idéales, nos songes sublimes, nos plus intimes soupirs, il les a exhalés dans des vers d'une gravité et d'une simplicité admirables, que l'Oll ne peut déclamer sans .

les déflorer.

Ils veulent être à peinè murmurés, comme d'ineffables mélodies qui résonnent ·du plus' profond de nous-mêmes.

Qui de nous, en une heure morose, rie s'est remémoré ce poignànt appel à la mort : « Quand la feuille des bois tombe dans la prairie «Le vent du.

soir s'élève et.

l'arrache ·au vallon «Bi moi, je s.uis semblable à la feuille.

flétrie :.

«-Emportez-moi.

·comme· ·elle,: orageux aquilon? Est-il un adolescent, qui, touché par la mélancolie, n'ait ,aimé- il beJ,"cer sa jeune douleur au rythme des vers pénétrants de l'Isolement? N'avons-noùs pas éprouvé cette sérénité, cette plénitude de paix: iorsque, comme dans le Vallon, notre âme a oublié, ll.U contact de la nature, ses heures de fièvre et de trouble? «Mon cœur est en repos, mon âme est en silence.

« Le bruit lointain du monde expire en arrivant · « Comme un son éloigné qu'affaiblit la distance « A.

l'oreille incertaine apporté par le vent.

Lamartine n'est pas seulement un élégiaque incomparable, mais; souvent un profond.pense~r~ Ses œuvres sont émaillées de.

vers parfaits.

La pensée y atteint une telle rigueur, une plénitude si rare, qu'ils se·gravent; à jamais. »