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PIEYRE DE MANDIARGUES André

Publié le 27/11/2018

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PIEYRE DE MANDIARGUES André (1909-1991). André Pieyre de Mandiargues, au nom étrangement précieux, a longtemps poursuivi pour un public d’initiés une œuvre de poète et de nouvelliste, avant d’être plus largement connu par ses romans. Aujourd’hui sa place est acquise, et on pourrait dire qu’il y a un « genre » Mandiargues, situé au confluent du fantastique et de l’érotisme, dans ce que l’auteur appelle « un climat propice à la transfiguration des phénomènes sensibles ».
 
Né à Paris dans un milieu fortuné, Mandiargues se passionne d’abord pour l’archéologie et mène une jeunesse voyageuse en Europe et en Orient : mais ses périples le ramènent généralement sur les bords de la Méditerranée, son véritable point d’ancrage affectif. L’Europe est en guerre lorsqu’il publie son premier livre, Dans les années sordides (1940). Il se désintéresse du conflit et continue d’écrire de nombreux poèmes qui ne seront publiés en recueil qu’en 1961, sous le titre l’Âge de craie.
 
Sa rencontre avec André Breton juste après la guerre le fera un moment s’intégrer au groupe surréaliste. Influence évidente, mais plutôt par l'intercession des peintres : rien ne lui est plus proche, par exemple, que l’univers de Léonor Fini. Cette dimension visuelle, aux détails extravagants ou raffinés, est évidente dans son premier recueil de nouvelles, le Musée noir (1947). Il ne fait aucun doute que la nouvelle — par le resserrement qu’elle exige — est un genre qui lui convient à merveille. Le meilleur de Mandiargues est peut-être dans ce Musée noir : « le Passage Pommeraye » ou les curieuses errances d’une jeune fille qui obéit à l’injonction d'une « main gantée de rouge »; le « Sang de l'agneau », où la perte de la virginité s’associe, dans l’imaginaire, au meurtre des parents. Ces rituels subtils ou barbares et le goût pour les souterrains, les portes closes, les décors obsédants se retrouveront dans Soleil des loups (prix des Critiques, 1951) ou Feu de Braise (1959, rééd. 1984).
 
Au moins pour certains lecteurs, ces deux ouvrages ont suffi à imposer le personnage paradoxal de Mandiargues : esthète et dandy, avide d’érudition, grand amateur de raretés culinaires — bref, anachronique sur bien des plans, mais, par ailleurs, d’un scepticisme qui le délivre de toutes les idées reçues, d’un enthousiasme qui accorde libre cours aux associations d’images, à leurs éblouissements.

« L'Allemagne romantique, il la retrouve avec plus d'ampleur dans la Motocycle tte ( 1963), où une jeune fille de dix-neuf ans, Rébecca, accomplit un long périple à moto de Haguenau à Heidelberg, pour rejoindre son amant.

Les thèmes du romantisme sont ici délibérément transcrits sur le plan moderne : aux forêts ténébreuses s'est substituée l'autoroUie; au cheval qui emporte le cavalier répond la machine, ce « taureau noir » dont Rébecca aime sentir la puissance entre ses jambes.

Il se crée peu à peu un climat de fatalité, jusqu'à l'accident final -et prévisible, car la moto, objet sexuel, est évi­ demment aussi un instrument de mort.

On remarque que les protagonistes de ces récits sont le plus souvent des femmes ou des jeunes filles, qui s'avan­ cent en frissonnant au-devant du danger; elles ont un caractère indépendant, quoique finalement soumis à l'homme, et leur décision des' engager dans 1' aventure ne va jamais sans être accompagnée d'une intuition violente, d'un pressentiment qui oriente le choix de leur destin.

En 1968, la Motocyclette était portée au cinéma.

Mais l'année précédente, Je nom d'André Pieyre de Mandiar­ gues avait connu une large notoriété avec l'attribution (inattendue) du prix Goncourt à la Marge.

Il est vrai que c'est sans doute là son roman le plus ambitieux, et, pour une fois, le héros est masculin.

Sigismond Pons arrive à Barcelone, une étape dans un voyage d'affaires, où il compte se reposer trois jours.

Son premier geste est d'al­ ler retirer à la poste une lettre que sa femme lui a expé­ diée et qui est restée en attente.

Mais la lettre est écrite d'une autre main, et, pressentant son contenu tragique, il décide d'en remettre la lecture à plus tard.

En attendant, il va occuper ces trois jours de liberté exactement comme il 1 'avait prévu: c'est la , la distance qu'il interpose entre son destin et lui.

Il déambule dans Barce­ lone, et spécialement dans le quartier des prostituées, où il trouve une compagne pour passer ses trois nuits.

L'échéance venue, il ouvre la lettre : ayant pris connais­ sance de la mort accidentelle de son fils, qui a entraîné le suicide de sa femme, il se tire à son tour une balle de revolver.

Depuis la .'14arge, Mandiargues a renouvelé l'expé­ rience romanesque avec le Deuil des roses (1983) et Tout disparaîtra (1987).

Il se tourne vers le théâtre (Isabella Morra, 1973; Madame de Sade, traduit de Mishima, 1976; la Nui• séculaire, 1979; Arsène et Cléopâtre, 1981), la critique d'art (Bona, l'amour et la peinture, 1971, consacré à son épouse le peintre Bona Tibertelli; Arcimboldo le merveilleux, 1977), revient à la poésie (Ruisseau de�: solitudes, 1968; l'Ivre Œil, 1979).

Il retrouve enfin sa prédilection pour les récits courts, et publie deux recueils, Mascarets ( 1971 ), Sous la lame (1976).

Mascarets s'ouvre sur l'une de ses meilleures nouvelles, « IJ Marée», rituel d'initiation érotique de deux adolescents sur une plage, au rythme de la montée des eaux.

Le c:inéaste Borowczyk a porté à l'écran cette nouvelle (Contes immoraux, 1974), puis d'autres: le résultat est assez navrant.

On ne transpose pas si aisé­ ment en images de tels textes, même -et surtout -si l'image y est omniprésente.

Ces décors ouvragés, ces rues la nuit, ces enseignes emblématiques, ces corps nus ont une magie qui tient d'abord au pouvoir de l'écriture.

BIBLIOGRAPHIE Un saturne g:zi, entretiens avec Y.

Caroutch, Gallimard, 1982; H.

Friebel.

die Utopische Dimension in den Erzahhmgen André Pieyre de Mandiargues », Heidelberg, C.

Win ter, 1975; S.

Stetié, Pieyre de Mandôargues, Paris, Seghers, 1978.

B.

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