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SAINT-GELAIS Mellin de, dit Mélin ou Merlin ou Mélusin

Publié le 13/10/2018

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SAINT-GELAIS Mellin de, dit Mélin ou Merlin ou Mélusin (1491-1558). Poète officiel de la Cour de France de l’exil de Marot à sa propre mort, ayant réussi à garder cette place malgré l’ascension rapide de Ronsard, Mellin de Saint-Gelais est un étrange personnage : il n’a presque rien publié de son vivant et la seule édition «complète» de ses œuvres, faite en 1873, lui attribue trop de pièces qu'il faut redonner à Marot, Chappuys ou autres marotiques et poètes de Cour. Ce qui reste, avec quelque vraisemblance ou certitude, est néanmoins considérable, et mérite bien qu’avec Rabelais, Marot et ses contemporains, on s’y intéresse.

 

Par ses ancêtres, Mellin avait, plus que Nerval, quelque titre à se rattacher aux Lusignan et à la fée Mélusine, et Rabelais ou ses amis l’appellent volontiers Merlin. Si l’on ne sait de quel père (et de quelle mère!) il est le fils illégitime, on est sûr que son grand-père est Pierre de Saint-Gelais, seigneur important en Poitou, et dont la famille est bien vue de la jeune Louise de Savoie,

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« ne peut se dérouler sans qu'il en contrôle le scénario ou invente de charmants petits poèmes à fixer aux pattes d'oiseaux que les gentilshommes envoient vers leurs dames.

Sa poési .e s'inscrit partout, sur les livres d'heures , les portraits, les coffrets et boîtes précieuses : c 'es t comme si tous les objets de cette Cour raffinée devaient prendre parole, et sa parole.

Il invente aussi de faire jouer des tragédies à J'antique devant la Cour , comme on le fait en Italie, et c'est ainsi qu'il traduit de Trissino la Sophonisbe (1554) pour les noces du marquis d'El ­ beu f: les filles de la reine et des gentilshommes tiennent les premiers r ôles .

Cette représentation est aussi détermi­ nante pour l'essor de la tragédie humaniste que le succès de la Cléopâtre de Jodelle au même moment, même si, effrayée de voir l es malheurs des Grands, Catherine de Médicis refuse de pour suivre ce type de représentation.

Pourtant , ses premiers rapports avec la Pléiade ont été très difficiles, et malgré une réconciliation publique avec Ronsard (obligé en 1553 de lui offrir une ode lon gue et noble , où il s'excuse d'avoir parlé sous l'effe t de la colère, l'« ire» si nuisibl e aux États), on ne peu t affirmer que son animosité - il est alors âgé - ne se soit pas portée vers d'autres poètes comme du Bellay et Magny.

Tous pourtant lui offrent des poèmes avec un respect assez convenu.

Seul Ronsard semble lui ê tre resté fidèle après sa mort; c'était pourtant lui que Mellin avait, par jalou sie, le plus ridiculisé en lisant de façon bouffonne des vers de l ui devant la Cour.

Cette querelle a gâché une figure pourtant beaucoup plus intéressante: car Mel­ lin fut lié à Rabelais, qui lui a repris les deux longues énigmes du Gargantua (modifiées par Rabelai s, ou par Mellin lui-même?), et les poètes de L yon trouvèrent en lui un arbitre et un modèle dans le traitement des modes italiens.

L'un des premiers, en effet, il traduit et adapte 1' Arioste, l'Arétin, Pétrarque, et ses traductions de l'Ari oste sont reprises pendant tout le xVI• siècle.

Il est de ceux qui introduisent la tierce rime et le sonnet, et rédige lui-même en italien.

Ses connaissances et sa prati ­ que du luth lui donnent une réputation universelle de musicien.

Proche des néo -la tins, il traduit, comme Marot, des épigrammes de Martial, diffuse avec Salmon Macrin les poèmes d'Horace et indique ou conforte des modes, d'autant qu 'il travaille souvent en collaboration: non seulement avec Marot (pour qui il écrit les Blasons anatomiques de l'Œil et du Bracelet de cheveux avant d'en composer d'autres pour lui-m ême), mais encore avec Chappuys et Héroët pour la tapisserie (devenue vitrail) de l'Amour de Cupido et Psyché, pour ne pas pa rler d'autres collaborations vraisemblables.

Certains de ses poèmes, comme la Définition d'Amour - imitée des Italiens -, serviront de modèle à Ronsard et Jodelle, et leur habileté métrique, comme la justesse humaniste de leur vocabulaire n'ont rien de méprisable.

Mais c'est surtout les pièces courtes , comme rondeaux, huitains ou dizains, que Mellin affectionne, et il est bien difficile, quoi qu'on dise, de distinguer dans ces textes lestes ou polissons , qui o nt beaucoup fourni aux recueils collectifs du xv ie siècle (recueils de poésie ou recueils de musique) , ce qui est de M arot ou de Saint -Gelais : leur sens de l'économie facétieuse, qui s'illustre autre­ ment dans la forme longue du coq -à-l'âne [voir COQ -A ­ L 'ÂNE] ou de l'énigme, les rapproche par le thème et le ton, des contes et nouvelles , ou de ce que deviendra la fable.

Le plus beau texte de Mellin -le seul qu'il ait publié, quoique anonymement, en 1546, à Lyon - est pourtant un texte de prose dédié à une jeune damoiselle lyonnaise, un Advertissement sur le jugement d'Astrologie; dans l'engouement général pour ceHe discipline qui a ses savants et ses charlatans, à ce moment plus qu'à tout autre, Mellin montre une distance philo sophique mer -veilleuse; on voit germer dans sa prose élégante, très moderne par le tour et le vocabulaire, l'aisance et l'agressivité de la prose philosophique du xvm• siècle.

Il passait en effet pour être assez bon en astrologie.

Mais vers quelles disciplines n'a- t-il pas dû se por ter en secret, en bon humaniste rabelaisant? Esprit supérieur, langue supér ieur e, Mellin est un per­ sonnage décidément surprenant.

BIBLIOGRAPHIE La seule édition moderne a été donnée par P.

Blanchemain, dans la Bibliothèque elzévirienne, Paris, 1873 , 3 volumes .

Ses attributions ont fait l'objet, très tôt, de nombreuses contes ta­ tions : P.

Jourda, « Sur que lques poésies attribuées à Mellin de Saint-Gelais», R.H.L.F., XXXI, 1924, p.

303 -305 , XXXV , 1928 , p.

606-609, XXXVI, 1929, p.

309-312; V.L.

Saulnier, «Poésies de Saint-Ge lais, Marot et autres Marotiques d'après un manuscrit non sig nalé », Mélang es offerts à D.

Morner , Paris, 1951; id., «Mellin de Saint -Gelais, Pernette Du Guillet et l'air Conde cla ­ ros», B.H.R., XXXII, 1970, p.

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30-69; Y.

Fer­ nillot, >, Mélanges de la Bibliothèque de la Sorbonne, IV, 1983, P.P· 77-87; les Sonnets, éd.

L.

Zilli , Droz, 1990.

Etu des.

- Préface de P.

Blanchemain aux Œuvres complètes, 1873; H .J.

Molinier, Mellin de Saint-Gelais, Rodez, 1910, reprint Slatkine, 1969; Ph.

A.

Becker, Mellin de Saint -Gelais, Vienne , 1924; J.

Plattard,. »

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