SALON
Publié le 11/05/2019
Extrait du document
SALON. On n'a que trop tendance à considérer )\"écrivain dans sa solitude. réelle, certes, au moment où il fixe une partie de son comportement sous la forme d'une trace notant un certain discours, mais limitée dans sa durée à l'acte d'écrire. En amont et en aval de cet acte, l'écrivain n'est — sauf rares exceptions — jamais seul (même quand il s'estime écrivain maudit). L'œuvre qui, en fin de compte, paraîtra en librairie et, plus encore, celle qui sera éventuellement lue par les générations ultérieures, prend son origine en lui, mais elle est dans sa genèse la résultante de nombreux facteurs de tous ordres qui réagissent les uns sur les autres à l'intérieur de l'espace de communication que l'insertion sociale de l'écrivain et sa propre aptitude à communiquer dessi nent autour de lui.
Il n'est pas toujours facile de percevoir cet espace. Cependant, on peut définir historiquement un certain nombre de lieux privilégiés qui, à certaines époques, lui donnent des limites géographiques nettes. Cette topographie n'a d'ailleurs de sens qu'à partir du moment où l’écrivain commence à être perçu comme possédant une fonction sociale spécifique, c'est-à-dire comme appartenant à un groupe jouant un rôle consciemment perçu dans la société. Cela a été le cas dans la civilisation occidentale après le développement de l'imprimerie et donc de l'écriture comme moyen d'expression et de communication artistiques privi légié.
Cependant, certains cadres préexistaient à ce phénomène. Un des plus anciens est celui des cours royales. prin-cières ou papales. Mais il faut reconnaître que, sous leur forme médiévale, ces cours ont servi de lieu d'incubation aux arts plastiques beaucoup plus qu'à ce qui ne s'appelât pas encore lîtté-rature. Elles ne sont devenues « littéraires >> qu'à partir de la Renaissance et l'ont été surtout aux xviie et xviiie s.
Mais la Cour ne s'est jamais révélée pour l'écrivain un environnement aussi bon que pour le peintre, le sculpteur, l'architecte ou le musicien. À manier des mots, on s'engage beaucoup plus explicitement qu'à manier le pinceau, le burin, le compas ou l'archet. Les règles sociales rigides qui régissent une pour, les tensions et les contradictions qui s'y développent, de façon d'autant plus contraignante que le milieu est plus étroit et plus fermé, conduisent à faire de l'écrivain un marginal toujours menacé de disgrâce s'il ne se conforme pas au discours conventionnel qui dissimule ces obstacles.
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de
nombreux facteurs de tous ordres qui
réagissent les uns sur les autres à
l'intérieur de l'espace de communication
que l'insertion sociale de l'écrivain et sa
propre aptitude à communiquer dessi·
nent autour de lui.
Il n ·est pas toujours facile de percevoir
cet espace.
Cependant, on peut définir
historiquement un certain nombre de
lieux privilégiés qui, à certaines époques,
lui donnent des limites géographiques
nettes.
Cette topographie n'a d'ailleurs
de sens qu'à partir du moment où l'écri·
vain commence à être perçu comme
possédant une fonction sociale spécifi·
que, c'est·à·dire comme appartenant à
un groupe jouant un cOle consciemment
perçu dans la socié té.
Cela a été le cas
dans la civilisation occidentale après le
développement de l'imprimerie et donc
de l'écriture comme moyen d'expression
et de communication artistiques privi
l ég ié .
Cependant, certains cadres préexis
taient à ce phénomène.
Un des plus an
ciens est celui des cours royales.
prin
cières ou papales.
Mais il faut re
connaître que, sous leur forme médié·
v ale, ces cours ont servi de lieu d'incuba
tion aux arts plastiques beaucoup plus
qu'à ce qui ne s'appelait pas encore lîtté ·
rature.
Elles ne sont devenues « litté·
raires >> qu'à partir de la Renaissance et
l'ont été surtout aux xv11• et XVIII • s.
Mais la Cour ne s'est jamais révélée
pour l'écrivain un environnement aussi
bon que pour le peintre, le sculpteur,
l'architecte ou le musicien.
À manier des
mots, on s'engage beaucoup plus explici·
tement qu'à manier le pinceau, le burin,
le compas ou l'archet.
Les règles sociales
rigides qui régissent une cour, les ten
sions et les contradictions qui s'y déve
loppent, de façon d'autant plus contrai
gnante que le milieu est plus étroit et
plus fermé, conduisent à faire de l'écri·
vain un marginal toujours menacé de
disgrâce s'il ne se conforme pas au
discours conventionnel qui dissimule ces
obstacles.
La vie intellectuelle et littéraire s'épa
nouit plus volontiers dans des sociétés
privées qui, sous deux formes diffé
rentes, connurent jusqu'à nos jours un grand
succès : plus spécialisées, ces
sociétés devinrent des académies (le
Dictionnaire de Richelet, en 1680, les
définit comme des sociétés de « gens de
lettres ou de personnes qui font profes
sion de quelqu'un des arts libéraux » et
qui se réunissent pour « parler des
belles-lettres ou de choses de leur art >>) ;
plus mondaines.
eUes restèrent à l'état
de salons.
Dans un salon.
les relations sont
dominées par la personnalité de l'h ôte.
et le plus souvent de l'hOtesse.
La vogue
du salon correspond.
en effet.
au régne
des femmes sur la littérature, de la
marquise de Rambouillet à Mm• de Staël.
La couleur bleue de la chambre où la
marquise de Rambouillet commença à
recevoir à partir de 1610 était une
audace en matière de décoration.
Dès le
début.
le salon s'annonce comme nova
teur.
Pour la première fois.
il s'agit d'un
espace restreint.
clairement défini, où
chacun joue son rOle comme dans une
pièce de théâtre qui n'est pas forcément
classique.
Le romanesque de I'Astrée
donne son style à l'hOtel de Rambouillet
dans cette société aux nerfs à fleur de
peau, où les guerres de Religion sont
encore mal oubliées et où se préparent
les troubles de la Fronde.
Dans cette
première phase, le salon.
s'il s'ouvre
largement aux écr·ivains (Chapelain.
Bal
zac.
Voiture), est cependant d'abord un
lieu de sociabilité aristocratique la
littérature n'est qu'un élément dans le
rituel de la mondanité ; les madrigaux.
les portraits ou les maximes prennent
place à cOté d'autres jeux d'esprit- ou
d'argent.
C'est aprés 1650 que la vogue
du salon.
devenue "fureur >>, se répand
non seulement à Paris (il en existe alors
une quarantaine).
mais en province :
toutefois chaque salon ne compte guère
qu'une dizaine d'habitués et Somaize
(Dictionnaire des précieuses), recensant
leurs participants illustres, n'en dénom
bre que 700.
Le public des salons
français, au milieu du xvu• s., de Paris
à Lyon et d'Aix à Nancy ne devait
rassembler que 6 000 à 8 000 personnes .
À cette date.
le salon qui donne le ton
est celui de M',.
de Scudéry.
La novation
y est plus explicite : c'est la préciosit4.
»
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