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VAUGELAS, Claude Favre, baron de Pérouges, seigneur de : sa vie et son oeuvre

Publié le 11/11/2018

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Cette famille de robe avait depuis peu accédé à la noblesse. Le père était un lettré, poète à ses heures. Il se chargea de diriger lui-même l’instruction de son fils. Il appartenait, d’autre part, au cercle des amis de François de Sales, disposant là d’un important réseau de relations, en même temps qu’il affirmait avec l’Académie flori-montane [voir Sales François de] une piété, laïque mais solide, dont son fils semble avoir hérité.

 

Ce dernier entreprit une carrière moins provinciale. Entré au service de la maison de Savoie, du duc de Nemours Genevois — cousin du duc de Savoie régnant —, ses emplois de secrétaire le firent voyager vers Turin, puis vers Paris. Il se fixa dans la capitale et, mettant à profit les recommandations dont il disposait, tâcha de se placer dans l'entourage des grands. Interprète du duc de Mayenne en Espagne (1613), précepteur des enfants du prince de Carignan, gentilhomme de la maison du roi et chambellan de Gaston d'Orléans, il semble avoir bien réussi.

VAUGELAS, Claude Favre, baron de Pérouges, seigneur de (1585-1650). Traducteur et surtout grammairien, Vaugelas représente le type originel du législateur de la langue. Son rôle au xvnc siècle, à un moment où se fixe et se codifie le français moderne, est, à ce titre, essentiel. A travers ses Remarques sur la langue française, utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire, en effet, c’est toute une ligne d’action à l’égard des questions linguistiques et, plus largement, culturelles qui est en jeu. C’est pourquoi on ne peut réduire son apport à celui d’un grammairien érudit et cantonné dans un domaine étroit d’études; au contraire, ses travaux permettent de saisir un lien constant entre les problèmes linguistiques et les questions esthétiques et sociales.

 

Une carrière médiocre

Le père de Vaugelas était magistrat, «juge mage», en Bresse, où Claude Favre vit le jour à Meximieux.

« Cette famille de robe avait depuis peu accédé à la noblesse.

Le père était un lettré, poète à ses heures.

Il se chargea de diriger lui-même l'instruction de son fils.

Il appartenait, d'autre part, au cercle des amis de François de Sales, disposant là d'un important réseau de relations, en même temps qu'il affirmait avec l'Académie flori­ montane [voir SALES François de] une piété, laïque mais solide, dont son fils semble avoir hérité.

Ce dernier entreprit une carrière moins provinciale.

Entré au service de la maison de Savoie, du duc de Nemours Genevois -cousin du duc de Savoie régnant -.

ses emplois de secrétaire le firent voyager vers Turin, puis vers Paris.

Il se fixa dans la capitale et, mettant à profit les recommandations dont il disposait, tâcha de se placer dans l'entourage des grands.

Interprète du duc de Mayenne en Espagne (1613).

précepteur des enfants du prince de Carignan, gentilhomme de la maison du roi et chambellan de Gaston d'Orléans, il semble avoir bien réussi.

Mais il était toujours en quête de subsides et vécut assez gêné.

Un temps il porta la soutane (bien qu'il n'eût reçu que les ordres mineurs).

pour pouvoir prétendre aux bénéfices ecclt!siastiques.

Puis il espéra un beau mariage ainsi que de hannes pensions (celle de son emploi de chambellan lui était mal payée); François de Sales lui en fit obtenir une au titre des services rendus par son père dans une mission diplomatique.

Reste que le portrait du personnage social de Vaugelas tel que le dressait Tallemant est marqué par le manque d'aise -autant que par le manque d'aisance, d'ailleurs, une incurable naïveté caractérisant tous ses actes.

Il était pourtant bien vu et bien reçu dans le monde des salons et de la littérature.

Il était considéré comme un disciple du cardinal Du Perron, de Coëffeteau et de Malherbe.

Il put se poser en égal des écrivains de la génération qui vint au premier plan dans les années 1630 : Chapelain, Balzac, Perrot d'Ablancourt ...

A l'Hô­ tel de Rambouillet, sans J'apprécier autant que Voiture, on le tenait en estime [voir RA�1BOUILLET (Hôtel de)].

Dans le monde proprement littéraire, en dépit d'une œuvre assez mince (une traduction des Sermons de Cris­ tobal de Fonsecas en 1613, une autre de Quinte-Curee, à laquelle il travailla jusqu'à sa mort et ses Remarques en 1647), il jouis�ait d'une certaine autorité, et il fut parmi les premiers académiciens (décembre 1634).

Vaugelas traducteur La part directement littéraire de son œuvre relève donc exclusivement de la traduction, genre alors en vogue.

Il e plaçait dans la lignée d'Amyot et Coëffeteau et, au nom de l'enseignement reçu de Du Perron et de Malherbe, se posait en héritier et en mainteneur de la traduction puriste.

Dans ses travaux, l'influence huma­ niste se prolonge.

Tant dans sa version de l'Espagnol Fonsecas que dans sa traduction de la Vie d'Alexandre de Quinte-Curee, il travaille avant toul en grammairien.

Il se fait le défenseur d'une traduction minutieusement fidèle, dans une langue moderne très épurée.

De la sorte.

il se trouve à l'opposé des tenants des « belles infidèles >> alors en vogue l voir TRADUCTION].

Il va même jusqu'à se montrer critique à l'égard de Perrot d'Ablancourt, Je traducteur le plus admiré, qui donne, concernant 1 'histoire d'Alexandre le Grand, une version d'Arrien concurrente de celle de Quinte-Curee.

Leurs divergences, assez minimes quant au fond, portent sur des points précis de langue et de Style.

D" Ablancourt est plus élégant, Vaugelas se veut plus rigoureux, raffinant sur 1 'exactitude grammaticale.

Il s'en tient, comme son ami Faret, à la tradition malherbienne en ce qu'elle a de plus strict.

Les Remarques et l'instauration d'une norme linguistique Dès sa fondation, l'Académie française reçut mission d'élaborer un dictionnaire et une grammaire.

Bien qu'il s'agît d'un travail collectif, une certaine division des tâches s'imposa.

Vaugelas se vit chargé du dossier, mais, rebuté par la lenteur du travail collectif et désireux de faire valoir ses propres recherches, il publia séparément ses Remarques, tirées de ses notes préparatoires.

L'ou­ vrage fut bien accueilli; au cours du xv11• siècle, il connut cinq rééditions -augmentées, à partir de 1657, des « Observations >> de Patru.

Cette première grammaire du français classique pré­ sente un caractère paradoxal.

Elle ne procède pas d'une démarche systématique, mais progresse de façon prag­ matique.

au fil des observations des difficultés indiquées par les hésitations de J'usage; mais ces observations sont toujours normatives.

Le critère fondamental, en effet, n'est pas J'usage dans sa diversité, mais bien le «bon» usage, dont la validité repose sur une discrimination sociale.

Le bon usage, c'est avant tout celui de la> de la nation, qui se trouve essentiellement à la Cour, et, de façon moindre, à la Ville (c'est-à-dire à Paris).

La norme est donc le parler de la noblesse parisienne : Je peuple et les provinciaux sont exclus et condamnés à s'aligner sur le modèle ainsi défini.

Si la Ville el la Cour ne sont pas en accord sur un point de vocabulaire ou de prononcia­ tion, la préférence va à la Cour.

Restent des cas où les difficultés ne peuvent être réso­ lues par la référence à un milieu somme toute peu savant.

Un nouvel ordre de références intervient alors : les bons auteurs.

Et si la difficulté est trop rebelle, i 1 faut, en dernière instance, faire appel aux >, aux érudits.

La démarche de Vaugelas donne la priorité à la langue qui se parle; les spécialistes de l'écrit (les «bons auteurs » et les « savants ») n ·interviennent qu'en second lieu.

Elle aboutit de la sorte à établir comme norme la langue des «honnêtes gens», et il est remarquable que le grammairien se situe, y compris dans ses relations personnelles, dans Je même milieu que Faret, comme lui continuateur de Malherbe, et auteur de l'Honnête Homme ou l'Art de plaire à la Cour (1630).

Il est remar­ quable aussi que le travail de Vaugelas ait été prolongé et revu par Patru, qui passa de son vivant pour le modèle de l'honnête homme, qui ne fut guère ami de Vaugelas et se montra critique à son égard, mais se situait comme lui dans la lignée de 1' « honnêteté >> et du modernisme (voir HONNÊTE HOMME).

Car, et c·est un point important, l'entreprise des Remarques est résolument moderne.

Vaugelas condamne les archaïsmes et les tours vieillis.

tant dans Je vocabu­ laire et dans la prononciation que dans les constructions syntaxiques.

De là résultent deux conséquences considé­ rables.

D'une part, la classe dominante impose une norme linguistique qui sert ses intérêts politiques et sociaux : l'unification linguistique du pays contribue à son unification politique, -cela a été dit maintes fois, mais il n'est pas inutile de le rappeler.

Depuis Malherbe, il était usuel de se gausser des provincialismes parmi les écrivains, et les ridicules des Gascons, tant de vocabu­ laire que de prononciation, étaient constamment évo­ qués.

D'autre part, il s'instaure une habitude de considé­ rer que les termes « bas » (triviaux) mais aussi les mots techniques n'ont pas droit de cité chez les «honnêtes gens» et moins encore dans la littérature.

Les implica­ tions esthétiques sont évidentes : limitation du lexique et limitation des sujets vont de pair.

Les Remarques par­ ticipent du même mouvement que le souci des « bienséances >>.. »

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