Victor Hugo, Les Misérables, 1862, 1ère partie, Livre 7ème, Chapitre 3 : Une tempête sous un crâne de « Il se demanda donc où il en était... » / « Pour la 1ère fois depuis 8 années » à «...c'était en sortir en réalité.»)
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« sa véritable identité et en laissant accuser à sa place Champmathieu. Mais cette décision ne lui procure pas la joie attendue. L'ancien forçat se trouve dans l'obligation de continuer à se sonder comme l'exprime la conjonction de coordination à valeur de conséquence « donc ». « Il se demanda donc où il en était » (ligne. 1) . L'expression « où il en était » signale, quant à elle, le nécessaire « état des lieux » auquel doit se livrer Jean Valjean. Le choix de la focalisation interne , amorcée par les verbes utilisés par le narrateur, nous permet donc d'épouser le point de vue du personnage qui poursuit son introspection : « Il s’interrogea sur cette « résolution prise ». Il se confessa à lui-même que tout ce qu’il venait d’arranger dans son esprit était monstrueux, que « laisser aller les choses, laisser faire le bon Dieu », c’était tout simplement horrible » ( ligne 3) Ces verbes : (« se demander » ( l. 1), « s'interroger » (l.1), « se confesser » (l. 1) sont soumis à une gradation. Chacun d'eux signale un degré supplémentaire d'approfondissement dans l'auto-analyse engagée. « Se demander », terme un peu vague, conserve une certaine neutralité, alors que « s'interroger » accentue l'effort de discernement, donne à l'entreprise un cadre plus formel. L'emploi du verbe « se confesser » rend compte de la dimension religieuse de la réflexion dont l'issue a une portée hautement morale : faire le choix du Bien ou du Mal. C'est bien d'un homme seul face à sa conscience, seul face à Dieu dont nous parle ici le narrateur. Il s'agit dans les trois cas de verbes pronominaux qui montrent l'activité réflexive entreprise par le maire de Montreuil, activité réflexive renforcée, pour le dernier, par le COI« à lui-même » (l. 2). Le fait de mettre entre guillemets l'expression « la résolution prise », montre la mise à distance de cette décision . Cela est d'ailleurs confirmé par la périphrase « tout ce qu'il venait d 'arranger dans son esprit » (l.2) le verbe « arranger » rendant compte du « bricolage » moral orchestré par l'ancien forçat. De plus, Jean Valjean fustige durement cette première résolution en recourant à des adjectifs dévalorisants tels « monstrueux », « horrible ». Le protagoniste questionne d'autres formules, exprimées par lui en pensée : « laisser aller les choses, laisser faire le bon Dieu » (l.3) et s'indigne de la passivité qui allait être la sienne. Cette passivité est rendue par la périphrase verbale « laisser +infinitif » où le semi-auxiliaire dit l'absence de volonté exercée par le sujet. La passivité est ici synonyme de lâcheté et de manquement grave à la morale « dernier degré de l'indignité hypocrite, « crime ». Les lignes suivantes prennent la forme d'un monologue intérieur qui précipite le lecteur au sein de la conscience torturée de l'ancien bagnard. « Laisser s’accomplir cette méprise de la destinée et des hommes, ne pas l’empêcher, s’y prêter par son silence, ne rien faire enfin, c’était faire tout ! c’était le dernier degré de l’indignité hypocrite ! c’était un crime bas, lâche, sournois, abject, hideux ! » (l. 6)Le narrateur s'efface pour laisser place aux seules pensées de son »
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