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Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez montrer, par exemple, comment se mêlent, comme des motifs musicaux, l'appel du départ et l'attachement de la terre. Mais cette indication n'est pas contraignante : vous avez toute liberté d'orienter autrement votre lecture.

Publié le 30/03/2011

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Le héros est né et a passé son enfance en Rhénanie (Allemagne). C'est un musicien doué et précoce. Mais il se sent incompris dans son pays, il étouffe et aspire à une vie plus libre — la France et Paris l'attirent. Au moment de franchir la frontière, il s'arrête hésitant.    Il lui semblait qu'il avait déjà vu cela : ces deux arbres, cet étang... — Et brusquement, il eut une de ces minutes de vertige, qui s'ouvrent de loin en loin dans la plaine de la vie. Une trouée dans le Temps. On ne sait plus où on est, qui on est, dans quel siècle l'on vit, depuis combien de siècles on est ainsi. Christophe avait le sentiment que cela avait déjà été, que ce qui était maintenant n'était pas maintenant, mais dans un autre temps. Il n'était plus lui-même. Il se voyait du dehors, de très loin, comme un autre qui déjà s'était tenu debout, ici, à cette place. Il entendait une ruche de souvenirs inconnus ; ses artères bruissaient :    « Ainsi... Ainsi... Ainsi... «    Le grondement des siècles...    Bien d'autres Krafft (!) avant lui avaient subi les épreuves qu'il subissait aujourd'hui, et goûté la détresse de cette dernière heure sur la terre natale. Race toujours errante, et de partout bannie par son indépendance et son inquiétude. Race toujours en proie à un démon intérieur, qui ne lui permettait de se fixer nulle part. Race attachée pourtant au sol d'où on l'arrachait, et ne pouvant s'en déprendre...    Christophe repassait à son tour par les mêmes étapes ; et ses pas retrouvaient sur le chemin les traces de ceux qui l'avaient précédé. II regardait, les yeux pleins de larmes, se perdre dans la brume la terre de la patrie, à laquelle il fallait dire adieu... N'avait-il pas désiré ardemment la quitter? — Oui ; mais à présent qu'il la quittait vraiment, il se sentait étreint d'angoisse. II n'y a qu'un cœur de bête qui puisse se séparer sans émotion de la terre maternelle. Heureux ou malheureux, on a vécu ensemble ; elle a été la compagne et la mère : on a dormi en elle, on a dormi sur elle, on en est imprégné ; elle garde dans son sein le trésor de nos rêves, de notre vie passée, et la poussière sacrée de ceux que nous avons aimés. Christophe revoyait la suite de ses jours et les chères images qu'il laissait sur cette terre, ou dessous. Ses souffrances ne lui étaient pas moins chères que ses joies.    Romain Rolland, Jean-Christophe, 1904-1912.    Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez montrer, par exemple, comment se mêlent, comme des motifs musicaux, l'appel du départ et l'attachement de la terre. Mais cette indication n'est pas contraignante : vous avez toute liberté d'orienter autrement votre lecture.

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