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La Brière

Publié le 29/03/2013

Extrait du document

Alphonse de Brédenbec de Châteaubriant obtient en 1911 le prix Goncourt pour son roman Monsieur des Lourdines. En 1923, il reçoit une nouvelle récompense, le grand prix de l'Académie française, pour La Brière.

« EXTRAITS Admirateur du national-so ciali sme et collaborateur convaincu pendant la Seconde Guerre mondiale, Châteaubriant doit fuir la France à la Libération.

li meurt en exil, en Autriche , le 2 mai 1951.

« A longs coups vigoureux, Aoustin repoussait les fonds tendres de la vase.

» Portrait d' Aoustin la réputation d' Aoustin n'embaumait guère.

Il était redouté; il n'avait point d'amis ; on lui souhaitait dans son jardin plus de chardon que de boursette.

Mais une espèce de confïance s'attachait à ses entre­ prises.

Dans une affaire comme la présente , il était l'homme nécessaire, celui qui n'est pas bonne bête, qui s'y connaît à doubler son fil, qui ne laisse pas les lentilles se former dans son chaland.

Ce grand despote à l' œil de percette ne parlait que pour prédire ; mais ses prévisions se réalisaient toujours, c'était un fouil­ leur , un estudeur ; avec une volonté qui ramassait tout devant elle, comme les piraudiers quand ils raflent les troupeaux.

Paysage au petit matin C'était un matin de léger brouillard duvetant les contours des prairies , de fine brise retroussant la feuille d'argent des saules , de petits foyers de soleil couvant dans le sein pro­ fond des tourbières ; et le chaland filait.

l'île s'éloignait derrière , avec ses mêlées d'arbres, la pierraille de ses levées et ses bouill ées de saules.

Il glissai t au large, s'avançait dans la coulée, entre les deux longues rides qu'y traçait son nez pointu ; pmfois, dans un froissement de feuillages , il ralentissait , ou bienfaisait plonger quelque gros jonc solitaire, qui der­ rière lui se relevait lentement.

A longs coups vigoureux, Aoustin repoussait les fonds tendres de la vase.

Sa perche vo­ lait dans ses mains.

C'était(.

..

) la première fois qu'il partait du chef de l'île.

(.

.

.) Aoustin enlève Jeanin le lit faisait face à la porte, dans le fond, sur la droite.

Del' homme on ne voyait que la tête, sous le bras replié.

Exactement la pose qu'il avait dans son bateau, la nuit des oiseaux bleus.

là encore, Aoustin ne s'était jamais imaginé qu'il le trouverait autrement couché.

les choses se réalisaient de point en point .

Penché sur le chevet , il retenait sa respira­ tion , écoutait celle de l'autre, montrait le demi-rire qui lui remontait de la grandeur de sa joie diabolique ...

l 'homme remua, réveillé par cette lumière qui lui tombait sur le visage, ouvrit ses yeux, et, dans le creux de son mate­ las, demeura terrorisé, sous la vision de ce spectre à la poitrine de feu , de ses dents prêtes à mordre, de ce regard flamboyant qui le dévorait de tout près .

- Motus à ta gorge! lui siffla Aoustin, ou je te fais sauter le faus­ set de ta barrique! ...

Tu n'es qu 'un bouquet dans la main de lucifer! ...

En même temps, il le menaçait de son mortas ; pen­ dant que l'autre s'aplatissait d'épouvante, perdait son esprit de cette main suspendue sur sa tête, cette main noire, effroyable, qui n'était ni de chair nid' os.

- Habille-toi ! ...

tu marcheras devant moi ! ...

où je te conduirai ! ...

Et motus à ta gorge! le gars, les yeux fous, regardait sa dernière heure.

Éditions Famot, 1980 « -Motus à ta gorge ! lui siffia Aoustin, ou je te fais sauter le fausset de ta barrique !.

..

Tu n'es qu'un bouquet dans la main de Lucifer! ...

» NOTES DE L'ÉDITEUR Châteaubriant, L.

A.

Maugendre, Éd.

André Bonne, 1977.

drame collectif, expriment l'antique pays, lui positivement par fidélité, elle négativement par révolte; et l'homme qu'elle aime et qu 'Aoustin repousse, c'est Dans ses Cahiers, Châteaubriant donne ses impressions sur La Brière : «Je suis tout tremblant , à la fois plein d'enthousiasme et de crainte.

J'ai le sentiment, presque l'angoisse , qu ' un monde est là sous ma main, qu'il m 'est offert, que je n'ai plus qu'à le prendre.( ...

) Si je suis assez fort pour le soulever, il est à moi et je le donne à tous, sinon personne d'autre que moi ne le soulèvera.

C'est un monde perdu, anéanti.

» Cité dans Alphonse de « Et il [Châteaubriant] vivait plusieurs mois par année chez les Briérons, rêvant la Brière avec une lourde et féconde lenteur.

Cette étrange contrée de tourbières à l 'indépendance sauvage , il a réussi à 1 'introduire dans notre mémoire moins par la peinture des paysages qu'en l'incarnant dans des figures humaines qui se détachent violemment.

Celles du garde-chasse Aoustin et de sa fille , au premier plan d'un 1 Roge r-Violl et 2, 3.

4 aqua re lles de Sylvain Hairy.

Grasse t, 1960 /archives Sipa-lcono ! 'Étranger haï de toute leur barbare petite patrie.

Or ce sens allégorique ne nuit ni à l'intensité des personnages ni à la force des épisodes.

Maintes pages sentent le feu et le sang.

L'auteur a néanmoins voulu que la pitié et le pardon eussent le dernier mot, et ce n'est pas invraisemblable ...

» Henri Clouard, Hi stoire de la littérature fi'ançaise, Albin Michel, 1949.

CHÂTEAUBR IAN T 02. »

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