GORKY: ENFANCE
Publié le 30/03/2013
Extrait du document
Gorki narre ses premières années douloureuses dans la Russie rurale et pauvre de la fin du xixe siècle : son père est mort, sa mère va mourir, il est élevé par ses grands-parents.
«
« L'oncle lakov, tout
ébouriffé , entrait dans
la cuisine avec sa
guitare.
»
EXTRAITS ----- - --
L'inoubliable figure de la grand-mère
Quand ma grand-mère souriait, ses pru
nelles sombres comme des cerises se dila
taient, brillant d'une lueur indiciblement
agréable.
Son sourire découvrait
des dents blanches et saines
et,
bien que la peau
sombre de ses joues fût
couverte de rides, son
visage
était jeune et
radieux.
Ce qui la
~~ défigurait, c'était
< • ce ne z poreux
aux narines gon
flées , rouge à son
extrémité.
Ell e
prisait du tabac
qu 'elle prenait
dans une taba
tière noire incrus
tée d'argent .
Toute
sa personne était
sombre, mais ses
yeux brillaient d 'une
lumière intérieure
chaude et gaie.
Elle
était voûtée, presque
bossue, et très corpu
lente ; pourtant , elle se
déplaçait ave c aisance et lé
.
gèreté, comme une grosse chatte,
dont elle avait aussi la dou ce ur caressante.
Avant de la connaître, j'avais comme som
meillé dans les ténèbres ; mais elle parut ,
me réveilla et me guida vers la lumière.
Le credo de la culture
Il se mettait alors à me faire la leço n :
«No us ne sommes pas des seigneurs.
Il n'y
a personne pour nous instruire.
Nous de
vons tout comprendre par nous-mêmes .
Pour les autres , il y a des livres et des
écoles, mais, pour nous, rien n'a été fait.
Il
faut tout saisir soi-même ...
»
Et il restait pensif , immobile comme une
statue, muet et presque sinistre.
Le peintre du peuple russe
Plus tard,j' ai compris que les Russes, dont
la vie est morne et misérable, trouvent dans
leurs chagrins une distraction .
Comme des
enfants, ils
jouent avec leurs malheurs dont
ils n'éprouvent aucune hont e.
Dans la monotoni e de la vie quotidienne , le
malh eur lui-mêm e est une fê te et l'in cen die
un divertissement.
Sur un visa ge insigni
fiant, même une égratignure semble un
ornement.
Un destin cruel
Je restai très longte mps immobile près du
lit , la tasse
à la main , regardant le visage
qui se
fig eait et devenait gris.
Lorsque grand-père entra,
je lui dis :
- Elle est morte ,
ma mère.
Il
jeta un cou p d' œil vers le lit :
-
Qu 'es t-ce que tu racontes ? (.
.
.)
Quelque s jours apr ès
l'enterrement,
grand
père me dit:
-Eh bien, Alexis, tu
n'es pas une mé
daille, tu ne peux
pas rester toujours
pendu à mon cou,
va
don c g agner
ton pain ...
Et je partis gagner
mon pain.
Traduct ion de
Hubert Juin
Gallimard, 1976
« -Eh bien, raconte moi ce qui te plaît le plus dans !'Histoire sainte.»
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Il appartenait plutôt à cette longue et si
diverse suite d'es prits généreux qui furent
persuadés que la terre est belle et que
l 'Humanité est
bonne .» Dumesnil de
Gramont.
réussi
à se faire inoubliable , une fois au
moins , dans ce livre qui a pour titre :
"Enfance".» Hubert Juin, préface du livre,
Gallimard, 1976.
Et Serge Persky analysant l' «é nigmatique
Gorki » : « Les années de son enfance
restaient impénétrable s et comme
ensevelies dans une brume mystérieu se et
troublante .
Souvent , cependant, les
admirateurs, les amis avaient supplié )'écrivain
.( ...
) Ils voulaient savoir par
quelle série d
'épreuve s cette âme était
passée , comment s'était formé cet
autodidacte génial,
à la fois tendre et
violent, doux et révolté.
» Cité par Louis
Guilloux.
« Ce qui demeure du prîsonnier de la gloire,
ce n'est pas l'action politique , ce n'est pas
la théorie littéraire ,
c'est une voix qui a
J Harlingu e-Violl et 2 , 3.
4 , 5 d ess ins de Jac que s Pecnard, Calmann-Lé vy / B .N .
« Aucun écrivain russe n'es t plus russe que
Maxime Gorki.
» André Gide.
GORK I 02.
»
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