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Jules Laforgue (« Méditation grisâtre », Poèmes posthumes divers.)

Publié le 24/02/2011

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laforgue

Sous le ciel pluvieux noyé de brumes sales,  Devant l'Océan blême, assis sur un îlot,  Seul, loin de tout, je songe au clapotis du flot,  Dans le concert hurlant des mourantes rafales.    Crinière échevelée ainsi que des cavales,  Les vagues se tordant arrivent au galop  Et croulent à mes pieds avec de longs sanglots  Qu'emporte la tourmente aux haleines brutales.    Partout le grand ciel gris, le brouillard et la mer,  Rien que l'affolement des vents balayant l'air.    Plus d'heures, plus d'humains, et solitaire, morne,    Je reste là, perdu dans l'horizon lointain  Et songe que l'Espace est sans borne, sans borne,  Et que le Temps n'aura jamais... jamais de fin.        

Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez, par exemple, montrer comment le spectacle de la nature concourt à l'expression de la solitude et de l'angoisse.

laforgue

« - Tout concourt ainsi à faire de ce paysage un spectacle « blême » (v.

2), où le « gris » (v.

9) prédomine, comme lelaissait préfigurer, en guise de titre, le choix de l'adjectif « grisâtre » à connotation péjorative. 3.

L'eau : elle prend ici trois aspects différents. - Elle est d'abord « mer » (v.

9), « Océan » (v.

2) dont l'immensité, la majesté et la fureur suggèrent une majusculeau poète, « flot » (v.

3) et surtout « vagues » (v.

6).

- On note d'ailleurs une progression du premier au deuxième quatrain : du « clapotis » initial (v.

3), la mer prendl'aspect de véritables déferlantes qui viennent se fracasser au rivage en une agonie tumultueuse. - L'eau est aussi pluie, qui « noye » (v.

1) le paysage. - La pluie forme matériellement un lien entre ciel et mer : elle confère ainsi au tableau une unité d'atmosphère. - Elle est enfin larmes, « sanglot » (v.

7) et achève de faire de ce spectacle naturel une évocation funèbre.

Il y acorrespondance entre les larmes des vagues et celles du poète. - Le participe « noyé » en position à la fois initiale dans le sonnet et centrale dans le vers, l'adjectif « blême » (v.

2)et les « mourantes rafales » (v.

4) annoncent déjà ce motif de la mort qu'on retrouvera plus loin. B.

Le bruit et la fureur 1.

Une discordance sonore - Si le vent fait entendre son « concert », celui-ci est « hurlant » (v.

4). - On note également la diérèse de l'adjectif « pluvieux » (v.

1) qui, en écho aux [i] de « ciel » et de « noyé »,contribue à créer des stridences à l'intérieur même du poème. - Il en va de même pour les consonnes liquides [r] et [1] des vers 4 et 9. 2.

Un grand désordre - Beaucoup de mouvements dans ce sonnet, mais sans grande cohérence. - La mer, on l'a vu, est tour à tour clapotis et rafales.

Les vagues « se tordent » (v.

6), « arrivent » comme au «galop » (v.

6), « croulent » (v.

7) ; la tourmente les « emporte » (v.

8), « balaye » l'air environnant (v.

10). - On ne s'étonnera donc pas de l'importance des verbes d'action — et particulièrement des participes présents (v.

6et 10) — qui connotent tous la vitesse et la brutalité. C.

La comparaison animale 1.

La folie des éléments déchaînés - Dans ce chaos démesuré des éléments, c'est la raison même qui fait défaut. - Il n'est évidemment pas innocent que le deuxième quatrain propose, grâce à la locution « ainsi que » (v.

5), unecomparaison animalière. - La nature, en effet, se fait bestiale, les vagues deviennent des « cavales » folles, lancées dans un « galop »suicidaire (v.

6).

On note d'ailleurs que ces dernières sont caractérisées par leurs seules « haleines » (v.

8) et «crinière échevelée » (v.

4), qui marquent avant tout la sauvagerie. - De fait, plus rien d'humain ni de raisonnable dans ce tableau. - L'adjectif « échevelé » (v.

5), repris par le substantif « affolement » au vers 10, accroît l'impression générale defolie. 2.

L'agonie - La comparaison sert également à faire écho au thème de la mort que nous avons mentionné plus haut et pourlequel, dès le premier quatrain, le poète a semé des indices (« noyé », « blême », « mourantes »). - Tout concourt à suggérer l'agonie douloureuse et précipitée de la nature : les vagues « se tordent » (v.

6) aurythme de la plainte endeuillée de « longs sanglots » (v.

7).. »

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