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CHARDONNE Jacques : Fiche de lecture

Publié le 20/11/2018

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CHARDONNE Jacques, pseudonyme de Jacques Boutelleau (1884-1968). La Charente est à Chardonne ce que les Landes sont à Mauriac : l’inoubliable horizon de l’enfance, un univers à la fois mystérieux et familier. Son Barbezieux natal n’est assurément pas un paradis, on y souffre toujours des « maux éternels »; du moins l’écrivain y trouve-t-il des traditions, un art de vivre, une sérénité laborieuse dont toute son œuvre cherche à révéler le secret : le « bonheur de Barbezieux ».
 
L'art du désengagement
 
Né à Barbezieux dans une famille bourgeoise, ami d’enfance d’Henri Fauconnier, Jacques Boutelleau est élevé chez ses parents. Lorsqu’il a quatorze ans, ceux-ci l’envoient au collège de Barbezieux. Après ses études secondaires, déclinant une place dans la société vinicole familiale, il monte à Paris : École des sciences politiques, faculté de droit. Pendant son service militaire, il est atteint d’une tuberculose qu’il soigne en Tunisie, puis à Chardonne (1907), petit bourg suisse près de Vevey, qui lui inspirera son nom de plume : commence alors une vie réglée de malade, qui se prolongera au-delà de la guérison. En 1909, répondant à « un besoin de claustration, de ligne droite et d’un grand calme », Chardonne se marie (divorce en 1934; remariage avec Camille Belguise,
 
1935). Son entrée aux éditions Stock, dont il devient le codirecteur avec Maurice Delamain, resserre ses liens avec ses grands contemporains, Mauriac, Paul Géraldy, et il se lance lui-même dans le roman : chaleureusement accueilli, l'Épithalame (1921), écrit en Suisse pendant la guerre de 1914-1918, traite d’emblée un sujet auquel l’écrivain restera fidèle : « l’intimité, l’amour dans la vie à deux ». Après un silence de six ans, le Chant du bienheureux (1927) inaugure une période d’intense production romanesque : les Varais (1929); Éva ou le Journal interrompu (1930); Claire (1931), qui obtient le grand prix de l’Académie française; les Destinées sentimentales (1934); Romanesques (1937). Il publie aussi des essais et un début d’autobiographie : L'amour c'est beaucoup plus que l'amour (\\931), Attachements (1942); le Bonheur de Barbezieux (1938).
 
Survient la Seconde Guerre mondiale. Deux voyages en Allemagne, des écrits imprudents, lui seront reprochés à la Libération. Mi-essai, mi-roman, Chimériques (1948) reflète son désenchantement. Après Vivre à Madère (1952), sa veine romanesque se tarit; l’écrivain explore des voies nouvelles : Lettres à Roger Nimier (1954), fiction épistolaire; Matinales (1956), le Ciel dans la fenêtre (1959), Demi-Jour (1964), Propos comme ça (1966). Ses Œuvres complètes sont publiées par Albin Michel à partir de 1951. Toutefois, sa correspondance avec Paul Morand ne pourra pas être connue du public avant l’an 2000. Après plusieurs pèlerinages à un méconnaissable Barbezieux, l’écrivain se fixe définitivement sur les bords de la Seine, dans sa propriété de La Frette, acquise en 1925, et où il meurt en 1968.


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« des maximes figent en formules impersonnelles les dures leçons de l'expérience : « L'amour nous perd toujours.

Malheureux, il nous dévaste; satisfait, il nous dépossède davamage.

On ne sait plus voir ni rien goûter seul >> (le Chant du bienheureux).

Les romans de Chardonne plaident tous pour une reconquête de l'amour sur la pas­ sion, ainsi le fameux « l'amour c'est beaucoup plus que J'amour», titre d'un essai, formule souvent répétée et commentée par l'auteur, doit-il s'entendre comme l'apo­ logie d'un sentiment paisible(« une joie dans les yeux que l'on discerne à peine >>), où acceptation de l'autre et durée conduisent à une vie « étroite et abritée qui res­ semble à l'ennui» (Claire).

Avocat du mariage bour­ geois et provincial, Chardonne voudrait que l'union soit de convenance plus que de choix; fondée sur la passion, l'institution perd sa stabilité :« Dès que tu ne m'aimeras plus, j'aurai tort» (Destinées sentimentales).

Il ferait même volontiers l'économie du bonheur, excès qui attire son contraire et finit par menacer l'ordre social : tel per­ sonnage voudrait cacher sa félicité conjugale (ibid.).

Mais sous cette sage prudence, peut-être faut-il voir une sensibilité trop fragile pour les émotions fortes.

La leçon à tirer de cette œuvre est sans doute qu'à l'inévita­ ble solitude des êtres le mariage apporte le meilleur remède que nous ait transmis la tradition : apprentissage d'une habitude.

creusement inlassable du lit d'un fleuve (cf.

Épithalame) canalisant la vie, il vaut mieux, malgré ses désillusions possibles (les Varois).

que l'éphémère fusion romant•que.

Rien de moins stendhalien que l'amour à la Chardonne : élaboré lentement.

comme les essences précieuses, il n'est pas « de cristallisation mais de distillation >• (Attachements).

Un attachement plutôt qu'une passion Cette œuvre répétitive (un roman, c'est toujours un amour et un mariage) présente une remarquable cohé­ rence : du paradigme « barbezélien » irradient une théo­ rie de l'écriture et un art de vivre.

Si une certaine mono­ tonie parfois s'en dégage, c'est que la vie finit par s'y réduire au minœ filet de la résignation (cf.. »

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