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Haïlé Sélassié Ier

Publié le 07/04/2019

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Haïlé Sélassié Ier (Ras Tafari Makonnen, couronné sous le nom de)

 

Empereur d'Ethiopie * 23.7.1892, Edjersso, Province d'Harar + 27.8.1975, Addis Abeba

 

Régent sous le règne de l'impératrice Zaouditou, le prince Ras Tafari prend le pouvoir en 1928 et s'arroge le titre de négus (roi). A la mort de Zaouditou, en 1930, il devient empereur sous le nom de Haïlé Sélassié (qui signifie approximativement \"Pouvoir de la Trinité\"). Il met en oeuvre des réformes qui visent à rapprocher le pays des démocraties occidentales : il obtient l'entrée de l'Ethiopie dans la Société des Nations (1923), abolit l'esclavage (1924) et promulgue une constitution (1931). Après la conquête de l'Ethiopie par l'Italie, en 1935, il s'exile à Londres jusqu'en 1941, date à laquelle il réussit à libérer son pays avec l'aide des forces britanniques et à remonter sur le trône. Hailé Sélassié joue un rôle déterminant au sein des pays non alignés, ainsi que dans la création de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) en 1963. Sur le plan intérieur, il entreprend une modernisation administrative. Dans les années 60, il doit réprimer plusieurs putschs militaires qui tentent de renverser son régime autocratique taxé d'immobilisme. La dégradation croissante du pays, la lutte contre le Front de libération de l'Erythrée (annexée \"de jure\" par l'Ethiopie en 1962) et les grandes famines de 1974 conduisent à sa destitution par une junte militaire en septembre 1974. Haïlé Sélassié est arrêté par les militaires conduits par Mengistu Haïlé Mariam. Les conditions de sa mort sont mal connues.

« Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)Hailé Sélassié IerFrêle figure.

Impressionnante.

Comment ne pas songer à la silhouette grave et menue, montée, reproche vivant, à la tribune de la Société des Nations .

Bien trop maître de ses gestes et de son visage, malgré l'humiliation subie, pour susciter la pitié.

Posant sur un public mal à l'aise un regard sévère et lucide.

Exilé, mais plus que jamais homme d'État, incarnation obstinée de son pays, dont la défaite exacerbe ladignité.

"Mauvaise conscience du monde", sans doute ; mais déjà et plus encore a posteriori résistant solitaire de la première heure, symbole du refus face aux forces mécanisées du fascisme.

Telle est l'image que le monde a gardée du Négus, Hailé Sélassié Ier, lion vainqueur de la tribu de Juda, élu de Dieu, Roi des rois.

Héritier quasi mythique d'une longue tradition, demeuré plus d'un demi-siècle à la tête duseul empire africain à n'avoir pas subi le joug colonial.

La tradition, Hailé Sélassié lui-même a pris grand soin de l'inscrire dans son sillage ; en soulignant la généalogie d'ailleurs contestable qui relie son règne aux descendants des amours légendaires deSalomon P294 et de la reine de Saba .

Fils du puissant Ras Makonnen lui-même gouverneur du Harrar sous le règne de Ménélik II , le futur empereur, alors Tafari Makonnen, appartient à l'une de ces familles nobles dont les membres éminents peuvent prétendre un jour, à la faveur des intrigues et des rapports de force mouvants qui opposent les grands seigneurs, accéder au trône impérial.

En ce sens, l'ascension de Tafari Makonnen obéit à la tradition.

Elle innove, en revanche, par la méthode : contrairement à ses prédécesseurs et en dépit del'épithète léonine qu'il se plaira d'ajouter à ses titres Tafari n'a pas la manière du lion.

Jusqu'alors, les prétendants au trône ont fait leur chemin à la tête deleurs troupes.

Mais Tafari n'est pas un guerrier.

Non pas qu'il sous-estime l'importance de la lutte armée, besogne qu'il préfère confier à d'autres, maisparce que l'usage qu'il fait des armes s'inscrit dans un dessein politique longuement mûri.

L'Éthiopie "moderne", il est vrai, commence avant lui, avec Ménélik II , à l'audace et à la perspicacité duquel le pays doit son indépendance et sa fragile unité.

Mais son petit-fils et successeur, Ledj Yassou, dans son attirance pour l'Islam, accumule les erreurs, et s'aliène les forces politiques du pays, malgré la bravoure qu'il déploie.

Aux antipodes, Tafari, cousin détesté, profite de l'aveuglement de son rival.

Vraisuccesseur politique de Ménélik, il pèse les forces en présence et analyse froidement les données à sa disposition.

Il sait, par exemple, l'importance de l'Église.

Elle est double : puissant facteur de cohésionfortement ancré dans le passé, canal du pouvoir ; mais aussi, en pleine guerre mondiale, gage du soutien des Alliés en lutte contre l'Empire ottoman.

La vision du jeune Makonnen s'étend bien au-delà desplateaux abyssins.

D'emblée, véritable constante de son règne, il bâtit son autorité en multipliant les points d'appui au-dehors comme au-dedans.

Régent dès 1917, il se fait couronner roi en 1928, puis, à la mort de l'impératrice Zaouditou , deux ans plus tard, Roi des rois sous son nom chrétien d'Hailé Sélassié "Force de La Trinité".

Treize ans d'intrigues patiemment tissées et déjouées avec un sang-froid jamais en défaut, pour rassembler en ses seules mains tous les fils du pouvoir.

Il n'a que trente-huit ans lorsqu'il y parvient : l'avenir, semble-t-il,lui appartient.

Capable, désormais, d'agir avec davantage de liberté, il poursuit plus vigoureusement les réformes entamées sous sa régence.

Il double progressivement les structures féodales de l'empire d'unréseau administratif centralisé ; il proclame l'abolition de l'esclavage ; veille personnellement à la création de nouvelles écoles ; constitue une petite armée de métier solidement équipée, en mesure de faireéchec aux milices relativement archaïques des plus redoutables seigneurs régionaux.

Trop faible, néanmoins, cette armée, pour résister aux forces blindées et aériennes d'une puissance européenne.

Hailé Sélassié le sait mieux que quiconqueet conduit sa politique étrangère en conséquence, avec une prudence qui, dans le différend italo-éthiopien, soulève l'indignation de ses féaux.

C 'est pourtantdans ce domaine de prédilection que l'empereur a les coudées les plus franches.

Car malgré le pouvoir lentement amassé, malgré le respect et la craintequ'il inspire, Hailé Sélassié demeure largement tributaire des forces traditionnelles du pays.

Il ne peut pousser ses réformes vers leurs conséquenceslogiques qu'avec le concours d'une fraction, au moins, de l'aristocratie et du clergé.

Foncer contre vents et marées, frapper de grands coups n'est pas dansson tempérament.

C'est en louvoyant parmi les obstacles, en jouant avec intelligence et ténacité des forces en présence qu'il assure son pouvoir.

Sansdoute cherche-t-il à entourer ce dernier d'une aura sacrée qui le rende inviolable.

Mais l'élu de Dieu sait trop ce qu'il doit à son réalisme quotidien.Méticuleux, Sélassié ne craint pas de s'occuper jusque dans les moindres détails de l'exécution de ses décisions.

Soucieux de son image, il veille,parallèlement, à ne pas exposer sa personne indûment, laissant à ses ministres le poids des échecs subis, pour mieux se retrancher derrière l'énigme de saroyauté.

Mais le charme n'opère qu'à l'intérieur, et c'est du dehors que vient la menace la plus sérieuse.

C ontre la force brutale décidée à se déchaîner, ni la finesseni la modération ne peuvent rien.

C'est l'invasion mussolinienne.

Et cinq ans de cassure.

Le respect que l'empereur force en Europe ne compense pas leprestige perdu en Éthiopie : le Roi des rois a fui.

Sur les hauts plateaux, son exil demeure incompris.

L'homme qui revient en 1941 avec les troupes britanniques doit peu à peu reconstituer son pouvoir et son aura.

Il s'y entend.

Il a pour lui l'appui des A lliéset, fidèles au rendez-vous, les dissensions qui subsistent au-dedans.

Mais si l'empereur n'a pas trop de peine à reprendre son emprise, il n'a plus le mêmeressort.

L'œuvre ébauchée avant la guerre n'est que mollement reprise.

M onarque absolu, Hailé Sélassié s'abstient de toucher aux prérogatives et auxprivilèges des seigneurs.

Comme s'il avait besoin d'eux pour régner.

C omme si l'exercice du pouvoir n'était plus, justement, qu'un exercice sans autre finque de se perpétuer.

Monarque novateur, Hailé Sélassié imprime à sa politique la pesanteur d'une tradition presque immuable.

Cependant, le monde avance plus vite que les desseins du roi.

A lentour, l'Afrique s'ébroue et se cherche, quand l'Éthiopie somnole encore, à l'exception desnouvelles élites, peu nombreuses, mais attentives aux remous de l'extérieur.

Elles comparent, se rebellent, prennent le pouvoir en décembre 1960.

Elles nele gardent que quelques heures.

Impassible, l'empereur regagne sa place.

La répression est implacable, à la mesure de la secousse ressentie.

Comme pour gagner de vitesse le mouvement irréversible qui s'amorce dans son royaume, Hailé Sélassié se tourne vers l'A frique renaissante.

Symboled'une indépendance Millénaire, il joue admirablement de sa stature d'Africain indompté, sans jamais prendre parti ni intervenir dans les affaires d'autrui.Médiateur respecté sur l'ensemble du continent, il y puise, grâce notamment à l'O.U.A., le prestige plus que jamais nécessaire à la pérennité illusoire de sonrègne.

Redressement à la fois remarquable et sans issue : l'empereur demeure immobilisé fasciné, presque par sa propre force, qu'il ne sait à quitransmettre.

V ieillard engagé dans une lutte sans espoir contre le temps, il continue de régner mais gouverne de moins en moins.

Tandis que l'Afriques'attache à sa figure légendaire, le pays et la réalité lui glissent des mains.

Les nouvelles élites n'ont pas désarmé, et, en 1974, l'armée se sent prête àassurer la succession.

Avec la même patience qu'il a mise autrefois à gravir les marches du trône, il se laisse dépouiller un à un des instruments du pouvoir.

Le roi est nu.

Nue également l'Éthiopie, qu'il a tout à la fois incarnée, élevée et étouffée.. »

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