chauvinisme

1   PRÉSENTATION chauvinisme, manifestation d’un patriotisme exacerbé, agressif et exclusif.

Capital pour comprendre l’histoire du nationalisme, le chauvinisme caractérise l’admiration outrée, partiale et exclusive pour son pays.

2   CHAUVIN, LE SOLDAT-PAYSAN Le terme chauvinisme, attesté pour la première fois aux alentours de 1840, serait dérivé du patronyme d’un soldat français, Nicolas Chauvin, probablement originaire de Rochefort. Héroïque volontaire des armées de la République et de l’Empire, couvert de blessures, décoré de la Légion d’honneur, Chauvin se serait fait remarquer de ses compagnons d’armes par sa passion patriotique et son amour de Napoléon I^er. En fait, d’après les recherches entreprises par l’historien Gérard de Puymège, Nicolas Chauvin ne correspond à aucun personnage réel et n’est qu’un « modèle culturel de comportement «.

En définitive, Chauvin renvoie, dès son origine, à un type social caricaturé qui, malgré le rire, ancre le dogme de la foi patriotique.

3   UNE CONCEPTION DU NATIONALISME Personnage de comédie, de vaudeville, le soldat-laboureur tire ses origines de la nostalgie d’une société agricole et des valeurs que représentent et synthétisent à la fois le guerrier et le paysan.

Au xviii^e siècle déjà, les Lumières associent au travail de la terre des vertus de civisme et de patriotisme. L’idéal physiocratique s’enracine dans le rêve d’une société agraire et égalitaire, comme l’expriment Jean-Jacques Rousseau ou François Quesnay dans sa Philosophie rurale (1763). Le succès de la Révolution américaine propage l’idéal du citoyen-propriétaire, repris à son tour par la Révolution française sous la forme de la conscription citoyenne.

Tous les régimes du xix^e siècle cèdent au mirage d’une France de paysans-soldats, petits propriétaires éclairés, unie derrière le représentant de la Nation. Tous les gouvernements favorisent le système de la petite propriété rurale — allié à l’éducation primaire et à la conscription — qui cherche à façonner un Français type. Avec le développement d’une bourgeoisie rurale et militariste, le patriotisme devient la « forme idéale de la propriété « (Marx). La nation se construit en glorifiant le soldat-laboureur, porteur des valeurs d’ordre et de discipline.

L’esprit de 1848 exalte une république des paysans, dans un rejet violent de la corruption urbaine et industrielle. À l’image de Chauvin se superpose celle du « bon Français «, issue de la participation du peuple à l’ensemble national. Cette adulation du soldat-laboureur continue après la défaite de 1870. Avec Maurice Barrès et Charles Maurras, on assiste à une tentative de rationalisation : l’unité morale de la nation tient à l’unité du type social du Français ancré à la terre à laquelle il faut revenir et que le « Maréchal-paysan « Pétain incarne à son tour entre 1940 et 1945.

4   UNE INCARNATION DU RASSEMBLEMENT NATIONAL Le chauvinisme ne se présente pas comme une idéologie dont il n’a ni la cohérence, ni l’articulation théorique. Il repose sur des images plus que sur des idées, et reste au niveau des récits, des symboles, de l’émotionnel.

Son succès en France comme à l’étranger l’a dépouillé de ses traits spécifiques pour ne désigner qu’un nationalisme outrancier et ridicule. Notion plus que concept, bien qu’à destination populaire, il est le fruit des nostalgies d’une élite intellectuelle et urbaine.

Mythe fondateur, censé assurer la cohésion du groupe, le chauvinisme est l’incarnation du rassemblement national, au-delà des antagonismes de classes et de factions, dans l’exaltation de la terre, des valeurs militaires, de la race et de la haine de l’étranger. Toujours présent sous forme dégradée dans les discours économiques et les manifestations sportives, il proclame une réelle xénophobie.

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