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Dachau

Publié le 04/04/2013

Extrait du document

En avril 1945, le camp de Dachau est libéré par les soldats américains qui dénombrent 5 600 Français parmi les prisonniers. Roger Stéphane, qui a participé à la Libération de Paris, est envoyé pour représenter le gouvernement français. Dans « Tout est bien «, publié en 1989, il relate son arrivée dans le camp de concentration nazi et la quête de son ami Jean.

Roger Stéphane découvre le camp de Dachau

 

[…] À la fin d’avril 1945, je fus désigné pour représenter le gouvernement français à la libération du camp de Dachau. Je quittai Paris le 19 avril et traversai les ruines de l’Allemagne. Le 2 mai au soir, je parvins à Dachau. À les en croire, aucun des habitants de la petite ville n’avait entendu parler de l’existence d’un camp de concentration. L’un, pourtant, me suggéra une direction. La suivant, je découvris deux rails parallèles à la route, sans remblai ni installation technique d’aucune sorte, qui évoquaient plus un tortillard de province qu’une ligne de chemin de fer. À environ trois ou quatre kilomètres, de grands wagons à bestiaux semblaient abandonnés. Des cadavres en surgissaient, vêtus d’un pyjama rayé, pied ou tête pendant à l’extérieur. Alentour, d’autres cadavres jalonnaient un sentier assez large ; semblables aux cailloux du Petit Poucet, ils me guidaient vers le camp […]. […] j’entrai. J’ai le souvenir d’allées bien dessinées et bien ratissées, de vastes esplanades bordées de baraquements de bois. Peu de détenus dans la cour. Je me fis indiquer un Français à qui je demandai si Jean était vivant. On me dirigea vers un bloc où il était censé vivre quand je rencontrai Joseph Rovan au cou de qui je sautai […] […] Rovan me conduisit à Jean que je trouvai non seulement indemne, mais fringant — il avait participé un ou deux jours auparavant au pillage d’un magasin SS. […] […] Jean me détailla le camp : je vis un pavillon très propre, ensoleillé, entouré de pelouse, et qui n’était autre, me dit-il, que la chambre à gaz. Un autre pavillon abritait le four crématoire. Mais comme la mortalité du camp était plus grande que la capacité d’incinération des différents fours, des monceaux de cadavres demeuraient entassés dehors. Si squelettiques qu’ils ne puaient point. Je visitai aussi les strafbunker où les punis ne pouvaient se tenir ni debout ni couchés. […] […] J’allai à l’infirmerie saluer, sur leurs grabats, des Français. Je conserverai toute ma vie le souvenir de ces chambrées surpeuplées où des hommes hâves, incroyablement maigres, étendus sur des paillasses superposées, regardaient sans presque plus de réactions ce fringant capitaine aussi inattendu qu’un Américain en Cadillac dans les bas-fonds de Calcutta. […]

 

 

Source : Stéphane (Roger), Tout est bien, Paris, Quai Voltaire, 1989.

 

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