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Déclaration de Léon Blum après la victoire du Front populaire

Publié le 04/04/2013

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blum

 (1936)

Le 6 juin 1936, après la victoire du Front populaire aux élections de mai, Léon Blum est chargé de constituer le nouveau gouvernement. Il prend la parole devant la Chambre. Dans sa déclaration ministérielle, il expose le programme des grandes réformes qu’il entend mener à bien. Elles se placent sous le signe du mot d’ordre qui a commandé à l’élaboration de la plate-forme revendicative et électorale de la gauche unie : « le pain, la paix, la liberté «.

Déclaration de Léon Blum après la victoire du Front populaire (6 juin 1936)

 

Messieurs,

 

 

Le gouvernement se présente devant vous au lendemain d’élections générales où la sentence du suffrage universel, notre juge et notre maître à tous, s’est traduite avec plus de puissance et de clarté qu’à aucun moment de l’histoire républicaine.

 

 

Le peuple français a manifesté sa décision inébranlable de préserver contre toutes les tentatives de la violence ou de la ruse, les libertés démocratiques qui ont été son œuvre et qui demeurent son bien.

 

 

Il a affirmé sa résolution de rechercher dans des voies nouvelles les remèdes à la crise qui l’accable, le soulagement de souffrances et d’angoisses que leur durée rend sans cesse plus cruelles, le retour à une vie active, saine et confiante.

 

 

Enfin, il a proclamé la volonté de paix qui l’anime tout entier.

 

 

La tâche du gouvernement qui se présente devant vous se trouve donc définie dès la première heure de son existence.

 

 

Il n’a pas à chercher sa majorité ou à appeler à lui une majorité. Sa majorité est faite. Sa majorité est celle que le pays a voulue. Il est l’expression de cette majorité rassemblée sous le signe du Front Populaire. Il possède d’avance sa confiance et l’unique problème qui se pose pour lui sera de la mériter et de la conserver.

 

 

Il n’a pas à formuler son programme. Son programme est le programme commun souscrit par tous les partis qui composent la majorité et l’unique problème qui se pose pour lui sera de le résoudre en actes. Ces actes se succèderont à une cadence rapide, car c’est de la convergence de leurs effets que le gouvernement attend le changement moral et matériel réclamé par le pays.

 

 

Dès le début de la semaine prochaine, nous déposerons sur le bureau de la Chambre un ensemble de projets de lois dont nous demanderons aux deux Assemblées d’assurer le vote avant leur séparation.

 

 

Ces projets concernent :

 

 

L’amnistie.

 

 

La semaine de 40 heures.

 

 

Les contrats collectifs.

 

 

Les congés payés.

 

 

Un plan de grands travaux, c’est-à-dire d’outillage économique, d’équipement sanitaire, scientifique, sportif et touristique.

 

 

La nationalisation de la fabrication des armes de guerre.

 

 

L’Office du Blé qui servira d’exemple pour la revalorisation des autres denrées agricoles, comme le vin, la viande et le lait.

 

 

La prolongation de la scolarité.

 

 

Une réforme du statut de la Banque de France, garantissant dans sa gestion, la prépondérance des intérêts nationaux.

 

 

Une première révision des décrets-lois en faveur des catégories les plus sévèrement atteintes des agents des services publics et des services concédés ainsi que des anciens combattants.

 

 

Sitôt ces mesures votées, nous présenterons au Parlement une seconde série de projets visant notamment :

 

 

Le fond national de chômage ;

 

 

L’assurance contre les calamités agricoles ;

 

 

L’aménagement des dettes agricoles ;

 

 

Un régime de retraites garantissant contre la misère les vieux travailleurs des villes et des campagnes.

 

 

À bref délai, nous vous saisirons ensuite d’un large système de simplification et de détente fiscales, soulageant la production et le commerce, ne demandant de nouvelles ressources qu’à la contribution de la richesse acquise, à la répression de la fraude et surtout à la reprise de l’activité générale.

 

 

Tandis que nous nous efforcerons ainsi, en pleine collaboration avec vous, de ranimer l’économie française, de résorber le chômage, d’accroître la masse des revenus consommables, de fournir un peu de bien-être et de sécurité à tous ceux qui créent par leur travail la véritable richesse, nous aurons à gouverner le pays. Nous gouvernerons en républicains. Nous assurerons l’ordre républicain. Nous appliquerons avec une tranquille fermeté les lois de défense républicaine. Nous montrerons que nous entendons animer toutes les administrations et tous les services publics de l’esprit républicain. Si les institutions démocratiques étaient attaquées, nous en assurerions le respect inviolable avec une vigueur proportionnée aux menaces ou aux résistances.

 

 

Le gouvernement ne se méprend ni sur la nature, ni sur la gravité des difficultés qui l’attendent. Pas plus qu’il ne se les dissimule à lui-même, il n’entend les dissimuler au pays. Avant peu de jours, il dressera publiquement un premier bilan de la situation économique et financière tel qu’on peut l’établir au départ de la présente législature. Il sait qu’à un pays comme la France, mûri par un long usage de la liberté politique, on peut parler sans crainte le langage de la vérité et que la franchise des gouvernants rassure, bien loin de l’altérer, la confiance nécessaire de la nation en elle-même. Quant à nous, l’immensité de la tâche qui nous incombe, bien loin de nous décourager, ne fait qu’accroître notre ardeur. […]

 

 

Source : Lefranc (Georges), le Mouvement socialiste sous la Troisième République, Paris, Payot, 1963.

 

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