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Diriger la Résistance

Publié le 17/01/2022

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2 juin 1944 - Susciter la résistance sur le territoire national signifiait d'abord, pour Charles de Gaulle, s'opposer au régime de Vichy, dénoncer sa politique de compromission et de forfaiture. Cette mise en accusation, il la poursuit chaque semaine dans des allocutions radiophoniques. Par le truchement du micro, il s'adresse directement au peuple par-dessus la tête de ceux qui constituent à ses yeux un gouvernement d'occasion. Il sait prendre au besoin des initiatives spectaculaires qui révèlent un homme expert-avant la lettre-au maniement des armes psychologiques. Telle cette invitation, le 25 octobre 1941, par laquelle les Français sont conviés à observer dans la rue cinq minutes d'immobilité et de silence pour protester contre les exécutions d'otages par les Allemands. Chasser ces derniers, contribuer à leur défaite, ce sera la tâche des réseaux de l'armée de l'ombre qui s'organise. Mais à l'heure opportune et dans les conditions les meilleures. Au besoin Charles de Gaulle n'hésitera pas à déconseiller les meurtres d'officiers allemands accomplis au hasard. Encore faut-il, pour déclencher une action coordonnée et efficace, être reconnu comme chef des troupes clandestines, qui, ici ou là, se sont parfois spontanément mobilisées. Si l'entreprise est délicate, elle est cependant de celles qui soulèveront le moins de difficultés. Les réseaux communistes eux-mêmes finiront par reconnaître l'autorité de Charles de Gaulle en envoyant comme délégué à Londres Fernand Grenier. L'armée constituée sur le sol de l'Angleterre et qui combat sous le pavillon national (marqué d'une croix de Lorraine) va, elle aussi, grandir peu à peu. De quelques centaines d'hommes en juin 1940, ses effectifs passeront à 7 000 à la fin de l'année, à 12 000 en juillet 1941, à 70 000 à l'été 1942. Lutter contre l'Allemagne et Vichy Dès le 7 juillet 1940, de Gaulle peut se réjouir de voir des aviateurs français prendre part à un bombardement de la Ruhr. Sur le front de Libye, en décembre 1940, nos troupes entrent en scène. Mais la situation étant ce qu'elle est, la lutte contre l'Allemagne s'identifie parfois à la lutte contre Vichy, et la lutte contre Vichy à une lutte contre des Français. En mai 1941, en Syrie, de Gaulle doit prendre la responsabilité d'ordonner aux forces de la France libre de tirer contre l'armée que commande le général Dentz. Ce que les Vichyssois ne lui pardonneront jamais. On peut penser cependant que ce n'est pas de gaieté de coeur que fut donné l'ordre de tirer. Mais ce qui compte pour de Gaulle, c'est de prouver la présence de la France aux côtés des Alliés, dans les batailles, dans les victoires. Non que la gloire militaire l'obsède. Ne participant jamais aux opérations, il abandonnera volontiers le commandement des armées aux chefs qui l'on rejoint, Leclerc, Koenig, de Lattre, Juin... Tout ce qu'il exige d'eux, c'est qu'ils soient soumis à son autorité politique. Car, dans cette guerre, ce général s'est réservé le rôle d'homme d'Etat. Au nom de la politique, précisément, de Gaulle devra toujours mener contre les Alliés une lutte serrée, acharnée même. Malgré les assurances que ceux-ci ont pu prodiguer, ils ne sont que trop enclins, aux yeux de l'homme du 18 juin, à vouloir disposer le " l'héritage tombé en déshérence ". Intransigeant parce qu'il représente la France, le chef de la France libre se doit de l'être d'autant plus que son dénuement est total. " Je suis trop pauvre pour me courber ", dira-t-il à Winston Churchill, lequel se plaindra un jour d'avoir eu à porter, outre celle que porte tout homme, une croix de Lorraine, la plus lourde de toutes... Jaloux de son indépendance Incarnant un pouvoir qui n'est même pas reconnu, possédant une armée qui, malgré son courage représente un potentiel dérisoire au sein de la coalition, le général de Gaulle n'hésitera pas à menacer l'Angleterre de rompre les relations avec elle, et les Etats-Unis de bombarder leurs bateaux, s'ils semblent avoir des vues sur certaines colonies de la France. Au besoin, de Gaulle sait jouer habilement des rivalités entre les trois Grands. Il se montre souvent des plus aimables avec M. Bogomolov, le représentant que Staline a envoyé auprès de lui après l'avoir... retiré de Vichy, en juin 1941 ! Les Anglais, jaloux de s'assurer un monopole au Levant, voient-ils d'un mauvais oeil que les deux divisions de la France libre interviennent en Libye ? De Gaulle propose aux Russes de les utiliser... Et les anglais n'ont plus qu'à venir solliciter ce qui leur était proposé. Il va sans dire que les Alliés, de leur côté, feront tout pour mettre à l'écart cet homme qui ne craint pas de prétendre qu'il incarne la France et ose leur mettre tant de bâtons dans les roues.

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