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Isaac, Jules

Publié le 13/04/2013

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1   PRÉSENTATION

Isaac, Jules (1877-1963), historien français, enseignant, collaborateur et continuateur d’Albert Malet pour la célèbre collection des manuels « Malet-Isaac «. Il s’est consacré après la Seconde Guerre mondiale à la question de l’antisémitisme.

Né à Rennes dans une famille d’officiers, Jules Isaac perd à treize ans ses deux parents à quelques mois d’intervalle. Dès lors interne au lycée Lakanal, il y aperçoit Charles Péguy de quatre ans son aîné, alors en khâgne dans le même lycée. Leur véritable rencontre à lieu en 1897 lorsqu’éclate l’affaire Dreyfus, première expérience de l’antisémitisme pour le jeune historien. Isaac fait partie du petit nombre de ceux qui aident Péguy à fonder les Cahiers de la quinzaine (1900). Suivent dix ans de lutte, de combat moral et politique aux côtés de Péguy.

2   LA COLLABORATION AVEC ALBERT MALET

Agrégé d’histoire en 1902 (dans la même promotion que Lucien Febvre), Jules Isaac commence par enseigner à Nice. Protégé d’Ernest Lavisse qui l’introduit chez Hachette en 1906, il devient collaborateur d’Albert Malet, dont le caractère et les conceptions sont assez éloignés des siens. On doit comprendre cette collaboration dans le cadre des Instructions de 1890 de Lavisse qui assignent à l’enseignement de l’histoire un but civique et partent de l’idée que l’histoire se pratique et s’enseigne dans un contexte déterminé. De la méthode, on retiendra surtout l’importance d’une pédagogie active, l’abord direct des sources (point discuté) et l’utilisation de l’image. Le Malet, lancé chez Hachette d’après les nouveaux programmes de 1902, répond à ces exigences.

À l’écart de son maître Charles Seignobos, entièrement non directif, et de son collaborateur Malet, assez partial et psychologisant, Isaac établit sa méthode des « deux points de vue « qui expose, toujours dans un souci de vérité, les thèses antagonistes.

La guerre affecte profondément Jules Isaac. Toujours soucieux d’objectivité, il supporte mal la thèse officielle d’une responsabilité unilatérale dans le déclenchement de la guerre ; il publie à contre-courant un Joffre et Lanrezac. Étude critique des témoignages sur le rôle de la 5e armée. Ces recherches l’amènent à publier en 1933 le Problème des origines de la guerre, où il égratigne Raymond Poincaré, qui lui barre l’accès à l’enseignement supérieur. Soucieux de réconciliation avec l’Allemagne (joignant toujours l’acte aux paroles, il prend part à des entretiens entre historiens français et allemands sur les sujets conflictuels), il n’en est pas moins un observateur lucide de la montée du nazisme qui lui inspire un livre, mis au pilon pendant l’Occupation : Paradoxe sur la science homicide et autres hérésies (1935).

3   L’ENGAGEMENT CONTRE L’ANTISÉMITISME

Nommé en 1936 inspecteur général de l’Instruction publique, puis en 1939 président du jury de l’agrégation d’histoire, Jules Isaac est victime des statuts antijuifs de Vichy et perd ses fonctions en 1940. Il se retire à Aix-en-Provence et écrit un livre polémique sous couvert d’histoire antique (guerre du Péloponnèse) : les Oligarques, essai d’histoire partiale. C’est alors qu’Isaac commence à analyser l’antisémitisme. Les premiers chapitres de son essentiel Jésus et Israël étaient déjà écrits lorsqu’en 1943 sa femme, son fils cadet, sa fille et son gendre sont arrêtés comme résistants ou complices, et déportés ; seul son fils reviendra.

À partir de ce moment, tous les efforts d’Isaac sont orientés vers la lutte et l’éradication de l’antisémitisme. Il est persuadé qu’il faut d’abord s’attaquer à ses racines chrétiennes et détruire par des arguments historiques le mythe du déicide et de son châtiment dans la dispersion. Bien que juif, Isaac, républicain engagé et laïc, est totalement étranger à la tradition juive. Il n’en vise pas moins par cette problématique nouvelle et féconde qu’inaugure en 1948 la publication de Jésus et Israël à instaurer de nouveaux rapports entre juifs et chrétiens. Dans cet esprit, Isaac élabore en collaboration avec des chrétiens les Dix points de Seelisberg. Ces dix points constituent la charte de l’Amitié judéo-chrétienne, dont les groupes essaiment à partir d’Aix-en-Provence, toujours fidèles à l’esprit d’Isaac et de Péguy (foi dans la nécessité de joindre l’action à l’étude).

Engagé dans des démarches au Vatican (auprès de Pie XII en 1949 et de Jean XXIII en 1960), Isaac poursuit son travail de recherche sur l’antisémitisme dans la Dispersion d’Israël, fait historique et mythe théologique (1954), puis Genèse de l’antisémitisme (1956). La synthèse de ces travaux se lit dans l’Enseignement du mépris, publié en 1962.

Jusqu’à la fin fidèle à la mémoire de Péguy (son Discours de 1950 à la Sorbonne pour le cinquantenaire de la fondation des Cahiers en témoigne), Jules Isaac, en historien engagé, est à l’origine d’un vaste mouvement de révision des rapports entre juifs et chrétiens, qui se poursuit encore aujourd’hui (voir Poliakov, Léon). Ses Expériences de ma vie — qu’il n’a pas pu achever — constituent une excellente introduction à son œuvre.

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