Izetbegović, Alija

Izetbegović, Alija (1925-2003), président de la République de Bosnie-Herzégovine de 1990 à 2000, symbole de la résistance bosniaque durant le conflit yougoslave entre 1992 et 1995.

Né dans une famille musulmane, dans le nord de la Bosnie, diplômé en droit de l’université de Sarajevo, Alija Izetbegović est arrêté en 1946 par les nouvelles autorités communistes yougoslaves. Accusé d’« activité panislamiste «, il est emprisonné durant trois ans. À sa libération, Alija Izetbegović travaille comme conseiller juridique en Bosnie. Il est à nouveau arrêté en 1983, cette fois pour « propagande islamiste «. Condamné à quatorze ans de prison, il retrouve cependant la liberté en 1988.

Après l’effondrement du communisme (1989-1990), les partis politiques non communistes sont légalisés dans les Républiques yougoslaves. Alija Izetbegović fonde le Parti d’action démocratique (SDA), parti nationaliste rassemblant les Musulmans bosniaques, en mai 1990. À la suite de la victoire du SDA aux élections de novembre 1990, Alija Izetbegović est placé à la tête d’une présidence collégiale constituée de sept membres — deux représentants respectivement pour les Musulmans, les Serbes et les Croates et un représentant pour l’ensemble des autres groupes.

Après l’éclatement de la Yougoslavie (voir Yougoslave, conflit), Alija Izetbegović tente de préserver le caractère multinational de la Bosnie-Herzégovine. En avril 1992, la communauté internationale reconnaît l’indépendance bosniaque, proclamée en octobre de l’année précédente. Mais les antagonismes entre les différents groupes et la demande des Serbes bosniaques de former un État séparé ou une union avec la Serbie mènent à une guerre civile, à laquelle Alija Izetbegović n’est pas préparé. Toutefois, durant tout le siège de Sarajevo, il ne quitte la ville à aucun moment. Il apparaît dès lors comme le symbole de la résistance des Musulmans bosniaques entre 1992 et 1995 face aux ultranationalistes serbes et croates.

Le 18 mars 1994, les accords de Washington mettent fin à un an d’affrontements entre Croates et Musulmans bosniaques et une Fédération croato-musulmane est constituée. Une présidence fédérale, ainsi qu’un gouvernement et un Parlement communs sont mis en place. Mais à l’intérieur de chaque État, la vie politique ne change guère. En Bosnie-Herzégovine, le SDA, toujours dirigé par le président Izetbegović, renforce au contraire sa puissance. En février 1995, l’islamisation de l’armée bosniaque, voulue par Alija Izetbegović, soulève une vive controverse au sein de la présidence collégiale.

Le 14 décembre 1995, Alija Izetbegović signe avec Slobodan Milošević, président de la Serbie, et Franjo Tudjman, président de la Croatie, les accords négociés à Dayton qui consacrent la partition de la Bosnie-Herzégovine. La Bosnie-Herzégovine entre alors dans un difficile processus de paix.

Au lendemain des élections législatives de septembre 1996, Alija Izetbegović prend la tête de la nouvelle présidence collégiale, qui comprend deux autres membres, le Serbe Momcilo Krajisnik et le Croate Kresimir Zubak. Il s’attache à la reconstruction de son pays, mais ses relations avec Krajisnik restent tendues, notamment au sujet de l’avenir de la ville de Brcko revendiquée à la fois par les Musulmans et les Serbes. Réélu à la tête de la présidence tripartite en 1998, celui que l’on surnomme affectueusement « Dedo « (grand-père en serbo-croate) démissionne de ses fonctions en octobre 2000 deux ans avant la fin de son mandat, pour raisons de santé.

Âgé de 75 ans, Alija Izetbegović était le dernier dirigeant des anciennes républiques yougoslaves en exercice, Franjo Tudjman étant mort en 1999 et Slobodan Milošević, défait par Vojislav Kostunica à l’élection présidentielle de septembre 2000, étant traduit à partir de février 2002 devant le Tribunal pénal international (TPI).