Devoir de Philosophie

Kenya

Publié le 11/04/2013

Extrait du document

kenya
1 PRÉSENTATION

Kenya, en swahili et en anglais (langues officielles) Kenya, pays d’Afrique de l’Est. Sa capitale est Nairobi.

Le Kenya est baigné par l’océan Indien, bordé au nord par le Soudan et l’Éthiopie, à l’est par la Somalie et au sud par la Tanzanie.

2 MILIEU NATUREL
2.1 Relief et hydrographie

Le Kenya couvre une superficie de 582 646 km². Il possède plus de 400 km de côtes bordées d’îles (Lamu), séparées de l’océan Indien par des récifs de corail. Dans la vaste plaine côtière coulent les deux principaux fleuves, Tana et Galana (appelé Athi dans son cours supérieur). Le terrain s’élève progressivement en un large plateau aride ou semi-aride qui couvre une grande partie du nord et de l'est. Dans la zone centrale, de grandes chaînes de montagnes volcaniques culminent à 5 199 m au mont Kenya. Plus à l’ouest, l’immense fracture de la Rift Valley est marquée par une succession de falaises abruptes. Le Kenya englobe la presque totalité du lac Turkana (ancien lac Rodolphe) et une petite partie du lac Victoria.

2.2 Climat

Le Kenya est traversé dans sa partie centrale par l’équateur. Les régions situées au nord de celui-ci (soit les deux tiers du pays) ont un climat désertique ou semi-désertique. Sur la côte, soumise à la mousson chaude et humide de l’océan Indien, la température moyenne varie de 24,4 °C en juin-juillet à 27,8 °C de février à avril. Les hauts plateaux sont plus tempérées (de 11 °C à 21 °C à Nairobi en juillet ; de 13 °C à 26 °C en février). La région du lac Victoria est tropicale, avec deux saisons des pluies d’octobre à décembre et d’avril à juin.

2.3 Végétation et faune

Une mangrove de palétuviers couvre partiellement la côte, où poussent également des palmiers. Teck et santal comptent parmi les espèces précieuses de la forêt côtière. Dans les steppes, jusqu’à une altitude de 900 m, prospèrent baobabs, euphorbiacées et acacias. Les vastes étendues de savane sont parsemées de bouquets d’acacias et de papyrus — de 900 m à 2 700 m environ. Les papyrus couvrent les rives du lac Victoria. Les pentes du mont Kenya possèdent une végétation différente selon l’altitude : le camphrier et le bambou sur les pentes montagneuses de l’Est et du Sud-Est, une flore de type alpin (sénés, lobélies) au-dessus de 3 500 m et, au-delà, les genévriers. Le Kenya est également réputé pour sa faune riche en animaux sauvages : antilopes de toutes espèces, éléphants, rhinocéros, zèbres, girafes, lions et autres grands félins. Parcs nationaux et réserves de chasse les protègent en principe. Mais le braconnage, qui concerne principalement les éléphants et les rhinocéros, semble irréductible. Le Kenya abonde en oiseaux et en reptiles (pythons et cobras).

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Caractéristiques démographiques

La population du Kenya était estimée à 38 millions d'habitants en 2008 (densité : 67 habitants au km2). Elle connaît un rythme d’augmentation rapide : sur la décennie 1995–2005, elle a augmenté de 25 % ; en 2008, le taux d’accroissement annuel de la population kenyane (2,8 %) est l’un des plus élevés au monde. Encore basse, l’espérance de vie est en progression, de 47 ans au début des années 2000 à 56,6 ans en 2008. Sur la même période, le taux de mortalité infantile est passé de 67,8 ‰ à 56 ‰. La lutte contre l’épidémie de sida, qui touchait 1,2 million de personnes en 2003, fait l’objet d’une importante politique gouvernementale ; le taux de prévalence de la maladie, qui s’élevait à 14 % à la fin des années 1990, est passé à 6,7 % en 2003 et est estimé à 5 % en 2007.

3.2 Divisions administratives et villes principales

Le Kenya est divisé en sept provinces — Centre (Central), Côte (Coast), Est (Eastern), Nord-Est (North-Eastern), Nyanza, Vallée du Rift (Rift Valley), Ouest (Western) — et un district (Nairobi Area). Les provinces sont gérées chacune par un conseil consultatif dont les membres sont nommés par le président de la République. Elles sont divisées en districts, dotés de conseils locaux. Une large autonomie est accordée aux autorités locales qui perçoivent leurs propres taxes pour financer la santé publique et l’enseignement, les projets de route ou de construction, les plans de sécurité sociale.

Les densités de population sont très inégales entre les provinces, en particulier entre le Nord-Est, aride, et les zones fertiles de la vallée du Rift. En outre, l’exode rural rapide gonfle les populations des villes : tandis que près des trois quarts des Kenyans vivaient dans les campagnes en 1995, le taux d’urbanisation atteint 42 % en 2005. La capitale Nairobi est, de loin, la plus grande ville du pays avec 2 575 000 habitants en 2003. Les autres villes principales sont Mombasa (660 800 habitants en 1999), premier port maritime, et Kisumu (194 390 habitants en 1999), principal port kenyan sur le lac Victoria. L’importance d'Eldoret, au nord-est de Kisumu (137 016 habitants en 1999) tient à son rôle de nœud ferroviaire.

3.3 Peuples, langues et religions

La population kenyane peut être divisée en deux grands groupes principaux. Plus de la moitié des Kenyans est d’origine bantoue : dans ce groupe, figurent les Kikuyu (22 % de la population, installés au centre du pays), les Luhya (14 %, à l’ouest), les Kamba (11 %, à l’est), les Meru (6 %, au centre), les Kisii (6 %, à l’ouest) et les Mijikenda (4 %, sur le littoral). Un autre groupe important est constitué des Nilotiques, et comprend les Luo (13 %, installés sur les rives du lac Victoria) et les Kalenjins (12 %, dans les hautes terres de l’Ouest). Le pays abrite aussi une minorité somalie (1 %) et, parmi les minorités non africaines (1 %), il existe une importante communauté originaire du sous-continent indien et implantée de longue date, ainsi que des minorités arabes et européennes.

Les langues officielles sont le swahili, langue véhiculaire de l’Est africain, et l’anglais, langue de l’ancien colonisateur. Le kikuyu et le luo sont également très utilisés (voir langues d'Afrique). Le christianisme est largement majoritaire (protestants 45 % ; catholiques 33 %) ; les estimations concernant la religion musulmane (10 %) et les religions traditionnelles (10 %) sont peu fiables.

3.4 Éducation

Le système éducatif kenyan, mis en place dans les années 1980, se divise en huit années d’enseignement primaire et quatre années d’enseignement secondaire. Au début des années 2000, il fait l’objet d’une réforme importante, qui abolit les frais d’inscription à l’école primaire afin de lutter contre l’illettrisme. En 2005, le taux d’alphabétisation atteignait 86,9 %. Le Kenya possède cinq universités : deux sont situées dans la capitale (université de Nairobi, fondée en 1956 et université Kenyatta, 1972) ; l’université Egerton a été fondée en 1939 à Nakuru ; Eldoret abrite l’université Moi, créée en 1984 et le Jomo Kenyatta University College of Agriculture and Technology.

4 INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE
4.1 Organisation des pouvoirs

La République du Kenya est régie par la Constitution de 1963, amendée à plusieurs reprises. Le système constitutionnel instaure un régime présidentiel fort, dans lequel le pouvoir exécutif est exercé par le président de la République, qui est à la fois le chef de l’État et le chef de gouvernement. Le président de la République est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Il est assisté par un vice-président et par des ministres qu’il désigne parmi les membres de l’Assemblée nationale. L’Assemblée nationale, détentrice du pouvoir législatif, constitue l’unique Chambre du Parlement kenyan ; elle compte 210 députés élus au suffrage direct pour un mandat de cinq et 12 membres nommés par le président de la République.

La Haute Cour de justice assure la fonction de juridiction constitutionnelle. Elle est placée au sommet du système judiciaire en matière civile et pénale ; au-dessous, se trouvent la Cour d'appel puis de nombreux tribunaux au niveau des districts et provinces.

4.2 Partis politiques

L’Union nationale africaine du Kenya (Kenya African National Union, KANU), fondée en 1960 et dirigée dès 1961 par Jomo Kenyatta, est le seul parti politique légal entre 1982 et 1991. À cette date, le multipartisme est introduit, et les premières élections libres ont lieu en décembre 1992. Daniel Arap Moi, qui a succédé à Jomo Kenyatta en 1978, est reconduit à la tête de l’État et la KANU obtient une majorité confortable à l’Assemblée. Mais ces élections donnent lieu à de violents troubles, souvent dirigés contre les Kikuyu, ethnie de Kenyatta, autrefois privilégiée. Lors des élections générales de 2002, le Kenya connaît sa première alternance démocratique. Aux élections législatives, la Coalition nationale arc-en-ciel (NARC), qui regroupe une quinzaine de partis d’opposition, remporte une victoire écrasante sur la KANU en obtenant la majorité absolue au Parlement. Son candidat, Mwai Kibaki, accède à la présidence en battant Uhuru Kenyatta, le fils de Jomo Kenyatta, candidat de la KANU et dauphin du président sortant, que la Constitution n’autorise pas à se représenter.

À la tête d’une nouvelle coalition, le Parti de l’unité nationale (PNU), Mwai Kibaki est déclaré vainqueur de l’élection présidentielle de décembre 2007 face à Raila Odinga, du Mouvement démocratique orange (ODM) ; le PNU est en revanche largement défait aux élections législatives (43 sièges contre 99 sièges à l’ODM). Sur fond de contestation des résultats, les violences postélectorales tournent à l’affrontement interethnique entre les Luo, ethnie de Raila Odinga, et les Kikuyu, ethnie de Mwai Kibaki. Un accord de gouvernement est signé en février 2008 entre les deux rivaux, qui prévoit la création d’un poste de Premier ministre, auquel est nommé au mois d’avril Raila Odinga..

5 ÉCONOMIE
5.1 Généralités

Longtemps cité en modèle par les pays occidentaux pour sa relative réussite économique à l’échelle du continent africain, le Kenya voit son image se ternir dans les années 1980 : la corruption et l’autoritarisme prennent le pas sur la stabilité et l'ouverture. La crise amorcée en 1990 amènent les bailleurs de fonds à lier leur aide à la démocratisation du régime. Après les élections libres de décembre 1992, le gouvernement parvient à regagner la confiance des milieux financiers internationaux et s’engage dans un ensemble de réformes radicales. Il s’agit de réduire le déficit budgétaire — par une politique de privatisations et de diminution des effectifs de la fonction publique — et d’assainir la situation financière — dévaluation et flottement du shilling kenyan, libéralisation du commerce extérieur, suppression du contrôle des prix, y compris agricoles. Mais, face à la persistance de la corruption, les bailleurs de fonds internationaux quittent le pays en 2001. En 2004, un an après l’arrivée au pouvoir de Mwai Kibaki, le Kenya renoue avec les institutions financières internationales qui reprennent leur aide, tandis que le nouveau président s’attaque d’emblée à la lutte contre la corruption, sans grand succès.

Le pays entre cependant dans une phase de croissance, portée par la production de thé, le tourisme et l’horticulture. Le taux de croissance du PIB, qui s’élevait à environ 2 % sur la période 1993-2003, atteint 6,1 % en 2006. En 2006, le PIB était de 23 milliards de dollars — soit un PIB par habitant de 623,20 dollars.

5.2 Secteur primaire : agriculture, forêts et pêche

L’agriculture emploie 19 % de la population active (2002) et représente 27 % du PIB (2006). Le Kenya atteint l’autosuffisance pour l’ensemble des denrées alimentaires de base. La première culture vivrière est le maïs, qui couvre près des deux tiers des terres cultivables (3,25 millions de tonnes en 2006). Le sorgho, les pommes de terre, les haricots, les arachides et le tabac sont également cultivés sur les hauts plateaux volcaniques du Centre, principale région agricole. La canne à sucre, le blé, le manioc, l’ananas, le coton et les noix de cajou sont produits sur les plaines côtières. Les principales cultures commerciales sont le thé (310 580 t en 2006) et les produits horticoles, suivis de loin par le café et le sisal. L'élevage — pour la viande et les produits laitiers — est important. En 2006, le Kenya possédait environ 12,4 millions de têtes de bovins, 9,30 millions d'ovins et 10,1 millions de caprins.

L’exploitation forestière représente une source non négligeable de revenus : la production de bois atteignait 22,5 millions de m³ par an en 2006. La pêche, essentiellement pratiquée dans les fleuves et les lacs de l’intérieur, suffit à satisfaire le marché local (149 378 t en 2005).

5.3 Secteur secondaire : mines et industries

Le secteur minier occupe une place très faible dans l’économie kenyane (soude, sel, fluor et minerais). D’importants gisements de plomb et d’argent ont cependant été découverts près de Mombasa. Bien qu’en expansion, le secteur industriel occupe une place modeste au sein de l’économie locale : il occupe 20 de la population active (2002) et représente 19 % du PIB (2006). Il concerne essentiellement l’agroalimentaire, dont la production est destinée à la consommation locale.

La production hydroélectrique des barrages de Kiambare et de Turkwell constitue la plus grande richesse industrielle du pays. Grâce à celle-ci ainsi qu’aux centrales géothermiques, le Kenya est énergétiquement autosuffisant : en 2003, il produisait 4,3 miliards de kWh.

5.4 Secteur tertiaire : services, finances et commerce

L’unité monétaire est le shilling kenyan, divisible en 100 cents. Les principales ressources en devises proviennent des transferts de la diaspora kenyane, du tourisme et des exportations de thé et de produits agricoles. La balance commerciale du Kenya est structurellement déficitaire. Ses principaux clients sont les pays africains, notamment l’Ouganda, suivis de ceux de l’Union européenne, notamment le Royaume-Uni, l’Allemagne et les Pays-Bas. Les importations proviennent de plus en plus d’Asie (Inde et Chine) et des pays du Golfe persique (Émirats arabes unis, Arabie Saoudite), et concernent le pétrole brut, les machines-outils, l’automobile, le fer et l’acier, ainsi que les produits plastiques. Le secteur des services emploie 62 % de la population et représente 54 % du PIB en 2006.

Le Kenya est desservi par la Kenya Railways Corporation, qui exploite environ 1 917 km de voies ferrées. Le réseau intérieur est connecté aux réseaux ougandais et tanzanien. Le réseau routier atteint 63 265 km (dont 14 %st bitumé). Des bateaux à vapeur sillonnent le lac Victoria et le relient aux lacs Albert et Kioga, situés en Ouganda. L’aéroport Jomo-Kenyatta, à Nairobi, et celui de Mombasa, accueillent les compagnies nationale (Kenya Airways) et internationales.

6 HISTOIRE

C'est dans la Rift Valley, au Kenya et en Tanzanie, qu’ont été effectuées les grandes découvertes d’australopithèques. Les fouilles menées par les équipes réunies autour des paléontologues Louis et Mary Leakey, puis de leur fils Richard Leakey, ont permis de mettre au jour des restes d’australopithèques datant de 2 à plus de 4 millions d’années.

Durant le Ier millénaire av. J.-C., des agriculteurs bantous s’établissent sur les hauts plateaux, sur les bords du lac Victoria. À partir du XIe siècle, des populations nilotiques, venues du Nord, introduisent l’élevage des bovins et développent de puissants royaumes.

Les Massaïs, pasteurs-guerriers d’origine nilotique, seraient arrivés au XVIIe siècle par le nord du lac Turkana. Laissant les hauts plateaux aux riches terres volcaniques aux Bantous, ils préfèrent s’établir dans les plaines du Centre et du Sud. En 1830, leur territoire s’étend du nord-est du lac Victoria jusqu’à la latitude de Zanzibar ; une barrière que les marchands swahili, puis les Européens doivent contourner par le sud pour parvenir jusqu’à la région des Grands Lacs.

6.1 Le commerce swahili

Après le XIe siècle, les régions côtières, appelées Côte des Zenj (mot désignant les « Noirs «), sont dominées par des négociants arabes, originaires de Mascate et d’Oman. Ils créent des comptoirs dont les plus importants furent Malindi et Mombasa. De là, ils contrôlent le commerce avec l’intérieur (esclaves, ivoire et plumes d’autruche). Ces ports constituent un maillon essentiel pour le commerce vers l’océan Indien. Une culture composite arabo-bantoue s’y développe dont la langue, le swahili, devient celle des échanges en Afrique orientale. Indépendantes les unes des autres, mais liées par le commerce, les villes swahili sont souvent dominées par des puissances extérieures. Ainsi, le sultanat de Mascate-et-Oman (voir Oman) rivalise des siècles durant avec les Européens pour la suprématie sur cette côte. Les Portugais, à la suite de Vasco de Gama qui, en route vers l’Inde, a contourné le cap de Bonne-Espérance en 1497 et fait escale à Mombasa en 1498, tentent de monopoliser le commerce de l’océan Indien. Durant plus d’un siècle — et malgré les résistances —, ils dominent les cités swahili. Fort-Jésus, forteresse édifiée au XVIe siècle à Mombasa, témoigne de leur ancienne puissance. Dans la première moitié du XVIIIe siècle, ils sont chassés de la région par les Omanais.

6.2 La dynastie omanaise

Au début du XIXe siècle, le sultanat d’Oman — qui a conclu un traité d’amitié avec les Britanniques, dont l’influence s’affirme dans cette partie de l’Afrique — a conquis toutes les villes swahili situées au nord du cap Delgado. Maître d’un vaste empire commercial, Oman n’essaie pas de dominer les populations de l’intérieur. En 1830, la capitale du sultanat est transférée de la péninsule Arabique dans l’île de Zanzibar, au large de l’actuelle Tanzanie. Les plantations de girofle de Zanzibar et les palmeraies à huile de Mombasa nécessitent une main-d’œuvre importante, qui est pourvue par la traite des Noirs. Contrôlée depuis Mombasa et Zanzibar, la traite négrière (voir commerce triangulaire) s’étend à l’intérieur de l’Afrique jusqu’au Congo. Les négriers swahili effectuent parfois des raids mais, le plus souvent, achètent les esclaves aux tribus locales dominantes. Les Kambas du Kilimandjaro participent ainsi au « commerce honteux «. Les missionnaires et explorateurs européens dénoncent violemment cette traite négrière, dont l’Europe est pourtant bénéficiaire en incitant les pouvoirs locaux à pratiquer le commerce de coton et de clous de girofle.

Le consul britannique à Zanzibar prend la tête du mouvement antiesclavagiste. Vers 1850, en échange de garanties concernant le maintien de sa domination sur la côte, le sultan d’Oman signe des traités limitant ce commerce, avant d’accepter, en 1873, d’abolir la traite, c’est-à-dire le commerce, mais non l’utilisation d’esclaves dans les plantations.

6.3 La colonisation britannique

De 1873 à 1886, le consul britannique John Kirk encourage le sultan à annexer à son empire la plaine agricole côtière. L’unification territoriale profitera à terme aux Britanniques, en lutte avec les Allemands pour le contrôle de l’Afrique orientale. Les zones d’influence respectives sont définies lors du congrès de Berlin, en 1885. Les Allemands obtiennent la côte du Tanganyika (une partie de l’actuelle Tanzanie), ainsi que le mont Kilimandjaro et le Kenya revient aux Britanniques. Dans un premier temps, les intérêts britanniques sont représentés par l’Imperial British East Africa Company. Mais en 1896, le Foreign Office en prend le contrôle direct, sous prétexte de construire une voie ferrée reliant Mombasa au lac Victoria. Des travailleurs indiens sont employés à la construction de cette ligne qui doit faciliter la conquête de l’intérieur du pays. Les populations locales ne peuvent résister à l’extension du protectorat britannique.

Les chefferies autochtones sont maintenues, sous la tutelle de chefs de district placés sous l’autorité d’un gouverneur nommé par Londres, les meilleures terres, jusque-là cultivées par les Kikuyu, étant cependant attribuées aux colons. Avant 1900, certains ont commencé à s’installer dans la région de Nairobi, important nœud ferroviaire. À la fin de la Première Guerre mondiale, durant laquelle plus de 150 000 Kenyans ont été enrôlés dans l’armée britannique, environ 9 000 colons sont établis sur les hauts plateaux.

En 1919, la population autochtone est gravement affectée par la famine ; Kikuyu, Kambas et Luos se révoltent à plusieurs reprises contre l’accaparement de leurs terres. En 1920, le Kenya devient une colonie de la Couronne, mais la situation des autochtones n’évolue guère. Elle est même aggravée par les effets de la crise économique de 1929, aussi nombre d’entre eux sont contraints d’émigrer vers les villes. Le nouveau statut colonial permet cependant la création d’associations : les Kikuyu fondent ainsi, en 1925, leur formation, afin de lutter contre l’accaparement des terres. Jomo Kenyatta devient le secrétaire général de la Kikuyu Central Association (KCA). Il se rend, en 1929, à Londres afin d’en appeler à l’opinion britannique et internationale. En 1940, la KCA est interdite. Kenyatta demeure en exil jusqu’en 1946 : revenu dans son pays, il prend la tête du mouvement indépendantiste.

6.4 La lutte pour l’indépendance

En 1952, les Mau-Mau, membres d’une société secrète kikuyu, se révoltent contre les autorités et les colons britanniques. La révolte des Mau-Mau, qui dure quatre ans, est violemment réprimée. La répression frappe l’ensemble des Kikuyu sans distinction : 13 000 d’entre eux sont tués, 80 000 internés, l’État d’urgence n’est levé qu’en 1960. Kenyatta est emprisonné pour complicité présumée avec les Mau-Mau. Le changement, pourtant, était inéluctable, les autorités coloniales ayant favorisé la constitution d’une classe moyenne africaine, en encourageant les autochtones à s’engager dans les cultures d’exportation. En 1957, les petits planteurs africains sont autorisés à élire huit représentants au Conseil législatif de la colonie.

Le mouvement indépendantiste, dans le même temps, se structure. En 1960 est fondée l’Union nationale africaine du Kenya (Kenya African National Union, KANU), dont Kenyatta prend la direction après sa libération, l’année suivante. Ronald Ngala et Daniel Arap Moi sont rapidement scission, entraînant les ethnies minoritaires opposées à la domination des Kikuyu. Ils fondent l’Union démocratique africaine du Kenya (Kenya African Democratic Union, KADU).

Une conférence constitutionnelle prépare l’accession à l’indépendance, qui devient effective le 12 décembre 1963. Kenyatta, dont le parti a remporté les élections, devient président de la nouvelle République indépendante.

6.5 Le Kenya de Kenyatta

Contrairement aux craintes des colons, le pouvoir africain se montre modéré, pro-occidental et progressiste. La structure foncière n’est pas radicalement modifiée. Les terres rachetées aux Européens sont redistribuées selon des critères tribaux et une élite kenyane, en majorité formée par les Kikuyu, se constitue. La stabilité politique, due à l’hégémonie de la KANU, parti unique de facto à partir de 1969, attire d’importants investissements étrangers. Une nouvelle zone industrielle est créée près de Thika, et le centre de Nairobi est modernisé. L’industrie du tourisme, reposant sur les grandes réserves nationales d’animaux sauvages, se développe rapidement et devient une ressource de revenus importante. Le prestige de Kenyatta, nommé le Mzee (« le Vieux «), reste intact lorsqu’il décède en 1978.

6.6 Une succession difficile
6.6.1 Le régime de Daniel Arap Moi (1978-2002)

L’arrivée au pouvoir du vice-président Daniel Arap Moi, choisi par Kenyatta en raison de son appartenance à une ethnie minoritaire, les Kalenjin, ne se fait pas sans tensions au sein de l’appareil d’État. Le président Moi renforce son autorité, en juin 1982, en consacrant dans les textes le régime de parti unique. Deux mois plus tard, des unités de l’armée de l’air tentent de le chasser, mais elles sont repoussées par des troupes loyalistes. Les tensions sociales suscitées par la crise économique et l’accroissement démographique ne cessent de s’exacerber durant toute la décennie, alors même que le régime réprime toute opposition et répond aux aspirations démocratiques des manifestants par la violence.

En 1990, l’assassinat du ministre des Affaires étrangères, Robert Ouko, un Luo, est à l’origine de violents affrontements intercommunautaires. L’année suivante est marquée par la création du Forum pour la restauration de la démocratie (FORD) dont les appels à la libéralisation du régime sont entendus par la communauté internationale. Le gel de l’aide financière contraint Daniel Arap Moi à accepter le multipartisme. Les partis d’opposition sont alors reconnus. Malgré la politique menée par le pouvoir qui, dès le milieu des années 1980, a attisé les rivalités entre communautés dans la Rift Valley, et les effets sociaux négatifs des mesures d’ajustement économiques, Daniel Arap Moi est réélu en 1992, lors des premières élections libres. Les affrontements intercommunautaires se poursuivent cependant. Des dizaines de milliers de Kikuyu sont chassés de la Rift Valley par les Kalenjin et les Massaï. Des centaines de fermiers luo doivent également quitter leurs terres. En juillet 1995, le Royaume-Uni suspend de nouveau son aide au Kenya, en raison des violations des droits de l’homme.

En 1997 et 1998, des Kikuyu et des Kamba font l’objet d’attaques et d’exactions qui entraînent la mort de plusieurs centaines de personnes et l’exode de 150 000 autres. Daniel Arap Moi, qui brigue un cinquième mandat, est réélu en janvier 1998 au terme d’un processus électoral marqué par de nombreuses irrégularités. L’opposition, qui n’a jamais su présenter une alternative crédible au pouvoir, accuse le président Moi d’attiser les tensions communautaires afin d’apparaître comme le seul recours possible dans un contexte troublé. Celui-ci entame son dernier mandat, et une lutte pour la succession commence au sein de la KANU, l’ex-parti unique, toujours au pouvoir.

6.6.2 Mwai Kibaki et l’alternance politique (2003- )

Au mois d’août 2002, Daniel Arap Moi annonce la tenue d’élections générales (présidentielle, législatives et municipales) pour le mois de décembre suivant. Le président sortant, que la Constitution n’autorise pas à se représenter, choisit comme dauphin le jeune Uhuru Kenyatta, fils du premier président du Kenya, Jomo Kenyatta. Au mois d’octobre, celui-ci est investi par la KANU pour être son candidat à l’élection présidentielle, tandis que l’opposition, pour contrer le candidat du pouvoir, se regroupe au sein de la Coalition nationale arc-en-ciel (NARC), autour de l’opposant Mwai Kibaki. Les élections générales se déroulent le 27 décembre 2002 dans la régularité, sans violences ni fraude généralisée. Mwai Kibaki remporte le scrutin présidentiel dès le premier tour avec 62,2 p. 100 des suffrages, contre 31,3 p. 100 pour son rival Uhuru Kenyatta. La NARC remporte une victoire écrasante aux élections législatives : avec 56,1 p. 100 des suffrages, elle obtient la majorité absolue au Parlement avec 125 sièges sur 210. Accueillies dans la liesse populaire, ces élections historiques, dont les résultats sont acceptés aussi bien par Daniel Arap Moi que par son candidat défait Uhuru Kenyatta, marquent la première alternance démocratique depuis l’indépendance, en 1963.

Tandis que Daniel Arap Moi s’efface au terme de vingt-quatre années de pouvoir sans partage, le nouveau président Mwai Kibaki prête serment le 1er janvier 2003, puis forme un gouvernement réunissant à la fois des opposants de longue date et d’anciens membres de la KANU ralliés tardivement à l’opposition. Économiste renommé, il jouit d’une réputation d’intégrité et de tolérance. Un an après son arrivée au pouvoir, le Kenya renoue avec les institutions financières internationales, qui reprennent leur aide interrompue en 2000. Le nouveau président s’attaque à l’éradication de l’ignorance par la mise en place d’un programme baptisé « Free Primary Education « rendant l’éducation primaire gratuite et obligatoire (sans limite d’âge). Il parvient à remettre le pays sur la voie d’une croissance dynamique (près de 7 % en 2007), même si, au plan social, les inégalités de revenus demeurent fortes, avec un taux de pauvreté de plus de 55 %. Son mandat est cependant terni par la faiblesse de ses résultats en matière de lutte contre la corruption, en dépit de la volonté affichée. En 2005, le président Kibaki doit en outre faire face au rejet par référendum de son projet de réforme constitutionnelle (maintenant d’importantes prérogatives présidentielles), qui entraîne de profondes divisions au sein de la classe politique et de la population, et provoque l’éclatement de la Coalition nationale arc-en-ciel (NARC).

En décembre 2007, à l’issue d’une campagne meurtrière et d’un scrutin entaché de fraudes, Mwai Kibaki est déclaré vainqueur de l’élection présidentielle face à son principal adversaire, Raila Odinga. Contestée par l’opposition, cette réélection plonge le pays (en particulier Nairobi et la vallée du Rift) dans une vague d’affrontements sanglants qui dégénèrent en violences interethniques visant d’abord les Kikuyu, l’ethnie de Mwai Kibaki puis, en représailles, les Luo, l’ethnie de Raila Odinga. Après la mort de plus de 1 500 personnes et le déplacement de quelque 300 000 autres, les négociations menées sous l’égide de l’Union africaine et de l’ancien Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, aboutissent le 28 février 2008 à la signature d’un accord de partage du pouvoir, qui institue notamment la création d’un poste de Premier ministre qui échoit au leader de l’opposition.

Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

Liens utiles