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L'ancien parti unique, le FLN, remporte la majorité absolue à l'Assemblée algérienne

Publié le 17/01/2022

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30 mai 2002 Treize ans après l'avènement du multipartisme en Algérie, l'ex- parti unique, le Front de libération nationale, fait un retour en force et rafle la majorité absolue à l'Assemblée populaire nationale. Le FLN a en effet remporté 199 sièges sur les 389 que compte la nouvelle chambre, élue jeudi 30 mai lors d'un vote marqué par un taux abstention record (près de 54 % des électeurs) ce qui constitue un revers pour le pouvoir. Le taux de participation de 46 % est le plus faible jamais enregistré en Algérie depuis l'indépendance. Le parti d'Ali Benflis, secrétaire général du FLN, détrône le Rassemblement national démocratique (RND) d'Ahmed Ouyahia qu'il relègue à la deuxième place, avec 48 sièges contre 155 sièges dans l'assemblée issue des élections de 1997 aux persistants relents de fraude. Viennent ensuite les islamistes du mouvement Islah (Mouvement de la réforme nationale MRN d'Abdallah Djaballah, de l'opposition) qui, avec ses 43 sièges, se place devant le Mouvement de la société de la paix (MSP) de Mahfoud Nahnah (38 sièges) ce qui est une surprise. Les indépendants élargissent leur représentativité et obtiennent 29 sièges. Le Parti des travailleurs (PT) de Louiza Hanoune (opposition) fait une percée remarquée et obtient 21 sièges contre deux auparavant. Les grands absents de la nouvelle assemblée sont le Front des forces socialistes (FFS de Hocine Aït Ahmed) et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD du docteur Saïd Saadi), qui avaient boycotté le scrutin en raison de la crise qui secoue le pays, en particulier la Kabylie, depuis un an. style et sang neufs L'abstention a sans aucun doute profité au FLN, de même que la relative désaffection des électeurs islamistes. Les voix de l'ex-FIS (Front islamique de salut, interdit) ne semblent pas s'être exprimées, ou alors, elles sont allées en quantité mesurée au MNR de Djaballah. La remontée du FLN s'explique aussi par l'effondrement du RND, le parti « frère ennemi », sur lequel se portent, depuis sa création en 1997, les voix des militaires et des corps de sécurité. Sans assise populaire, tenu pour responsable de la mauvaise gestion des municipalités qu'il contrôle à une majorité écrasante, le RND a fini par pâtir de l'impopularité de son chef, l'ex-premier ministre et actuel ministre de la justice, Ahmed Ouyahia. La victoire du FLN s'explique également par le style et le sang neufs qu'a injectés au parti son nouveau secrétaire général, le chef du gouvernement, Ali Benflis. Avocat de profession, militant des droits de l'homme, bénéficiant d'une réputation jamais entachée par des affaires d'enrichissement ou de corruption, Ali Benflis a entrepris en septembre 2001 de donner un nouveau souffle au vieux parti hérité de la guerre d'indépendance. Il a commencé à l'ouvrir aux femmes et aux jeunes et à écarter les caciques tenus pour responsables du chaos dans lequel est plongé l'Algérie. Dix-neuf femmes élues jeudi sous la bannière du FLN font leur entrée dans la nouvelle assemblée, ce qui constitue un bouleversement. Mais les véritables changements de fond ne devraient pas intervenir avant mars 2003, à l'occasion du 8e congrès du parti. Devant la presse réunie vendredi à Alger, le secrétaire général du FLN a souligné qu'en dépit du score obtenu, « il n'y avait pas de place au triomphalisme. » « Aucun parti ne recèle en lui la capacité de régler seul la crise multiforme que connaît l'Algérie et d'en éliminer les effets néfastes sur l'économie et la société », a-t-il déclaré, souhaitant renouveler l'expérience d'une coalition gouvernementale « pour servir l'intérêt national. » Les deux partis kabyles qui avaient appelé à la « dissidence citoyenne » ont rapidement réagi aux résultats des élections de jeudi. Ahmed Djeddaï, premier secrétaire du FFS, qualifie le taux de participation annoncé sur le territoire national de « surréaliste » et de « supercherie destinée à tromper une fois de plus l'opinion nationale et internationale. » Pour le FFS, ce taux a, en réalité, varié entre 15 % et 20 %. Saïd Saadi, le dirigeant du RCD, lui, le ramène à 20 % maximum et estime que l'Assemblée populaire nationale, dans ces conditions, « souffre d'une crise de légitimité », d'autant que « pour la première fois depuis l'indépendance, une partie du peuple algérien [la Kabylie] sera exclue de la représentation parlementaire. » A Tizi Ouzou, 1,84 % des inscrits avaient pris part au scrutin jeudi, tandis qu'à Bejaïa, ils étaient 2,62 %, selon les chiffres fournis par le ministère de l'intérieur. Pour sa part, le docteur Ahmed Taleb Ibrahimi, dirigeant du parti Wafa (non agréé) souligne que la « non-participation massive » aux élections du 30 mai doit être interprétée comme « un signe de solidarité des différentes régions d'Algérie » à l'égard de la Kabylie. Pour lui, c'est également le signe que « l'appel des quatre a eu un écho. » Le 16 avril, Ahmed Taleb Ibrahimi avait signé avec le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADDH), Ali Yahia Abdenour, l'ancien chef d'état-major de la marine, le général Rachid Benyellès, ainsi que Hocine Aït Ahmed, du FFS, une déclaration appelant les Algériens à « rejeter la prochaine mascarade électorale et à exiger un changement radical de régime. » FLORENCE BEAUGE Le Monde du 3 juin 2002

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