Devoir de Philosophie

Le loisir, signe distinctif de la liberté.

Publié le 22/02/2012

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Socrate : Ils risquent bien, ceux-là qui ont roulé, depuis leur jeunesse, dans les tribunaux et les plaidoiries, d'être, par rapport à ceux qui furent nourris dans la philosophie et dans les études qu'elle inspire, comme gens éduqués à servir comparés à des hommes libres. Théodore : En quoi donc? Socrate : En ce que, à ces derniers, le bien que tu as dit est toujours présent : le loisir, et que, leurs discours, c'est en paix, à loisir qu'ils les font. Vois-nous présentement : c'est déjà la troisième fois que nous entamons discours après discours. Eux font de même si un sujet survient qui, à eux comme à nous, plaise mieux que le sujet en cours, et point ne leur importe longueur ou brièveté dans l'argument, pourvu seulement qu'ils atteignent le vrai. Les autres ne parlent jamais qu'en gens à qui le loisir manque : l'eau qui s'écoule devant eux n'attend pas. Ils n'ont point liberté d'étendre à leur gré le sujet de leur discours : la nécessité est là, que tient dressée le plaideur adverse, avec l'acte d'accusation, dont les articles, une fois proclamés, sont barrières que ne doit point franchir la plaidoirie et que consacre ce qu'ils appellent le serment réciproque. Ils ne sont jamais que des esclaves plaidant devant leur maître commun, qui siège, ayant en main une plainte quelconque. Leurs contestes n'ont jamais portée indifférente, mais toujours immédiatement personnelle et, souvent, leur vie même est le prix de la course. Aussi toutes ces épreuves tendent leurs énergies, aiguisent leur finesse, les rendent savants aux paroles qui flattent le maître, aux manières de faire qui l'enjôlent, leur font des âmes rabougries et tordues. Croissance, rectitude, liberté, tout jeunes, l'esclavage les leur enleva, les contraignit aux pratiques tortueuses, jeta en si graves dangers et si graves craintes leurs âmes encore tendres que, n'y pouvant opposer le juste et le vrai comme support, c'est tout droit au mensonge, aux réciprocités d'injustice qu'ils se tournent, et ainsi se courbent, recourbent et recroquevillent. Aussi n'y a-t-il plus rien de sain en leur pensée quand leur adolescence se termine en virilité et que leur malice et leur sagesse est parfaite, à ce qu'ils croient. PLATON.

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