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PAUL DÉROULÈDE (1846-1914). Le bon gîte

Publié le 17/01/2022

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Béranger, poète patriote, a formé de nombreux disciples; le plus célèbre est Paul Déroulède, dont les Chants du soldat, d'une pensée si loyale, d'un style simple et ferme, d'un rythme toujours « militaire «, se sont gravés dans les mémoires.


Le bon gîte (1880).


On cherchera dans cette pièce tout un petit drame, drame d'émotion intérieure: le refrain des trois premiers couplets a quelque chose de brusque e de maternel à la fois: celui du dernier couplet est plein d'une émotion pro fonde, toute de situation, et explique, comme un dénouement, tout ce qui précède.


Bonne vieille, que fais-tu là?
Il fait assez chaud sans cela,
Tu peux laisser tomber la flamme.
Ménage ton bois, pauvre femme,
Je suis séché, je n'ai plus froid.
Mais elle, qui ne veut m'entendre,
Jette un fagot, range la cendre :
« Chauffe-toi, soldat, chauffe-toi. «
Bonne vieille, je n'ai pas faim,
Garde ton jambon et ton vin;
J'ai mangé la soupe à l'étape,
Veux-tu bien m'ôter cette nappe!
C'est trop bon et trop beau pour moi.
Mais elle, qui n'en veut rien faire,
Taille mon pain, remplit mon verre :
« Refais-toi, soldat, refais-toi. «
Bonne vieille, pour qui ces draps?
Par ma foi, tu n'y penses pas !
Et ton étable? et cette paille
Où l'on fait son lit à sa taille ?
Je dormirai là comme un roi.
Mais elle, qui n'en veut démordre,
Place les draps, met tout en ordre :
« Couche-toi, soldat, couche-toi ! «
— Le jour vient, le départ aussi. —
Allons ! adieu... Mais qu'est ceci?
Mon sac est plus lourd que la veille.
Ah! bonne hôtesse! ah ! chère vieille,
Pourquoi tant me gâter, pourquoi?
Et la bonne vieille de dire,
Moitié larme, moitié sourire :
« J'ai mon gars soldat comme toi ! «


(Nouveaux Chants du soldat, IV, Calmann-Lévy, édit.)


QUESTIONS D'EXAMEN


I. — L'ensemble. — Un dialogue, petite pièce toute pleine d'une émotion contenue. — Cette pièce n'est-elle pas, au fond, un petit drame? Indiquez-en les péripéties; Le soldat, traité avec tant d'affectueuse sollicitude, n'a-t-il pas, à la fin, le mot de l'énigme, — la réponse aux pourquoi? (le dénouement); Quel sentiment a poussé l'hôtesse à se montrer si bonne à l'égard du soldat? Dans ce petit drame, quel est le personnage qui parle le plus? Quel est le sens général de ses paroles? le ton? L'autre personnage ne dit que quelques mots seulement : cette brièveté de langage n'est-elle pas voulue? Ne semble-t-il pas que la « bonne vieille « cherche à éluder des explications? Quel sentiment implique la répétition des premiers mots : Chauffe-toi, soldat, chauffe-toi ? Quelle impression vous laisse la lecture de cette pièce?


II. — L'analyse du morceau. — Quelles circonstances provoquent l'étonnement du soldat? a) L'hôtesse ne ménage pas son bois; — b) Elle sert son jambon et son vin, — et sur une nappe; c) Elle prépare un bon lit; — d) Elle a mis des provisions dans le sac; Par quoi se manifeste cet étonnement? (des questions, des exclamations, des conseils...; à distinguer); Dans quel état le soldat a-t-il dû arriver chez la « bonne vieille «? Quelles vous paraissent être ses habitudes de vie? (simplicité, sobriété...) ; A quel moment est-il vraiment attendri ? Que remarquez-vous au sujet de la composition de chacune des quatre strophes? (strophes de construction symétrique; — les cinq premiers vers : paroles du soldat; — les deux vers suivants : action de la « bonne vieille «; — le dernier vers : ses paroles, formant le refrain).

III. — Le style; — les expressions. — Faites ressortir le rythme musical de cette pièce ; Montrez la sobriété du style (dès le premier mot, l'auteur est au coeur du sujet...), — sa clarté, sa simplicité; Quel est le sens de l'expression : qui n'en veut démordre? Que signifie le mot étape?


IV. — La grammaire. — Indiquez un synonyme de gîte, — de ménager (Ménage ton bois...); Trouvez un composé, puis un dérivé, de ordre, de sac; A quel temps et à quel mode est chacun des verbes contenus dans la première strophe? Nature et fonction de chacun des mots suivants : qui ne veut m'entendre.
Rédaction. — En vous inspirant du vers : « J'ai mon gars soldat comme toi «, parlez des soins en quelque sorte maternels donnés par une infirmière, pendant la Grande Guerre, à un soldat blessé.

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