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Tchécoslovaquie

Publié le 05/04/2013

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1   PRÉSENTATION

Tchécoslovaquie, ancien État fédéral d’Europe centrale fondé en octobre 1918, au lendemain de la Première Guerre mondiale, et dissous le 31 décembre 1992.

La partition de la Tchécoslovaquie a donné naissance à deux nouveaux États : la République tchèque et la Slovaquie.

2   L’UNION DES TCHÈQUES ET DES SLOVAQUES

Jusqu’à la Première Guerre mondiale, ni les Tchèques, ni les Slovaques n’ont manifesté de velléité d’indépendance comparable à celle des Slaves ou des Hongrois à l’intérieur de l’Empire austro-hongrois. Les deux peuples n’ont jamais formé ensemble un État indépendant, mais se sont rapprochés à la fin du xixe siècle. En mai 1917, les députés tchèques proposent la constitution d’un État confédéral dont la Bohême — agrandie de la Slovaquie — formerait la troisième composante avec l’Autriche et la Hongrie. Le projet est rejeté par l’empereur Charles Ier, en raison de l’opposition des Magyars (Hongrois). Dès 1916, les Tchèques Tomáš Masaryk, Edvard Beneš et le Slovaque Milan Štefánik ont fondé à Paris un Conseil national tchécoslovaque.

3   LA IRE RÉPUBLIQUE (1918-1938)
3.1   La création d’un nouvel État

La défaite de l’Autriche-Hongrie face aux Alliés, en 1918, précipite les événements. Le 28 octobre, la république est proclamée à Prague. Le 31, un gouvernement provisoire d’union nationale reconnu par les Alliés s’installe dans la capitale, et Tomáš Masaryk est proclamé président. Deux présidents — Tomáš Masaryk (de 1918 à 1935), qui se retire en raison de son grand âge, et Edvard Beneš (de 1935 à 1938) — se sont succédé à la tête de cette Ire République tchécoslovaque.

Les frontières sont définies au traité de Saint-Germain (10 septembre 1919), puis revues au traité de Trianon (4 juin 1920). La partie tchèque de la république comprend la Bohême, la Moravie, la Silésie autrichienne et les Sudètes. La Slovaquie, ancienne dépendance de la Hongrie, étend sa frontière au sud pour bénéficier d’une ouverture sur le Danube et à l’est, en Ruthénie.

La Constitution de 1920, qui établit une république parlementaire centralisée, inspirée du modèle français, fait figure d’exception en Europe centrale. Les députés sont élus au suffrage universel et les droits de l’homme sont garantis. Cependant, l’extrême éclatement de la représentation parlementaire impose la constitution de gouvernements de coalition autour du Parti agrarien pendant presque toute la période. Les groupes extrémistes de droite et de gauche, y compris le mouvement fasciste et le Parti communiste (créé en 1921), n’obtiennent jamais une réelle influence.

Les territoires nouvellement acquis et les ressources industrielles héritées de l’Empire austro-hongrois font de la Tchécoslovaquie un pays relativement prospère. Une monnaie stable et un programme modéré de redistribution des terres lui permettent de surmonter la crise économique de l’après-guerre, mais la crise économique de 1929 provoque une chute de 40 % de la production industrielle en quatre ans.

3.2   Une mosaïque ethnique

Le tracé des frontières ne tient pas compte du peuplement et porte en germe de lourds conflits avec les pays voisins. La Tchécoslovaquie comprend deux tiers seulement de nationaux, le reste étant composé d’Allemands (22 %, surtout dans les Sudètes), de Hongrois (5 %, en Slovaquie et Ruthénie), de Polonais (1 % du territoire de Teschen) et d’Ukrainiens (Ruthénie).

Les droits des minorités sont respectés (aucune plainte n’est déposée avant 1938 devant la commission des minorités de la Société des Nations), contrairement à ce qui se passe dans les pays voisins, mais certains groupes de populations ont manifesté leur réticence à intégrer le nouvel État dès sa fondation. Les Allemands des Sudètes, en particulier, ont émis le souhait d’être incorporés au puissant voisin. Les revendications des Ukrainiens et des Hongrois vont également constituer une menace de plus en plus sérieuse pour le jeune État.

En outre, les relations entre Tchèques et Slovaques se dégradent rapidement. En 1918, Tomáš Masaryk a signé l’accord de Pittsburgh avec des émigrants slovaques aux États-Unis, garantissant à la Slovaquie un statut autonome dans le futur État commun. Cependant, la constitution de 1920 proclame que la Tchécoslovaquie est l’État unique et centralisé d’un seul « peuple tchèque « parlant « la langue tchèque «. Les Slovaques sont également indignés par l’attitude condescendante des Tchèques, plus urbanisés et plus industrialisés, qui ont la mainmise sur le gouvernement et la plupart des administrations, même en Slovaquie. Leur catholicisme fervent s’offense de l’hostilité qui existe entre le gouvernement et le Vatican. Le Parti populiste slovaque de l’abbé Hlinka, sous l’influence croissante de Mgr Jozef Tiso, adopte des positions de plus en plus autonomistes et fascisantes, et remporte la moitié des suffrages en Slovaquie, en 1932.

3.3   La mise en place d’alliances diplomatiques

La question des minorités et ses implications en politique étrangère constituent une menace de plus en plus sérieuse pour la jeune république, favorable au statu quo. Effrayée par les projets révisionnistes de ses voisins allemands, autrichiens, hongrois et polonais, elle cherche à garantir sa sécurité par le biais d’accords, d’alliances militaires et de traités de coopération. Entre 1920 et 1922, elle forme la Petite Entente avec la Roumanie et la Yougoslavie (qui s’en retire en 1936). Soucieuse de se ménager l’appui d’une grande puissance, elle signe en 1925 un traité d’assistance militaire avec la France. En 1935, elle conclut un pacte défensif avec l’URSS, dont la mise en application est subordonnée au respect des engagements français.

3.4   Le choc des accords de Munich

Les divisions internes combinées aux menaces externes vont causer la disparition de la République tchécoslovaque. En 1933, l’arrivée des nazis au pouvoir en Allemagne replace au premier plan la question des trois millions d’Allemands des Sudètes. Deux ans plus tard, le parti pronazi de Konrad Henlein obtient près d’un tiers des suffrages de l’électorat allemand.

Après l’annexion de l’Autriche par Adolf Hitler, le 12 mars 1938, tous les partis politiques allemands de Tchécoslovaquie, à l’exception des sociaux-démocrates, quittent le gouvernement. Encouragé par Hitler, Konrad Henlein rassemble ses revendications dans le programme en huit points, de Karlsbad (ou Karlovy Vary) en avril 1938. Son exigence d’une autonomie complète des Sudètes dans un État fédéraliste est d’abord repoussée par Prague, malgré les pressions des Français et des Britanniques. Quand le président Edvard Beneš accepte finalement (4 septembre), grâce à la médiation de Lord Runciman, Konrad Henlein rompt les négociations et déclenche une vague d’attentats. Réfugié en Allemagne, il demande le rattachement des Sudètes au IIIe Reich. Le 12 septembre, Adolf Hitler prononce un discours très violent à l’égard de la Tchécoslovaquie. Cherchant à éviter la guerre, le Premier ministre britannique Neville Chamberlain rencontre le Führer à Berchtesgaden (15 septembre), et accepte le principe d’une cession des Sudètes. Les Français, plus hésitants en raison du traité qui les lie, tombent d’accord avec Londres pour encourager Prague à accepter. Les nouvelles exigences formulées par l’Allemagne (22 septembre) accroissent la tension et provoquent la mobilisation en France. À la demande du Britannique Chamberlain, une conférence réunissant Édouard Daladier (France), Adolf Hitler (Allemagne) et Benito Mussolini (Italie) est organisée à Munich, les 29 et 30 septembre. N’ayant pas été convié, le Premier ministre tchécoslovaque Syrovy est placé devant le fait accompli.

Les accords de Munich, entrés en vigueur dès le 1er octobre 1938, enlèvent à la Tchécoslovaquie un territoire de 30 000 km², peuplé de 3 millions d’habitants et lui fait perdre ses fortifications, ses défenses naturelles ainsi que d’importantes ressources économiques.

Profitant de l’affaiblissement de Prague, la Pologne et la Hongrie lancent des ultimatums concernant la cession des territoires frontaliers contestés. Dès le 30 septembre, la Pologne annexe le territoire de Teschen. À la suite de l’arbitrage italo-allemand (2 novembre), la Hongrie récupère le sud de la Slovaquie. En un mois, la Tchécoslovaquie a perdu 4,8 millions d’habitants, dont un quart sont Tchèques et Slovaques, un tiers de ses territoires et un quart de son potentiel industriel.

4   LA IIE RÉPUBLIQUE (1938-1939) ET LA SECONDE GUERRE MONDIALE
4.1   Le démembrement du pays

La IIe République tchèque ne dure que six mois (jusqu’en mars 1939) : à la suite des accords de Munich, le président Edvard Beneš ayant démissionné et pris le chemin de l’exil (5 octobre), un nouveau gouvernement de droite est formé par le président Emil Hácha Slavishly.

Dès le 6 octobre 1938, Mgr Jozef Tiso proclame l’autonomie de la Slovaquie et imprime à son régime une orientation résolument fasciste. Soutenue par Adolf Hitler, la diète de Bratislava vote l’indépendance de la Slovaquie le 14 mars 1939. Jozef Tiso, homme de paille et allié militaire du Reich, prend la présidence. Pour sa part convoqué à Berlin dans la nuit du 14 au 15 mars, Emil Hácha Slavishly est contraint sous la menace de « remettre avec une pleine confiance le pays tchèque entre les mains du Führer «.

4.2   La Tchécoslovaquie sous tutelle nazie

Le 15 mars 1939, les troupes allemandes franchissent la frontière et, le soir même, Adolf Hitler signe à Prague le décret instituant le protectorat de Bohême-Moravie. La Hongrie reçoit la Ruthénie (Ukraine subcarpatique).

Les établissements d’enseignement supérieur sont fermés en novembre 1939 et des centaines de milliers de Tchèques sont envoyés dans les usines allemandes à partir de 1941. La répression s’abat sur toutes les couches de la population, particulièrement les intellectuels (les écrivains Vladislav Vanèura et Julius Fuèik sont exécutés). Le Comité central de la Résistance intérieure, formé au début de l’année 1940, parvient à entrer en contact avec Londres, où Edvard Beneš reprend le titre de président et forme un gouvernement en exil, avec Jan Masaryk et Mgr Sramek.

Hormis quelques actions d’éclat — comme l’assassinat du Reichsprotektor Reinhard Heydrich (le « Boucher de Prague «), le 27 mai 1942 —, la Résistance ne peut guère étendre son action et se consacre essentiellement au sabotage et au renseignement. Déçu par l’attitude des démocraties occidentales lors des accords de Munich, Edvard Beneš décide de préparer l’avenir en signant avec l’URSS, le 12 décembre 1943, un traité d’assistance mutuelle et de coopération. Cet accord, qui prévoit l’incorporation volontaire de la Tchécoslovaquie dans la sphère soviétique, la socialisation des moyens de production et l’élimination des ennemis de l’URSS, contient en germe la mise sous tutelle du pays après la guerre. En Slovaquie, une coalition de différents partis (dont les communistes) se regroupent en un Conseil national slovaque qui tente de renverser le régime, mais l’insurrection du 29 août 1944 est réprimée par les Allemands. Sachant l’arrivée des armées soviétiques imminente, la population de Prague se soulève contre l’occupant nazi le 5 mai 1945 et le 9, l’Armée rouge libère la ville dans la liesse populaire.

5   LA IIIE RÉPUBLIQUE (1945-1948)

Installé à Košice dès le 4 avril 1945 par Edvard Beneš, le gouvernement tchèque comprend un fort contingent communiste, de même que les comités d’action qui se mettent en place dans tout le pays et prennent le contrôle de l’administration locale. Le programme de Košice (5 avril) adopte le principe d’une république dans laquelle Tchèques et Slovaques sont traités sur un pied d’égalité, avec un programme de nationalisations, une réforme agraire et la planification de l’économie. Le 16 mai, le gouvernement s’installe à Prague.

5.1   La pression communiste

Au cours de la IIIe République tchécoslovaque, les communistes étendent peu à peu leur pouvoir politique grâce à l’appui soviétique. Les élections de mai 1946 leur donnent plus du tiers des sièges au parlement. Edvard Beneš revient à la présidence, mais le leader communiste Klement Gottwald est chargé de former un nouveau gouvernement et ses partisans reçoivent les ministères de l’Éducation, de l’Intérieur et des Communications. La Tchécoslovaquie retrouve ses frontières d’avant-Munich, à l’exception de la Ruthénie (Ukraine subcarpatique), cédée à l’Union soviétique. L’expulsion brutale des 2,5 millions d’Allemands des Sudètes met fin à une présence vieille de sept siècles et permet au pays d’avoir une population à 95 % tchèque ou slovaque. Les principaux partis politiques conservateurs d’avant-guerre, notamment les Agrariens et les Populistes slovaques, sont interdits. Néanmoins, le multipartisme se maintient, contrairement à ce qui se passe dans les pays voisins passés sous la coupe soviétique.

Au cours de l’année 1947, le contexte international se modifie. Edvard Beneš, qui souhaite accepter le plan Marshall proposé par les Américains, est contraint d’y renoncer sous la pression des Soviétiques. À l’intérieur, la baisse d’influence des communistes accroît la tension à l’approche des élections prévues en mai 1948. Le conflit éclate au sein du gouvernement à propos de la nomination systématique de communistes au sein de l’administration et de la police.

5.2   Le coup de Prague

Le 21 février 1948, douze ministres libéraux démissionnent du gouvernement, pensant que la crise politique engendrée provoquera la chute du Parti communiste lors des élections programmées ; mais la tentative échoue. Les communistes sont toujours en majorité au gouvernement et le contrôle qu’ils exercent sur la police et les milices ouvrières leur permet d’organiser des manifestations de rue. Le président Beneš, malade et effrayé des risques de guerre civile, capitule et nomme un nouveau gouvernement, dominé par les communistes et leurs alliés.

Dès lors, les événements s’accélèrent. Nombre de dirigeants de l’opposition s’exilent, et Jan Masaryk est retrouvé mort (officiellement suicidé, mais les circonstances de sa mort restent controversées). En avril, toute l’industrie est nationalisée et en mai, des élections sur listes uniques donnent 86 % de voix au PC. Edvard Beneš démissionne en juin ; c’est la fin de la IIIe République tchécoslovaque.

6   LA TCHÉCOSLOVAQUIE COMMUNISTE (1948-1990)
6.1   La mise en place d’une démocratie populaire

Le communiste Klement Gottwald accède à la présidence du pays. La Tchécoslovaquie se transforme rapidement en démocratie populaire, satellite de l’URSS. L’agriculture est collectivisée, les églises attaquées et soumises à des restrictions, l’éducation et la vie culturelle et intellectuelle réorganisées selon les principes marxistes. Le procès des criminels de guerre est l’occasion d’un amalgame entre fascistes et anticommunistes, qui sont emprisonnés ou envoyés dans des camps de travail. Entre 1949 et 1954, plus de 40 000 personnes sont jugées pour atteinte à la sûreté de l’État et 178 exécutées. L’Église, les juifs, les intellectuels et les anciens chefs des partis bourgeois sont les premiers visés.

Au début des années 1950, une purge frappe le Parti communiste : le procès de Prague. Les principaux membres du parti, tels Rudolf Slánsky (ancien secrétaire général du Parti), Vladimir Clementis (ancien ministre des Affaires étrangères) sont condamnés à mort après des aveux forcés au cours de procès publics à caractère antisémite. Arthur London, survivant de ces procès, en décrit les mécanismes dans son célèbre roman l’Aveu (1968, adapté au cinéma en 1970 par le réalisateur Costa-Gavras).

Après la mort de Klement Gottwald, en mars 1953, Antonín Zápotocký est porté à la tête du pays. La mort de Joseph Staline (le 5 mars, peu avant celle de Gottwald) et la déstalinisation mise en place dans l’URSS de Khrouchtchev, mais aussi les conflits ouvriers et le mécontentement des agriculteurs, des intellectuels et des étudiants amènent les dirigeants tchécoslovaques à libéraliser le régime. Cette ouverture prend fin en 1957 avec la nomination à la présidence du secrétaire général du Parti communiste Antonín Novotný. Dès 1963 cependant, les communistes de pure obédience occupant le pouvoir sont contraints d’entreprendre la déstalinisation du pays, en raison de graves difficultés économiques. Les victimes des purges de 1952 sont réhabilitées et Mgr Beran, archevêque de Prague, est libéré.

6.2   Alexander Dubček et le Printemps de Prague

Les critiques du régime et les difficultés économiques s’aggravent et, au début de l’année 1968, la faction progressiste du Parti communiste est portée au pouvoir. Antonín Novotný est remplacé au secrétariat du Parti en janvier par Alexander Dubček (chef du PC slovaque), et à la présidence en mars par le général Ludvik Svoboda (héros de la Seconde Guerre mondiale). Au cours des mois qui suivent, connus sous le nom de Printemps de Prague, le nouveau régime annonce son intention de suivre une voie originale dans l’édification du socialisme (le « socialisme à visage humain «) et de démocratiser le pays. La méfiance des Soviétiques à l’égard de cette expérience se transforme rapidement en une forte pression quand les réformes sont mises en place.

Les libertés d’expression, de la presse, de réunion et de religion sont reconnues. Le nouveau régime donne un rôle plus important aux partis non communistes et adopte des réformes économiques, en particulier la décentralisation des instances de décisions (autogestion) et l’introduction d’incitations monétaires. Les victimes de la période 1949-1954 sont réhabilitées, et la Slovaquie obtient la promesse d’une constitution fédérale. Le programme reçoit l’approbation générale des Tchécoslovaques, le soutien de la Roumanie de Ceauşescu, de la Yougoslavie de Tito et de la plupart des partis communistes occidentaux.

Cependant, l’URSS et les leaders socialistes d’autres pays de l’Est s’y opposent, par crainte d’une contagion du mouvement. En dépit de mises en gardes officielles, de vives attaques dans la presse soviétique et de manœuvres militaires d’intimidation, les réformistes tchécoslovaques campent sur leurs positions. Lors de réunions avec la direction soviétique, en août 1968, les menaces se font plus précises. Les dirigeants tchécoslovaques s’engagent à préserver la position dominante du Parti communiste, ainsi qu’à maintenir l’alliance avec l’URSS et les États membres du pacte de Varsovie (signé en 1955).

6.3   L’invasion soviétique

Non convaincus, l’URSS et ses alliés du pacte de Varsovie décident de mettre un terme à l’expérience tchécoslovaque. Dans la nuit du 20 au 21 août 1968, environ 600 000 soldats soviétiques, est-allemands, polonais, hongrois et bulgares pénètrent dans le pays pour mettre fin à ce qu’ils qualifient de « contre-révolution de droite «. Plusieurs dirigeants réformistes, notamment Alexander Dubček, sont enlevés et conduits en URSS. À l’issue de discussions très tendues, un compromis est signé. Croyant obtenir un sursis, Alexander Dubček accepte le « stationnement provisoire « de troupes soviétiques sur son territoire, qui marque en fait la fin du Printemps de Prague. La résistance non violente des Tchécoslovaques fait néanmoins 25 victimes civiles.

L’intervention est condamnée dans le monde entier, aussi bien par des communistes que par des non communistes. Le 15 janvier 1969, le suicide par immolation du jeune Jan Palach symbolise aux yeux du monde la résistance désespérée du peuple tchécoslovaque face à l’oppression. Les troupes soviétiques sont bientôt rejointes par une horde de conseillers civils et militaires, qui viennent encadrer la politique de « normalisation «. En avril 1969, Alexander Dubček est évincé de la direction du Parti communiste tchécoslovaque et remplacé par le Slovaque Gustáv Husák (ancienne victime des purges de 1952).

6.4   La « Normalisation « de Gustáv Husák

Dès 1969, le nouveau chef du PC tchécoslovaque Gustáv Husák (qui assure la présidence du pays entre 1975 et 1989) met en place la politique de « normalisation « voulue par le Soviétique Leonid Brejnev. Il annule les réformes économiques et la libéralisation mises en place lors du Printemps de Prague, à l’exception de la promesse d’une constitution fédérale, qui est appliquée. Chaque république dispose d’une assemblée, d’un Premier ministre et d’un gouvernement. Le pouvoir fédéral est compétent en matière de défense, de politique étrangère et économique, tandis que les républiques sont responsables de l’éducation et des affaires culturelles.

Les réformistes sont éliminés du pouvoir et pourchassés. La Tchécoslovaquie redevient un État communiste modèle et un allié fidèle de l’URSS.

Le contrôle des médias (cinéma, radio, télévision) est rétabli, de même que la censure. Le ministère de l’Information supervise le contenu éditorial de tous les journaux et le ministère des Communications est responsable de la distribution. Outre le principal journal communiste, Rudé Právo (« Justice rouge «), les quotidiens nationaux comprennent les organes de deux partis alliés au Parti communiste.

À la fin des années 1980, le Conseil central des syndicats compte dans ses rangs 97 % de la classe ouvrière. Cet organisme est essentiellement chargé d’encourager la productivité, d’informer le gouvernement sur les besoins des ouvriers et d’assurer leurs loisirs. Les adhésions et les cotisations mensuelles sont obligatoires.

Au cours des années 1970, une opposition au régime se développe progressivement après la conférence d’Helsinki. Le principal acte de défi de l’opposition est la publication, le 1er janvier 1977, de la Charte 77, un document rassemblant 243 signataires (parmi lesquels des intellectuels, universitaires, hommes d’Église, etc.), qui accuse le gouvernement de Husák de graves violations envers les droits de l’homme. Le régime réplique par la condamnation et l’emprisonnement en 1979 des intellectuels dirigeants le mouvement, notamment Jan Patoèka (philosophe), Václav Havel (dramaturge), Jiri Hájek (enseignant et ancien ministre des Affaires Étrangères de Dubček). Un groupe dissident, le Comité de défense des personnes injustement poursuivies (VONS), continue à communiquer à l’Occident des informations sur les conditions de vie en Tchécoslovaquie. L’opposition est neutralisée, mais non supprimée.

6.5   La Révolution de velours

En décembre 1987, Gustáv Husák abandonne symboliquement son poste de secrétaire général du parti au profit de Miloš Jakeš, autre communiste orthodoxe, pour laisser entendre sa bonne volonté à la prestavba (synonyme de perestroïka, « restructuration «). Il conserve néanmoins la présidence du pays.

Alors que les changements politiques s’accélèrent dans l’URSS de Gorbatchev et dans les autres pays d’Europe de l’Est, le nouveau dirigeant du parti est incapable de maîtriser l’aspiration de son peuple aux réformes. Misant sur les retombées de la perestroïka soviétique, l’opposition commémore l’anniversaire du Printemps de Prague et de la mort de Jan Palach (15 janvier 1989) et manifeste dans une capitale quadrillée par la police. Arrêté, Václav Havel, figure emblématique de la dissidence, est condamné à neuf mois de prison (21 février). Le 29 septembre, 2 500 Allemands de l’Est voulant passer à l’Ouest se réfugient dans l’ambassade de RFA à Prague, donnant le signal de l’écroulement des régimes socialistes en Europe de l’Est (voir révolutions démocratiques de 1989).

La violente répression d’une manifestation d’étudiants, le 17 novembre 1989 est le point d’orgue de la Révolution de velours, qui entraîne la chute du communisme en Tchécoslovaquie. Le 25 novembre, Miloš Jakeš et les autres dirigeants du PC démissionnent. Le Premier ministre Ladislav Adamec entame des négociations avec la principale formation d’opposition, le Forum démocratique de Václav Havel, qui aboutissent à la formation d’un gouvernement de coalition le 3 décembre. Le 7 décembre, Ladislav Adamec se retire et est remplacé par le Slovaque Marian Čalfa, un ancien communiste. Après la démission du président Gustáv Husák (10 décembre), l’Assemblée nationale place à sa tête Alexander Dubček et élit Václav Havel président de la Tchécoslovaquie.

Au cours des premières élections libres depuis 1946, en juin 1990, le Forum démocratique et ses alliés obtiennent la majorité des deux chambres du Parlement. Václav Havel est réélu pour un mandat de deux ans et maintient Marian Čalfa à la tête du gouvernement de coalition.

7   LA SCISSION DE LA TCHÉCOSLOVAQUIE

Dès le 30 mars 1990, le mouvement pour l’indépendance de la Slovaquie a réuni 2 000 personnes à Bratislava. Au printemps 1992, les disparités économiques accroissent les divergences de vue entre les Tchèques, partisans d’une instauration rapide du libéralisme, et les Slovaques favorables au maintien du rôle de l’État. En outre, les Slovaques rejettent la proposition tchèque d’un régime confédéral. L’échec des négociations entraîne un blocage des institutions au cours de l’été. Le 20 juin, Václav Klaus, Premier ministre tchèque, et le Slovaque Vladimir Mečiar aboutissent à un accord de partition. Le 17 juillet, jour de la proclamation de souveraineté de la Slovaquie, Václav Havel démissionne de la présidence fédérale.

La Tchécoslovaquie cesse d’exister le 31 décembre 1992. Elle est remplacée le lendemain par la République tchèque et la Slovaquie, qui élisent respectivement Václav Havel et Michal Kováč comme présidents.

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