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Tribunal révolutionnaire

Publié le 12/02/2013

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1   PRÉSENTATION

Tribunal révolutionnaire, instance juridique exceptionnelle chargée de juger les « ennemis « de la Révolution française. Créé à Paris le 10 mars 1793, le Tribunal révolutionnaire a été l’un des principaux instruments du régime de Terreur mis en place par Maximilien de Robespierre.

Avec pour images symboliques les réquisitoires du célèbre accusateur public Antoine Fouquier-Tinville, le « pourvoyeur de la guillotine «, ou les « fournées « de charrettes de condamnés entre juin et juillet 1794, le Tribunal révolutionnaire fait partie intégrante de la légende noire de la Révolution française.

2   HISTORIQUE D’UNE INSTITUTION D’EXCEPTION

Le 17 août 1792, un tribunal criminel extraordinaire est institué par l'Assemblée législative pour diligenter le procès des responsables et des coupables de la fusillade des Tuileries du 10 août 1792, jour de la chute de la monarchie. Formé de juges et de jurés élus par les sections parisiennes, ce tribunal juge une soixantaine d’affaires jusqu’à sa suppression, le 29 novembre 1792.

2.1   La loi du 20 ventôse an I : l’établissement du Tribunal révolutionnaire

Début 1793, la tension est à son comble ; la mort sur l’échafaud du roi Louis XVI (janvier 1793) relance les mouvements contre-révolutionnaires à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Aussi, sur ordre de la Convention nationale, le tribunal criminel extraordinaire est-il reconstitué le 10 mars 1793 (20 ventôse an I). Efficace à partir du 29 mars, il a pour mission de procéder à la reconnaissance de tous les « attentats contre la République «. À l’origine, il ne peut procéder au jugement qu’après mise en accusation d’un individu par la Convention ; puis par un décret du 5 avril, le tribunal reçoit des pouvoirs accrus qui lui permettent, sur simple dénonciation, de faire « arrêter, poursuivre et juger tout prévenu des dits crimes «. C’est sans appel ni recours que les « traîtres « et les contre-révolutionnaires sont traduits devant ce tribunal extraordinaire révolutionnaire, comme il est communément appelé à partir d’octobre 1793.

Avec la mise à l'ordre du jour de la Terreur le 4 septembre 1793, le Tribunal révolutionnaire — ainsi nommé à partir d’octobre et dont le personnel a déjà été augmenté — est réorganisé dès le lendemain en quatre sections. Les garanties laissées aux accusés sont progressivement supprimées. Inlassablement taxé d’indulgence et de lenteur, le Tribunal révolutionnaire a pour consigne de limiter les débats à trois jours lorsque les jurés se déclarent suffisamment éclairés (décret du 30 octobre). C’est au cours de cette première période de la Terreur qu’ont lieu les grands procès de la reine Marie-Antoinette, des Girondins et du prince de sang Philippe Égalité — qui passent respectivement sur l’échafaud les 16 octobre, 31 octobre et 9 novembre 1793. En province également sont instaurés des tribunaux révolutionnaires. Mises en place par la loi du 11 janvier 1794, ces instances d’exception disparaissent cependant des départements, selon la loi du 8 mai suivant, au seul profit du tribunal parisien.

2.2   La loi du 22 prairial an II : la Grande Terreur

Le 10 juin 1794 (22 prairial an II) commence la Grande Terreur avec une nouvelle organisation du tribunal dont la sentence est désormais manichéenne : l'acquittement ou la mort (article 7). Ajoutant à l’arbitraire de l’expéditif judiciaire, cette loi supprime l’interrogatoire préalable des accusés (article 12), limite leur système de défense (avocat, plaidoirie, etc.) selon le type d’accusation (article 16) et permet au tribunal de s’abstenir de l’audition des témoins (article 13).

La chute de Maximilien de Robespierre le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) entraîne une modification profonde de l'orientation du tribunal. Déjà, en août 1794, les lois de prairial sont abrogées ; de même les verdicts se retournent en faveur des accusés d’hier : pour exemple, les contre-révolutionnaires nantais mis en accusation sous Robespierre sont acquittés tandis que Jean-Baptiste Carrier — le représentant en mission qui a procédé aux cruelles « noyades de Nantes « — est condamné à mort (16 décembre 1794). En revanche, l’épuration n’est pas appliquée pour les membres du tribunal, exception faite aux « robespierristes « avérés tel Coffinhal. Le 29 décembre 1794, la procédure du tribunal est encore modifiée, allongée. Enfin, une fois l’accusateur public Antoine Fouquier-Tinville condamné et guillotiné après plusieurs mois de procès, le 7 mai 1795, la Convention supprime le Tribunal révolutionnaire le 31 mai, transférant ses compétences aux tribunaux criminels ordinaires puis à des commissions militaires.

3   LES ROUAGES D’UNE MACHINE À EXÉCUTER

À l'origine, le tribunal extraordinaire est une institution relativement légère : un accusateur public (unique et aux pouvoirs étendus, le magistrat Antoine Fouquier-Tinville), 12 jurés, 5 juges, 2 adjoints, un greffier, 4 huissiers, un concierge et 2 garçons de bureaux. Avec la mise en place du régime de la Terreur, la multiplication des arrestations engendre un accroissement des effectifs pour juger toutes les affaires : au plus fort de l’activité du tribunal, 12 juges et 50 jurés (désignés par la Convention) sont répartis en 4 sections. Le premier président du Tribunal révolutionnaire, Montané (un modéré proche des Girondins) est limogé en août 1793, accusé de clémence lors du procès de Charlotte Corday (guillotinée le 17 juillet 1793 pour avoir assassiné Jean-Paul Marat). Son remplaçant Herman est à son tour écarté le 30 juillet 1794 (trois jours après la chute de Robespierre) au profit de Dumas.

Les dossiers d’accusation sont transmis au tribunal par les comités de gouvernement (Comité de salut public et surtout Comité de sûreté générale) ; pris en charge par les comités de surveillance, les accusés sont transférés dans des prisons — surchargées à partir du printemps 1794, ce qui expliquerait pour partie la justice expéditive et radicale de la Grande Terreur, hantée par le spectre d'un complot dans les prisons.

L’accroissement des effectifs va de pair avec le durcissement des verdicts : à partir d'octobre 1793, les condamnations deviennent plus nombreuses que les acquittements — dont le plus retentissant reste celui de Jean-Paul Marat, le 24 avril 1793. Certains accusés sont écartés des débats, à commencer par Georges Danton (qui passe à la guillotine le 5 avril 1794), pour « résistance et insulte à la justice nationale «. Avec la loi du 22 prairial an II (10 juin 1794), le Tribunal révolutionnaire devient de fait une machine à exécuter : 1 376 exécutions ont lieu entre le 10 juin et le 24 juillet 1794.

Institution caractéristique de la période la plus radicale de la Révolution française, le Tribunal révolutionnaire évolue par soubresauts dans la tourmente de la Terreur. L’arrestation et la condamnation de « la hache de la Révolution «, l’accusateur public Fouquier-Tinville, annonce la déliquescence de l’institution. Le Tribunal révolutionnaire — dont le bilan est de 2 585 condamnations à mort pour 1 306 acquittements — est supprimé le 12 prairial an III (31 mai 1795).

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