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Vidocq, Mémoires (extrait)

Publié le 09/02/2013

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Publiées en 1828, les Mémoires du forçat et aventurier Vidocq, devenu chef de la police de sûreté, sont devenues mythiques. Plus que par son style, c'est surtout l'étonnante figure de l'auteur qui retient l'attention. La duplicité et l'ingéniosité de ce personnage contradictoire et légendaire, qui se joue de tout et réalise toujours l'impossible, se retrouvent dans ce récit d'une de ses multiples évasions.

Mémoires, de François Eugène Vidocq (extrait : Vidocq rapportant une de ses évasions)

 

L'évasion de Duhamel et de Sallambier fit grand bruit dans la prison et même dans la ville. On en trouvait les circonstances tout à fait extraordinaires ; mais ce que le concierge y voyait de plus surprenant, c'est que je n'eusse pas été de la partie. Il fallait cependant réparer le dégât : des ouvriers arrivèrent, et l'on posa au bas de l'escalier de la tour un factionnaire, avec ordre de ne laisser passer qui que ce fût. L'idée me vint de violer adroitement la consigne, et de sortir par cette même brèche qui aurait dû servir à ma fuite.

 

 

Francine, qui venait me voir tous les jours, m'apporte trois aunes de ruban tricolore, que je l'envoie chercher tout exprès. D'un morceau, je me fais une ceinture, je garnis mon chapeau du reste, et je passe, ainsi affublé, devant le factionnaire, qui, me prenant pour un officier municipal, me présente les armes. Je monte rapidement les escaliers ; arrivé à l'ouverture, je la trouve gardée par deux factionnaires placés, l'un dans le grenier de l'hôtel de Ville, l'autre dans le corridor de la prison. Je dis à ce dernier qu'il est impossible qu'un homme ait pu passer par cette ouverture ! il me soutient le contraire ; et, comme si je lui eusse donné le mot, son camarade ajoute que j'y passerais tout habillé. Je témoigne le désir d'essayer ; je me glisse dans l'ouverture, et me voilà dans le grenier. Feignant de m'être blessé au passage, je dis à mes deux hommes que, puisque je suis de ce côté, je vais descendre tout de suite à mon cabinet. « En ce cas, répond celui qui se trouvait dans le grenier, attendez que je vous ouvre la porte. « Il tourne en effet la clef dans la serrure ; en deux sauts je franchis les escaliers de l'hôtel de Ville, et je suis dans la rue, encore décoré de mes rubans tricolores, qui m'eussent fait arrêter de nouveau, si le jour n'eût pas été à son déclin.

 

 

Source : Vidocq (François Eugène), Mémoires, Paris, Presses de la Renaissance, 1976.

 

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