1998 : La fabuleuse Coupe du monde

Mais ce mauvais départ allait être bientôt oublié, balayé par la performance des Bleus. C’est une équipe soudée, talentueuse, volontaire, riche de ses individualités mais toujours solidaire, qui se révélait au fur et à mesure de la compétition. Aux doutes et aux sarcasmes succédait une admiration grandissante. La cabale conduite par /’Equipe depuis des mois contre Aimé Jacquet apparaissait alors comme une faute grossière et scandaleuse, fruit de la propension hexagonale, mais aussi médiatico-parisienne à la polémique et à la critique systématique, mais conséquence aussi de l’incompétence professionnelle.

L’équipe nationale poursuit ainsi sa route glorieuse, offrant aux Français ébahis la finale dont ils rêvaient, bousculant enfin le légendaire Brésil pour entrer à son tour dans l’Histoire. Mais cette histoire, ne nous y trompons pas, n’est pas seulement celle du sport. C’est celle de tout un peuple qui, tout à coup, retrouvait sa fierté oubliée, rejetait ses vieux démons, renouait avec lui-même.

Persuadés depuis des années que c’est mieux « ailleurs » et que « c’était mieux avant », les Français savent désormais que la vie peut être belle ici et maintenant. Ceux qui ont comparé l’explosion de joie du 12 juillet à celle de la Libération, un demi-siècle plus tôt, n’ont pas tort, même si les deux événements ne sont pas de même nature. C’est bien d’une libération de la société et de ses forces cachées qu’il s’agissait, au terme d’une période de crise économique, morale, sociale et politique très dure à vivre pour les Français.

Il reste à souhaiter que la belle page d’histoire sportive et sociale écrite en juillet ne sera pas oubliée ou remise en cause par les forces du mal qui rôdent toujours dans le pays. Les membres du « front du refus » préfèrent l’individu au groupe, le passé à l’avenir, la conservation à l’innovation, le Français à l’étranger. Mais il aura demain plus de difficulté à se faire entendre et à convaincre.

Il est des années dont on peut penser sans exagérer qu’elles sont historiques. C’est le cas de 1998, marquée par plusieurs événements majeurs. La reprise économique, amorcée l’année précédente, est enfin apparue aux Français après une attente longtemps déçue. Avec elle s’est confirmée la décrue tant attendue du chômage, condition essentielle à un retour de l’optimisme et de la confiance.

La conjonction de ces éléments permettait dès le début de l’année de constater une amélioration du climat social. Mais celui-ci restait fragile, soumis à la moindre mauvaise nouvelle venant de l’intérieur ou de l’extérieur.

Il fallait autre chose pour qu’une « reprise morale » accompagne celle de l’économie. Ce fut bien sûr la Coupe du monde de football. Une histoire fabuleuse à plus d’un titre.