Devoir de Philosophie

ANALYSE DE L'OEUVRE DE RESTIF DE LA BRETONNE

Publié le 17/05/2011

Extrait du document

restif

Restif de la Bretonne est né en 1734 à Sacy, dans l'Yonne. Ses premières années sont celles d'un jeune paysan. En 1751, il entre comme apprenti chez un imprimeur d'Auxerre. C'est un excellent ouvrier typographe, très conscient de sa valeur. Dans l'exercice même de son travail, l'idée lui vient d'écrire ; c'est un écrivain d'une fécondité exceptionnelle. Les désordres de sa vie et son manque de discipline intellectuelle lui ont interdit de rester comme un des grands esprits de son siècle ; il faut aujourd'hui lui rendre sa juste place. Déjà vieillard, il prend parti pour la Révolution, mais semble s'effrayer assez vite. Cependant, nous manquons de travaux sur cette période de sa vie. Il meurt à Paris, misérable, en 1806. Ses oeuvres les plus marquantes sont des projets de réforme morale et sociale : Le Thesmographe, Le Pornographe, La Découverte australe, des oeuvres autobiographiques : La Vie de mon père, des romans : Le Ménage parisien, Le Paysan perverti, Ingénue Saxancour. Restif est également l'auteur d'un théâtre. mais illisible.

restif

« « Il faudrait que l'Administration...

donnât une attention particulière à la première et à la dernière classe, pourempêcher l'excès de voracité d'un côté, l'absolu dénuement et le manque de subsistance de l'autre » (L'Ecole despères, III, p.

342). Les deux classes s'opposent dans un mouvement qui les fait se constituer avec plus de cohérence nous voyonsnaître ce qui va devenir le prolétariat urbain, la classe ouvrière du XIXe siècle.

C'est ce que Restif voit et décrit,mais ne comprend pas : « Dans tous les endroits », écrit-il dans Les Contemporaines, « où des êtres humains, mâles ou femelles, sontrassemblés en grand nombre pour travailler, ils se corrompent, surtout lorsque la profession qu'Ils exercent leurpermet de se parler beaucoup.

Tous les compagnons réunis nécessairement...

valent beaucoup moins que s'ilsvivaient et travaillaient en particulier...

tous ces gens-là prennent ensemble un esprit d'insouciance et.

delibertinage ; au lieu que l'ouvrier qui travaille chez lui, à côté de sa femme, au sein de sa famille, est plus citoyen,meilleur époux, meilleur père, plus laborieux.

» Restif voit le phénomène de concentration du monde du travail ; les rapports sociaux se modifient : des idées et descomportements nouveaux apparaissent chez les travailleurs.

Mais Restif ne situe pas ces faits dans le cours del'évolution historique de l'humanité sociale.

Au lieu de regarder en avant, il se tourne vers un passé révolu et enappelle à la technique artisanale contre le développement des richesses et de l'industrie.

Il cherche aveuglément unrefuge dans la Vertu ! A aucun moment, Restif n'a su dépasser cette contradiction, qui est plus généralement cellede son époque. II Les intuitions et les incompréhensions de Restif sont le résultat d'une expérience vécue.

S'il est vrai que sa penséeapparaît souvent délirante (ses nombreux projets de réforme de la société sont assez extravagants) , il fautsouligner que le noyau de sa « philosophie » est en prise sur la réalité et que, en dépit même des aberrationssignalées, il répugne aux spéculations abstraites.Restif quitte Sacy pour Auxerre en 1751 ; quatre ans plus tard, il vient à Paris.

Ce passage du village bourguignon àla capitale a une importance décisive ; il est à l'origine de la formation d'un véritable mythe de la campagne, quidomine toute l'oeuvre de Restif.

La communauté rurale semble atteindre son point d'équilibre le plus parfait vers lemilieu du siècle ; c'est à ce moment-là que le jeune homme (il a 17 ans) doit s'en séparer il garde le souvenir de sa «perfection », et les années passant, ce souvenir se déforme et embellit la réalité.

La Vie de mon père (1779) est untableau riche et passionnant de la vie à Sacy pendant la jeunesse de Restif.

Il décrit une société placée sous ledouble signe spirituel de Dieu et temporel du père ; une stricte hiérarchie y est établie, et chacun s'y conforme.L'ordonnance parfaite de l'ensemble assure à l'individu sa sécurité.

L'Eglise est au centre de la vie commune, et lesrites ont pour fonction profonde d'unifier ; il s'agit d'une magie, ou d'une mystique, d'un pouvoir ancestral,traditionnel, et les coutumes ont gardé leur caractère sacré.

Sans doute la vié est-elle rude, mais l'individu neconnaît pas la solitude, il peut être vraiment fraternel : « Les habitants du même Bourg, ceux avec qui, chaque dimanche, on se trouve réunis, comme une seule famille,dans la maison d'actions de grâces I avec qui l'on mange un pain que le Ministre de Dieu a béni, et qui est distribuéen signe de communion et de fraternité ! » (La Vie de mon père, I, p.

39). Auxerre, Paris — la ville apparaît à Restif comme le contraire absolu du village.

Le paysan est arraché à sa terrenourricière originelle ; il est déraciné ; un sol nouveau lui est offert, mais dont la nourriture ne lui convient pas ; «transplanté », il végète.

Au village, le groupe humain, très cohérent, était un organisme vivant et fort ; à la ville,l'individu est seul, et il doit se défendre seul, n'ayant aucune possibilité de s'appuyer sur une collectivité.

Chacunest condamné à aller à la dérive, désespérément, et la ville représente la perversion inévitable.Apprenti, Restif a dû subir les brimades d'individus grossiers, les humiliations, les outrages : à Paris, il retrouved'anciens compagnons de Bourgogne : ils vivent ensemble, essayant de faire face à un milieu hostile où ils sontseuls.

Cette situation nouvelle crée un véritable traumatisme, que Restif a traduit, dans toute son oeuvre, entermes moraux ; la campagne devient le Bien, la ville le Mal.

Ce qui est très remarquable, c'est qu'on ne sauraittrouver chez Restif une nature éternelle et un homme naturel, « à l'état de nature ».

S'il y a un mythe de lacampagne, il est enraciné dans un moment précis de l'Histoire ; il se forge dans la confrontation vécue de deuxréalités présentes.

En quelque sorte, le mythe double la réalité sans jamais s'en séparer ni s'en éloigner vraiment ;ainsi à la lecture, nous découvrons une analyse extrêmement précise et vivante de la communauté rurale, quiconstitue un document historique, et en même temps cette communauté est magnifiée par le souvenir et parl'affrontement avec la ville concrète et la condition ouvrière, elles aussi décrites méticuleusement.

Sans cesse noussommes renvoyés de la ville à la campagne et de la campagne à la ville, qui ne se comprennent que l'une par l'autre; et au centre de cette confrontation, se trouve l'individu Restif.

dont la personnalité se constitue dans cetteperpétuelle opposition Ce qui nous semble faire la valeur de Monsieur Nicolas, c'est cette rencontre d'une réalité,. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles