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Expliquer ces vers de la Fable : Les Lapins de La Fontaine

Publié le 09/02/2012

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fable

A l'heure de l'affût, soit lorsque la lumière  Précipite ses traits dans l'humide séjour, Soit lorsque le soleil rentre dans sa carrière, Et que, n'étant plus nuit, il n'est pas encor jour, Au bord de quelque bois sur un arbre je grimpe, Et, nouveau Jupiter, du haut de cet Olympe,                Je foudroie, à discrétion,                Un lapin qui n'y pensait guère. Je vois fuir aussitôt toute la nation                 Des lapins, qui, sur la bruyère,                L'œil éveillé, l'oreille au guet, S'égayaient, et de thym parfumaient leur banquet.                Le bruit du coup fait que la bande                S'en va chercher sa sûreté                Dans la souterraine cité : Mais le danger s'oublie, et cette peur si grande S'évanouit bientôt.  Je revois les lapins, Plus gais qu'auparavant, revenir sous mes mains.  Ne reconnaît-on pas en cela les humains ?                 Dispersés par quelque orage,                A peine ils touchent le port                Qu'ils vont hasarder encor                Même vent, même naufrage ;

INTRODUCTION. - On a pu comparer la morale des Fables à celle des Maximes. La Fontaine semble y inviter en se donnant pour admirateur et disciple de La Rochefoucauld. Au Livre I, il loue délicatement son maitre et protecteur (l'Homme et son image); au Livre X, il lui dédie un long discours, dont ces vers forment la partie la plus attrayante, et qui se termine ainsi :

Permettez-moi du moins d'apprendre â tout le monde

Que vous m'avez donné le sujet de ces vers.

fable

« funèbre d'un ami soudainement emporté connait les excès qui l'ont conduit ar~nt l'heure au tombeau.

Demain il aura oublié, il se livrera aux mêmes tqrpitudes.

· Quiconque a vécu au front pendant la guerre a pu observer ce phéno­ mène.

Aulendemain des plus sanglantes attaques, lorsque les troupes com­ battantes étaient ramenées en arrière, on n'eût point dit, à voir Hmr joyeuse insouciance, que ces hommes venaient de contempler des scènes d'hor­ reur, d'assister à la mort de compagnons très chers.

L'arrière, c'était la jo •.

: momentanée des misères et des privations, la soupe chaude, le « pinard» •.

'volonté; ce n'était .pas la vie rêvée, mais c'était la vie.

·· Et si nous généralisons, le monde, à peine sorti de l'immense, de l'épou­ vantable cataclysme, semble-t-il assagi? Les peuples ont-ils compris les le~ons de la guerre? Certains, s'ils en avaient la possibilité, ne se jette­ raient-ils pas encore dans une pareille aventure, sacrifiant des milliers, voire des millions de vies humrunes, pour des moti,fs inavouables? •..

Le mépris du danger n'est pas toujours insouciance et ne s'accompagne pas nécessairement de l'espoir d'une jouissance quelconque; Il peut avoir ile nobles causes.

La soif du dévouement, le patriotisme, la poursuite d'un haut idéal, le sentiment religieux poussent parfois à affronter une mort certaine ou probable ..• Mais bornons-nous à cette remarque, sous peine de nous écarter de notre sujet.

LA coMPOSITION.- Nous connaissons le dessein du fabuliste; examinons comment il le réalise.

Selon son mode accoutumé, il nous présente une abstraction sous la forme concrète d'un récit vivant et dramatique.

En quatre vers il détermine le moment; il s'y attarde un peu, en artiste.

Cette scène gagne, en èffet, à être éclairée des derniers rayons du couchant ou des premières lueurs de l'aube.

L'heure de l'affût est délicieuse entre toutes.

· Un hémistiche, par contre, lui suffit à situer l'action, Au bord de quelque bois.

L'imagination du lecteur a vite reconstitué ce décor familier : une garenne en bordure de la f~êt.

Aux acteurs maintenant.

La 'Fontaine lui-même, d'abord : Sur un arbre je grimpe.

Il se compare à Jupitèr, puis, sitôt lâché son coup de fusil, se retire dans la pénombre de son embuscade, pour mieux fixer nos regards sur ce gracieux tableau: la nation des lapins ••• Le pauvre Jeannot qui n'y pensait guère est foudroyé; il git, baigné dans son sang, sur la bruyère .Pù, tout à l'heure, .l'œil .éveillé, l'oreille au guet, il s'égayait, et de thym .p,arfumait son.

bi:uzquet.

--,.- Au bruit du coup, , ses frères terrifiés détalent a'u ~al op.

Avec le meurtrier nous nous amusons --,..- non sans une certaine 'pitie - de la fuite éperdue de ces petits derrières blancs regagnant leur ·~J.outerraine cité.

Mais le 'danger vite s'oublie.

Nos lapins, plus gais qu'au­ 'paravant- à la joie de vivre s'ajoute celle d'avoir echappé à la mort - s'en viennent continuer.

le banquet interrompu - le banquet de la vie - et gambader à qui mieux.

mieux à l'entour du cadavre, sous l'œil du chas­ seur, à portée de fusil, jusque sous ses mains ...

Et le moraliste de conclure : Ne reconnatt-on pas en cela les humains? De cette rapide étude, nous pouvons tirer une l>remière conclusion : ce récit est parfaitement composé.

Les diverses parties s'y équilibrent sa­ .:vam10ent, s'y enchaînent logiquement.

La fantaisie n'y nuit point à la ·.raison.

Ce tableau --,.- car.

c'en est un aussi- est harmonieusement ordonné.

Le cadre d'arbres et de bruyères, l'homme qui tue,' et pour cela se dissi­ .mule .dans .la feuillée, n'accaparent pas notre attention; elle est toute con­ ,centrée sur les acteurs principaux, placés au centre, en bonne lumière.

LES MOTS.

LEs EXPRESSIONS.

- L'explication des mots, des expressions, des tournures remarquables, de quelques vers particulièrement· heureux, ·,nous aidera à mieux goûter encore le charme de cette fable .

.

.

Lorsque la lumière.

précipite ses traits dans l'humidè séjour ...

Voici une ·.description poétique.

et réaliste du couchant.

Sans doute.

la "Périphrase l'humide séjour qui désigne la mer nous parait· aujourd'hui bien usée, mais La Fontaine.

a ..

observé exactement ce qui .

se passe quand le soleil -décline à l'horizon.

Sa marche semble alors se précipiter, et souvent aussi. »

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