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Andromaque O Dieux !

Publié le 12/04/2014

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Andromaque O Dieux ! Qui l'aurait cru, Madame ? C'est le Roi ! HERMIONE. Ah ! Cours après Oreste ; et dis-lui, ma Cléone, Qu'il n'entreprenne rien sans revoir Hermione. SCENE VPYRRHUS, HERMIONE, PHOENIX. PYRRHUS. Vous ne m'attendiez pas, Madame ; et je vois bien Que mon abord ici trouble votre entretien. Je ne viens point, armé d'un indigne artifice, D'un voile d'équité couvrir mon injustice ; Il suffit que mon coeur me condamne tout bas ; Et je soutiendrais mal ce que je ne crois pas. J'épouse une Troyenne. Oui, Madame, et j'avoue Que je vous ai promis la foi que je lui voue. Un autre vous dirait que dans les champs troyens Nos deux pères sans nous formèrent ces liens, Et que, sans consulter ni mon choix ni le vôtre, Nous fûmes sans amour engagés l'un à l'autre ; Mais c'est assez pour moi que je me sois soumis. Par mes ambassadeurs mon coeur vous fut promis ; Loin de les révoquer, je voulus y souscrire. Je vous vis avec eux arriver en Épire ; Et quoique d'un autre oeil l'éclat victorieux Eût déjà prévenu le pouvoir de vos yeux, Je ne m'arrêtai point à cette ardeur nouvelle : Je voulus m'obstiner à vous être fidèle, Je vous reçus en reine ; et jusques à ce jour J'ai cru que mes serments me tiendraient lieu d'amour. Mais cet amour l'emporte ; et, par un coup funeste, Andromaque m'arrache un coeur qu'elle déteste. L'un par l'autre entraînés, nous courons à l'autel Nous jurer, malgré nous, un amour immortel. Après cela, Madame, éclatez contre un traître, Qui l'est avec douleur, et qui pourtant veut l'être. Pour moi, loin de contraindre un si juste courroux, Il me soulagera peut-être autant que vous. SCENE VPYRRHUS, HERMIONE, PHOENIX. 49 Andromaque Donnez-moi tous les noms destinés aux parjures : Je crains votre silence, et non pas vos injures Et mon coeur, soulevant mille secrets témoins, M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins. HERMIONE. Seigneur, dans cet aveu dépouillé d'artifice, J'aime à voir que du moins vous vous rendiez justice, Et que, voulant bien rompre un noeud si solennel, Vous vous abandonniez au crime en criminel. Est-il juste, après tout, qu'un conquérant s'abaisse Sous la servile loi de garder sa promesse ? Non, non, la perfidie a de quoi vous tenter, Et vous ne me cherchez que pour vous en vanter. Quoi ! Sans que ni serment ni devoir vous retienne, Rechercher une Grecque, amant d'une Troyenne ? Me quitter, me reprendre, et retourner encor De la fille d'Hélène à la veuve d'Hector ? Couronner tout à tour l'esclave et la princesse ; Immoler Troie aux Grecs, au fils d'Hector la Grèce ? Tout cela part d'un coeur toujours maître de soi, D'un héros qui n'est point esclave de sa foi. Pour plaire à votre épouse, il vous faudrait peut-être Prodiguer les doux noms de parjure et de traître. Vous veniez de mon front observer la pâleur, Pour aller dans ses bras rire de ma douleur. Pleurante après son char vous voulez qu'on me voie ; Mais, Seigneur, en un jour ce serait trop de joie ; Et sans chercher ailleurs des titres empruntés Ne vous suffit-il pas de ceux que vous portez ? Du vieux père d'Hector la valeur abattue Aux pieds de sa famille expirante à sa vue, Tandis que dans son sein votre bras enfoncé Cherche un reste de sang que l'âge avait glacé ; Dans des ruisseaux de sang Troie ardente plongée ; De votre propre main Polyxène égorgée Aux yeux de tous les Grecs indignés contre vous : Que peut-on refuser à ces généreux coups ? PYRRHUS. Madame, je sais trop à quel excès de rage La vengeance d'Hélène emporta mon courage. Je puis me plaindre à vous du sang que j'ai versé ; Mais enfin je consens d'oublier le passé. Je rends grâces au Ciel que votre indifférence De mes heureux soupirs m'apprenne l'innocence. Mon coeur, je le vois bien, trop prompt à se gêner, SCENE VPYRRHUS, HERMIONE, PHOENIX. 50
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« Donnez-moi tous les noms destinés aux parjures : Je crains votre silence, et non pas vos injures Et mon coeur, soulevant mille secrets témoins, M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins.

HERMIONE.

Seigneur, dans cet aveu dépouillé d'artifice, J'aime à voir que du moins vous vous rendiez justice, Et que, voulant bien rompre un noeud si solennel, Vous vous abandonniez au crime en criminel.

Est-il juste, après tout, qu'un conquérant s'abaisse Sous la servile loi de garder sa promesse ? Non, non, la perfidie a de quoi vous tenter, Et vous ne me cherchez que pour vous en vanter.

Quoi ! Sans que ni serment ni devoir vous retienne, Rechercher une Grecque, amant d'une Troyenne ? Me quitter, me reprendre, et retourner encor De la fille d'Hélène à la veuve d'Hector ? Couronner tout à tour l'esclave et la princesse ; Immoler Troie aux Grecs, au fils d'Hector la Grèce ? Tout cela part d'un coeur toujours maître de soi, D'un héros qui n'est point esclave de sa foi.

Pour plaire à votre épouse, il vous faudrait peut-être Prodiguer les doux noms de parjure et de traître.

Vous veniez de mon front observer la pâleur, Pour aller dans ses bras rire de ma douleur.

Pleurante après son char vous voulez qu'on me voie ; Mais, Seigneur, en un jour ce serait trop de joie ; Et sans chercher ailleurs des titres empruntés Ne vous suffit-il pas de ceux que vous portez ? Du vieux père d'Hector la valeur abattue Aux pieds de sa famille expirante à sa vue, Tandis que dans son sein votre bras enfoncé Cherche un reste de sang que l'âge avait glacé ; Dans des ruisseaux de sang Troie ardente plongée ; De votre propre main Polyxène égorgée Aux yeux de tous les Grecs indignés contre vous : Que peut-on refuser à ces généreux coups ? PYRRHUS.

Madame, je sais trop à quel excès de rage La vengeance d'Hélène emporta mon courage.

Je puis me plaindre à vous du sang que j'ai versé ; Mais enfin je consens d'oublier le passé.

Je rends grâces au Ciel que votre indifférence De mes heureux soupirs m'apprenne l'innocence.

Mon coeur, je le vois bien, trop prompt à se gêner, Andromaque SCENE V\24PYRRHUS, HERMIONE, PHOENIX.

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