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CASANOVA : Histoire de ma vie

Publié le 18/07/2012

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casanova

 

Je suis arrivé à Ancône le 25 de février de l'an 1744 au

commencement de la nuit à la meilleure auberge de la ville.

Content de ma chambre, je dis à l'hôte que je voulais manger

gras. Il me répond qu'en carême, les chrétiens mangent

maigre. Je lui dis que le pape m'a donné la permission de

manger gras; il me dit de la lui montrer; je lui réponds qu'il

me l'a donnée de bouche ; il ne veut pas me croire ; je l'appelle

sot; il m'intime d'aller me loger aîlleurs; et cette dernière

raison de l'hôte, à laquelle je ne m'attendais pas, m'étonne.

Je jure, je peste; et voilà un grave personnage qui sort d'une

chambre me disant que j'avais tort de vouloir manger gras,

tandis que dans Ancône le maigre était meilleur ; que j'avais

tort de vouloir obliger l'hôte à croire sur ma parole que j'en

avais la permission; que j'avais tort, si je l'avais, de l'avoir

demandée à mon âge ; que j'avais tort de ne l'avoir pas prise

par écrit; que j'avais tort d'avoir donné à l'hôte le surnom de

sot, puisqu'il était le maître de ne pas vouloir me loger; et

qu'enfin j'avais tort de faire tant de bruit.

casanova

« ger à me dire son nom, je lui dis le mien en me qualifiant de secrétaire du cardinal Acquaviva.

- Je m'appelle, me dit-il, Sancio Pico, je suis castillan, et provéditeur de l'arméedes S.M.e., dont le comte de Gages a le commandement sous les ordres du généralissime duc de Modène.

Ayant admiré l'appétit avec lequel j'ai mangé tout ce qu'on m'a servi, il me demanda si j'avais dîné ; et il me parut content quand je lui ai dit que non.

- Votre souper, me dit-il, vous fera-t-il du mal? J'ai lieu d'espérer qu'au contraire il me fera du bien.

Vous avez donc trompé le pape.

Venez avec moi dans la chambre ici près.

Vous aurez le plaisir d'entendre une bonne musique.

La première actrice y loge.

Le mot d'actrice m'intéresse; et je le suis.

Je vois assise à une table une femme en âge qui soupait avec deux jeunes filles, et deux jolis gàrçons.

Je cherche en vain l'actrice.

D.

Sancio · me la présente dans un de ces garçons, joli à ravir, qui ne pouvait avoir que seize à dix-sept ans.

Je pense d'abord que c'était le castrato qui avait joué le rôle de première actrice· sur le théâtre d'Ancône, sujet aux mêmes lois qu'à Rome.

La mère me présente son autre fils, joli aussi, mais non pas castrato, qui s'appelait Pétrone et qui avait représenté la première dan­ seuse, et ses deux filles dont l'aînée, qui s'appelait Cécile, apprenait la musique, et avait douze ans ; l'autre qui était danseuse en avait onze, et elle s'appelait Marine ; toutes les deux jolies.

Cette famille était de Bologne, et se soutenait par ses talents.

La complaisance et la gaieté suppléaient à la pau­ vreté.

En se levant de table, Bellino, c'était le nom du castrato première actrice, à l'instance de D.

Sancio, se mettant au clavecin, s'accompagna un air avec une voix d'ange, et des grâces enchanteresses.

L'Espagnol, qui écoutait tenant les yeux fermés, me semblait en extase.

Moi, bien loin de tenir les yeux fermés, j'admirais ceux de Bellino, qui noirs comme des escarboucles jetaient un feu qui me brûlait l'âme.

Cet être avait plusieurs traits de D.

Lucrezia, et des manières de la marquise G.

Son visage me paraissait féminin.

Son habit d'homme n'empêchait pas qu'on ne vît le relief de sa gorge, ce qui fit que, malgré l'annonce, je me suis mis dans la tête que ce devait être une fille.

Dans cette certitude, je n'ai point du tout résisté aux désirs qu'il m'inspira.

Après avoir passé deux heures agréablement, D.

Sancio, m'accompagnant à ma chambre, me dit qu'il partait de grand. »

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