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De la coquetterie. Fénelon

Publié le 01/05/2011

Extrait du document

Ne craignez rien tant que la vanité dans les filles. Elles naissent avec un désir violent de plaire : les chemins qui conduisent les hommes à l'autorité et à la gloire leur étant fermés, elles tâchent de se dédommager par les agréments de l'esprit et du corps : de là vient leur conversation douce et insinuante; de là vient qu'elles aspirent tant à la beauté et à toutes les grâces extérieures, et qu'elles sont si passionnées pour les ajustements ; une coiffe, un bout de ruban, une boucle de cheveux plus haut ou plus bas, le choix d'une couleur, ce sont pour elles autant d'affaires importantes.... Je voudrais... faire voir aux jeunes filles la noble simplicité qui paraît dans les statues et dans les autres figures qui nous restent des femmes grecques et romaines ; elles y verraient combien des cheveux noués négligemment par derrière, et des draperies pleines et flottant à longs plis sont agréables et majestueuses. Il serait bon même qu'elles entendissent parler les peintres et les autres gens qui ont ce goût exquis de l'antiquité. Si peu que leur esprit s'élevât au-dessus de la préoccupation des modes, elles auraient bientôt un grand mépris pour leurs frisures, si éloignées du naturel, et pour les habits d'une figure trop façonnée. Je sais bien qu'il ne faut pas souhaiter qu'elles prennent l'extérieur antique ; il y aurait de l'extravagance à le vouloir; mais elles pourraient, sans aucune singularité, prendre le goût de cette simplicité d'habits si noble, si gracieuse, et d'ailleurs si convenable aux mœurs chrétiennes. Ainsi, se conformant dans l'extérieur à l'usage présent, elles sauraient au moins ce qu'il faudrait penser de cet usage; elles satisferaient à la mode comme à un£ servitude fâcheuse, et elles ne lui donneraient que ce qu'elles ne pourraient lui refuser. Faites-leur remarquer souvent, et de bonne heure, la vanité et la légèreté d'esprit qui fait l'inconstance des modes. C'est une chose bien mal entendue, par exemple, de se grossir la tête de je ne sais combien de coiffes entassées; les véritables grâces suivent la nature et ne la gênent jamais.

(De l'Éducation des filles, X.)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble. — Une page sur l'éducation. — De quel ouvrage est-elle tirée? A l'intention de qui Fénelon écrivit-il cet ouvrage? 3° Quel défaut demande-t-il que l'on combatte chez les jeunes filles? 4° Quelle qualité voudrait-il voir se développer en elles? 5° Les vues exposées par Fénelon, dans cette page, ont-elles cessé d'être exactes?

II. — L'analyse du morceau. — 1° Distinguez les différentes parties du morceau : a) La vanité chez les jeunes filles ; b) Nécessité de leur inspirer le goût de la simplicité ; c) La mode : mesure dans laquelle les jeunes filles doivent y satisfaire; 2° Quels sont les chemins fermés aux jeunes filles? Comment s'en dédommagent-elles? 3° Quels sont les effets de leur désir de plaire? 40 Quels modèles a en vue Fénelon en recommandant aux jeunes filles une noble simplicité dans leurs ajustements? 5° Quel mépris voudrait-il qu'on leur inspirât? 6° Comment veut-il qu'elles considèrent la mode? 7° D'où lui paraît provenir Y inconstance des modes?

III. — Le style; — les expressions. — 1° Quelles sont les qualités du style, dans ce morceau? (la facilité, Y aisance, la simplicité... ; le montrer par une étude attentive de quelques passages) ; 2° Dans quel but l'auteur répète-t-il l'expression : de là vient? (1er alinéa); 3° Énumérez les choses qui sont pour les jeunes filles autant d'affaires importantes. Montrez la série de contrastes qu'a voulu marquer Fénelon (une coiffe..., une affaire importante..., etc.); 4° Quelles sont les expressions par lesquelles l'auteur témoigne d'un sens exquis de l'art antique? 5° Indiquez la signification des expressions suivantes : une conversation douce et insinuante (se reporter à l'étymologie de insinuante), — une servitude fâcheuse, — l'inconstance des modes.

IV. — La grammaire. — 1° Quel est le contraire des mots coquetterie et vanité? 2° Indiquez la composition des mots inconstance et entassés (coiffes entassées); 3° A quel temps est chacun des verbes employés dans la première phrase du troisième alinéa? 4° Nombre et nature des propositions contenues dans cette même phrase

Rédaction. — Faites le portrait de la jeune fille, telle que la voudrait Fénelon.   

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