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Fénelon, Télémaque (XVII).

Publié le 23/04/2011

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« Un mal, presque incurable, est le luxe. Comme la trop grande autorité empoisonne les rois, le luxe empoisonne toute une nation. On dit que le luxe sert à nourrir les pauvres aux dépens des riches, comme si les pauvres ne pouvaient pas gagner leur vie plus utilement en multipliant les fruits de la terre, sans amollir les riches par des raffinements de volupté. Toute une nation s'accoutume à regarder comme les nécessités de la vie les choses les plus superflues : ce sont tous les jours de nouvelles nécessités qu'on invente, et on ne peut plus se passer des choses qu'on ne connaissait point trente ans auparavant. Ce luxe s'appelle bon goût, perfection des arts et politesse de la nation. Ce vice, qui en attire une infinité d'autres, est loué comme une vertu ; il répand sa contagion depuis le roi jusqu'au dernier de la lie du peuple. Les proches parents du roi veulent imiter sa magnificence ; les grands, celle des parents du roi ; les gens médiocres (1) veulent égaler les grands ; car qui est-ce qui se fait justice? Les petits veulent passer pour médiocres ; tout le monde fait plus qu'il ne peut : les uns par faste, et pour se prévaloir de leurs richesses ; les autres par mauvaise honte pour cacher leur pauvreté. Ceux mêmes qui sont assez sages pour condamner un si grand désordre ne le sont pas assez pour oser leva la tête les premiers et pour donner des exemples contraires. Toute une nation se ruine, toutes les conditions se confondent. La passion d'acquérir du bien pour soutenir une vaine dépense corrompt les âmes les plus pures : il n'est plus question que d'être riche ; la pauvreté est une infamie. Soyez savant, habile, vertueux ; instruisez les hommes, gagnez des batailles, sauvez la patrie, sacrifiez tous vos intérêts : vous êtes méprisé, si vos talents ne sont pas relevés parle faste. Ceux mêmes qui n'ont pas de bien veulent paraître en avoir ; ils en dépensent comme s'ils en avaient : on emprunte, on trompe, on use de mille artifices indignes pour parvenir. Mais qui remédiera à ces maux? Il faut changer le goût et les habitudes de toute une nation : il faut lui donner de nouvelles lois. Qui le pourra entreprendre, si ce n'est un roi philosophe qui sache, par l'exemple de sa propre modération, faire honte à tous ceux qui aiment une dépense fastueuse, et encourager les sages, qui seront bien aises d'être autorisés dans une honnête frugalité ? «    Fénelon, Télémaque (XVII).    Vous ferez, à votre gré, le résumé ou l'analyse de ce texte. Puis vous y choisirez un problème qui vous intéresse particulièrement, en préciserez les données et exposerez, en les justifiant, vos propres vues sur la question.      (1) Médiocre s (étymologiquement) qui se situe dans la moyenne.

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