Devoir de Philosophie

Han d'Islande --Nous verrons, dit le brigand.

Publié le 12/04/2014

Extrait du document

Han d'Islande --Nous verrons, dit le brigand. --Allons, dit le bourreau, je ne suis pas venu ici pour t'entretenir de ton esprit, mais seulement de ton corps. Écoute-moi!--Ton cadavre m'appartient de droit après ta mort; cependant la loi te laisse la faculté de me le vendre; dis-moi donc ce que tu en veux. --Ce que je veux de mon cadavre? dit le brigand. --Oui, et sois consciencieux. Han d'Islande s'adressa au guichetier: --Dis-moi, camarade, combien veux-tu me vendre une botte de paille et un peu de feu? Le guichetier resta un moment rêveur: --Deux ducats d'or, répondit-il. --Eh bien, dit le brigand au bourreau, tu me donneras deux ducats d'or de mon cadavre. --Deux ducats d'or! s'écria le bourreau. Cela est horriblement cher. Deux ducats d'or un méchant cadavre! Non, certes! je n'en donnerai pas ce prix. --Alors, répondit tranquillement le monstre, tu ne l'auras pas! --Tu seras jeté à la voirie, au lieu d'orner le musée royal de Copenhague ou le cabinet de curiosités de Berghen. --Que m'importe? --Longtemps après ta mort, on viendrait en foule examiner ton squelette, en disant: Ce sont les restes du fameux Han d'Islande! on polirait tes os avec soin, on les rattacherait avec des chevilles de cuivre; on te placerait sous une grande cage de verre, dont on aurait soin chaque jour d'enlever la poussière. Au lieu de ces honneurs, songe à ce qui t'attend, si tu ne veux pas me vendre ton cadavre; on t'abandonnera à la pourriture dans quelque charnier, où tu seras à la fois la pâture des vers et la proie des vautours. --Eh bien! je ressemblerai aux vivants qui sont sans cesse rongés par les petits et dévorés par les grands. --Deux ducats d'or! répétait le bourreau entre ses dents; quelle prétention exorbitante! Si tu ne modères ton prix, mon cher Han d'Islande, nous ne pourrons traiter ensemble. --C'est la première et probablement la dernière vente que je ferai de ma vie; je tiens à faire un marché avantageux. --Songe que je puis te faire repentir de ton opiniâtreté. Demain tu seras en ma puissance. --Crois-tu? Ces mots étaient prononcés avec une expression qui échappa au bourreau. XLIX 240 Han d'Islande --Oui, et il y a une manière de serrer le noeud coulant.... tandis que, si tu deviens raisonnable, je te pendrai mieux. --Peu m'importe ce que tu feras demain de mon cou! répondit le monstre d'un air railleur. --Allons, ne pourrais-tu te contenter de deux écus royaux? Qu'en feras-tu? --Adresse-toi à ton camarade, dit le brigand en montrant le guichetier; il me demande deux ducats d'or pour un peu de paille et de feu. --Aussi, dit le bourreau, apostrophant le guichetier avec humeur, par la scie de saint Joseph! il est révoltant de faire payer du feu et de la méchante paille au poids de l'or. Deux ducats! Le guichetier répliqua aigrement: --Je suis bien bon de n'en pas exiger quatre!--C'est vous, maître Nychol, qui êtes aussi arabe que le chiffre 2, de refuser à ce pauvre prisonnier deux ducats d'or de son cadavre, que vous pourrez vendre au moins vingt ducats à quelque savant ou à quelque médecin. --Je n'ai jamais payé un cadavre plus de quinze ascalins, dit le bourreau. --Oui, repartit le guichetier, le cadavre d'un mauvais voleur ou d'un misérable juif, cela peut-être; mais chacun sait que vous tirerez ce que vous voudrez du corps de Han d'Islande. Han d'Islande hocha la tête. --De quoi vous mêlez-vous? dit Orugix brusquement; est-ce que je m'occupe, moi, de vos rapines, des vêtements, des bijoux que vous volez aux prisonniers, de l'eau sale que vous versez dans leur maigre bouillon, des tourments que vous leur faites éprouver pour tirer d'eux de l'argent?--Non! je ne donnerai point deux ducats d'or. --Point de paille et point de feu, à moins de deux ducats d'or, répondit l'obstiné guichetier. --Point de cadavre à moins de deux ducats d'or, répéta le brigand immobile. Le bourreau, après un moment de silence, frappa la terre du pied: --Allons, le temps me presse. Je suis appelé ailleurs. Il tira de sa veste un sac de cuir qu'il ouvrit lentement et comme à regret. --Tiens, maudit démon d'Islande, voilà tes deux ducats. Satan ne donnerait certes pas de ton âme ce que je donne de ton corps. Le brigand reçut les deux pièces d'or. Aussitôt le guichetier avança la main pour les reprendre. --Un instant, compagnon, donne-moi d'abord ce que je t'ai demandé. Le guichetier sortit, et revint un moment après, apportant une botte de paille fraîche et un réchaud plein de charbons ardents, qu'il plaça près du condamné. --C'est cela, dit le brigand en lui remettant les deux ducats, je me chaufferai cette nuit.--Encore un mot, ajouta-t-il d'une voix sinistre:--Le cachot ne touche-t-il pas à la caserne des arquebusiers de Munckholm? XLIX 241

« —Oui, et il y a une manière de serrer le noeud coulant....

tandis que, si tu deviens raisonnable, je te pendrai mieux. —Peu m'importe ce que tu feras demain de mon cou! répondit le monstre d'un air railleur. —Allons, ne pourrais-tu te contenter de deux écus royaux? Qu'en feras-tu? —Adresse-toi à ton camarade, dit le brigand en montrant le guichetier; il me demande deux ducats d'or pour un peu de paille et de feu. —Aussi, dit le bourreau, apostrophant le guichetier avec humeur, par la scie de saint Joseph! il est révoltant de faire payer du feu et de la méchante paille au poids de l'or.

Deux ducats! Le guichetier répliqua aigrement: —Je suis bien bon de n'en pas exiger quatre!—C'est vous, maître Nychol, qui êtes aussi arabe que le chiffre 2, de refuser à ce pauvre prisonnier deux ducats d'or de son cadavre, que vous pourrez vendre au moins vingt ducats à quelque savant ou à quelque médecin. —Je n'ai jamais payé un cadavre plus de quinze ascalins, dit le bourreau. —Oui, repartit le guichetier, le cadavre d'un mauvais voleur ou d'un misérable juif, cela peut-être; mais chacun sait que vous tirerez ce que vous voudrez du corps de Han d'Islande. Han d'Islande hocha la tête. —De quoi vous mêlez-vous? dit Orugix brusquement; est-ce que je m'occupe, moi, de vos rapines, des vêtements, des bijoux que vous volez aux prisonniers, de l'eau sale que vous versez dans leur maigre bouillon, des tourments que vous leur faites éprouver pour tirer d'eux de l'argent?—Non! je ne donnerai point deux ducats d'or. —Point de paille et point de feu, à moins de deux ducats d'or, répondit l'obstiné guichetier. —Point de cadavre à moins de deux ducats d'or, répéta le brigand immobile. Le bourreau, après un moment de silence, frappa la terre du pied: —Allons, le temps me presse.

Je suis appelé ailleurs.

Il tira de sa veste un sac de cuir qu'il ouvrit lentement et comme à regret. —Tiens, maudit démon d'Islande, voilà tes deux ducats.

Satan ne donnerait certes pas de ton âme ce que je donne de ton corps. Le brigand reçut les deux pièces d'or.

Aussitôt le guichetier avança la main pour les reprendre. —Un instant, compagnon, donne-moi d'abord ce que je t'ai demandé. Le guichetier sortit, et revint un moment après, apportant une botte de paille fraîche et un réchaud plein de charbons ardents, qu'il plaça près du condamné. —C'est cela, dit le brigand en lui remettant les deux ducats, je me chaufferai cette nuit.—Encore un mot, ajouta-t-il d'une voix sinistre:—Le cachot ne touche-t-il pas à la caserne des arquebusiers de Munckholm? Han d'Islande XLIX 241. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles