Han d'Islande Toute espérance disparut du front du condamné.
Publié le 12/04/2014
Extrait du document
«
Ce sera le premier et le dernier, à la vérité; mais, en revanche, je te promets que tu ne souffriras point.
Je te
pendrai en frère.Résigne-toi.
Musdoemon se leva; ses narines étaient gonflées de rage, ses lèvres vertes tremblaient, ses dents claquaient, sa
bouche écumait de désespoir.
Satan!J'aurai sauvé ce d'Ahlefeld! j'aurai embrassé mon frère! et ils me tueront!, et il faudra mourir la
nuit, dans un cachot obscur, sans que le monde puisse entendre mes malédictions, sans que ma voix puisse
tonner, sur eux d'un bout du royaume à l'autre, sans que ma main puisse déchirer le voile de tous leurs crimes!
Ce sera pour arriver à cette mort que j'aurai souillé toute ma vie!Misérable! poursuivit-il, s'adressant à son
frère, tu veux donc être fratricide?
Je suis bourreau, répondit le flegmatique Nychol.
Non! s'écria le condamné.
Et il s'était jeté à corps perdu sur le bourreau, et ses yeux lançaient des flammes
et répandaient des larmes, comme ceux d'un taureau aux abois.
Non, je ne mourrai pas ainsi! Je n'aurai point
vécu comme un serpent formidable pour mourir comme le misérable ver qu'on écrase! Je laisserai ma vie dans
ma dernière morsure; mais elle sera mortelle.
En parlant ainsi, il étreignait en ennemi celui qu'il venait d'embrasser en frère.
Le flatteur et caressant
Musdoemon se montrait en ce moment ce qu'il était dans son essence.
Le désespoir avait remué le fond de son
âme ainsi qu'une lie, et après avoir rampé comme le tigre, il se redressait comme lui.
Il eût été difficile de
décider lequel des deux frères était le plus effroyable, dans ce moment où ils luttaient, l'un avec la stupide
férocité d'une bête sauvage, l'autre avec la fureur rusée d'un démon.
Mais les quatre hallebardiers, jusqu'alors impassibles, n'étaient pas restés immobiles.
Ils avaient prêté
assistance au bourreau, et bientôt Musdoemon, qui n'avait d'autre force que sa rage, fut contraint de lâcher
prise.
Il alla se jeter à plat ventre contre la muraille, poussant des hurlements inarticulés et émoussant ses
ongles sur la pierre.
Mourir! démons de l'enfer! mourir sans que mes cris percent ces voûtes, sans que mes bras renversent ces
murs!
On le saisit sans éprouver de résistance.
Son effort inutile l'avait épuisé.
On le dépouilla de sa robe pour le
garrotter.
En ce moment, un paquet cacheté tomba de ses vêtements.
Qu'est cela? dit le bourreau.
Une espérance infernale luisait dans l'oeil hagard du condamné.
Comment avais-je oublié cela? murmura-t-il.Écoute, frère Nychol, ajouta-t-il d'une voix presque
amicale; ces papiers appartiennent au grand-chancelier.
Promets-moi de les lui remettre, et fais ensuite de
moi ce que tu voudras.
Puisque tu es tranquille maintenant, je te promets de remplir ta dernière intention, quoique tu viennes d'agir
envers moi comme un mauvais frère.
Ces papiers seront remis au chancelier, foi d'Orugix.
Demande à les lui remettre toi-même, reprit le condamné en souriant au bourreau, qui, par sa nature,
comprenait peu les sourires.
Le plaisir qu'ils causeront à sa grâce te vaudra peut-être quelque faveur.
Han d'Islande
L 247.
»
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