Devoir de Philosophie

la cohésion et persiste dans la durée.

Publié le 30/10/2013

Extrait du document

la cohésion et persiste dans la durée. Dès lors, philosopher, c'est à la fois apprendre à vivre et savoir mourir. L'insécurité de l'existence temporelle fait que la vie est toujours un essai. Il importe qu'au cours de cet essai nous osions aller aussi loin que possible, nous exposer aux dangers xtrêmes sans nous les dissimuler, et faire régner une loyauté intégrale dans notre effort pour voir, interroger et épondre. Et il s'agit de suivre notre chemin sans savoir ce qu'est la totalité, sans posséder de façon tangible ce ui est à proprement parler, sans vouloir nous procurer par des argumentations spécieuses une lucarne qui ous permettrait d'avoir, de ce monde-ci, une vue directe et objective sur la transcendance, sans Parole de Dieu ui nous atteindrait d'un coup avec une parfaite univocité. Il s'agit bien plutôt de percevoir le sens chiffré du angage toujours ambigu que parlent les choses et de vivre cependant avec la certitude de la transcendance. C'est cela seul qui, dans notre condition si problématique, peut donner à notre vie sa valeur, au monde sa beauté, à notre existence sa plénitude. Si philosopher, c'est apprendre à mourir, savoir mourir se trouve être justement la condition d'une vie droite. Apprendre à vivre et savoir mourir, c'est la même chose. * ** Méditer, c'est apprendre la puissance de la pensée. Penser, c'est commencer à être un homme. En acquérant une juste connaissance des objets, on découvre la puissance de la rationalité, par exemple dans les opérations du calcul, dans l'étude expérimentale des phénomènes naturels, dans les plans techniques. La force contraignante de la logique dans les déductions, l'évidence dans les séries causales, la réalité tangible de l'expérience, sont d'autant plus grandes que la méthode appliquée est plus pure. Mais la recherche philosophique commence aux limites où finit ce savoir que donne l'entendement. Tout ce ui a pour nous une importance décisive : choix des buts et des fins dernières, con-naissance du souverain bien, e Dieu, de la liberté humaine, la rationalité se révèle impuissante à le déterminer. Elle suscite ainsi un mode de penser qui, tout en se servant des moyens de l'entendement, est davantage. La recherche philosophique s'efforce d'atteindre les bornes de la connaissance rationnelle pour s'y enflammer. Si quelqu'un pense voir clair en tout, c'est qu'il a cessé de philosopher. Si quelqu'un prend les informations des sciences pour la connaissance de l'être même dans sa totalité, c'est qu'il s'abandonne à une superstition scientifique. Qui cesse de s'étonner cesse d'interroger. Qui n'admet plus aucun mystère ne cherche plus rien. Philosopher, c'est connaître la modestie profonde qu'imposent les limites du savoir scientifique possible, c'est s'ouvrir entièrement à l'inconnaissable qui se révèle au delà. Ici s'arrête la connaissance, mais non la pensée. Le savoir me permet, grâce à son application technique, d'agir sur le monde extérieur ; le non-savoir, lui, permet une action intérieure par laquelle on se transforme soimême. Là se manifeste une puissance de la pensée, différente et plus profonde, qui n'est plus détachée et braquée sur un objet, mais qui est, au plus profond de soi, le processus par lequel la pensée et l'être s'identifient. Cette pensée, cette action intérieure, si on la mesure à la puissance extérieure de la technique, est pour ainsi dire nulle. On ne l'acquiert pas en appliquant une connaissance, on ne la réalise pas à volonté selon un plan, mais elle est à la fois la conquête d'une clarté véritable et celle d'une profondeur essentielle. L'entendement (ratio) élargit l'horizon. C'est lui qui fixe les objets, qui déploie les tensions de l'être, c'est lui ussi qui donne force et netteté à cela même qui lui échappe. La clarté de l'entendement permet la clarté des imites et suscite ainsi les impulsions authentiques qui sont à la fois penser et faire, action intérieure et xtérieure. On demande au philosophe de vivre conformément à ce qu'il enseigne. Cette formule exprime mal ce que l'on ntend. Le philosophe, en effet, n'a pas de doctrine au sens d'un ensemble de prescriptions pouvant s'appliquer ux cas particuliers de la vie concrète, au sens où des genres empiriquement définis s'appliquent aux objets, ou es normes juridiques à des faits. Les pensées philosophiques ne permettent aucune application ; elles sont bien lus des réalités dont on peut dire, par exemple, qu'en les actualisant dans son esprit l'homme vit véritablement ui-même, ou bien il imprègne toute sa vie de pensée. De là l'impossibilité de séparer la condition d'homme et la philosophie (alors qu'il est parfaitement possible de séparer l'homme de ses connaissances scientifiques). C'est pourquoi aussi il ne suffit pas de reproduire dans son esprit une pensée philosophique : il faut en même temps revivre intérieurement ce qu'a été dans son être philosophique l'homme qui l'a pensée. * ** Une vie philosophique est toujours menacée de se perdre dans des déviations que ses principes eux-mêmes servent alors à justifier. Des appétits se cachent derrière les formules qui sont censées éclairer l'existence. La sérénité dégénère en passivité, la confiance devient une foi illusoire en l'harmonie universelle, l'art de ourir se transforme en une fuite devant les réalités, la sagesse se corrompt jusqu'à n'être plus qu'un laisseraire indifférent. Le meilleur se pervertit et devient le pire. La volonté de communication se leurre en se dérobant derrière des exigences contradictoires. On demande à tre épargné tout en continuant à prétendre qu'on est absolument sûr de soi parce qu'on voit parfaitement clair n soi. On donne ses nerfs pour excuse, tout en revendiquant sa dignité de sujet libre. On use de précautions et e moyens de défense cachés, tout en se déclarant disposé à une communication sans réserve. On pense à soi, out en croyant parler de quelque chose d'objectif. Un homme qui veut vivre philosophiquement, qui veut voir clair dans ces déviations et en triompher, sait u'il ne peut jamais être sûr de lui. Aussi recherche-t-il sans cesse la critique, l'adversaire ; il a besoin que l'on onteste la valeur de sa conduite ; il veut écouter autrui, non pour se soumettre, mais pour trouver là une aide ans l'effort qu'il fait pour voir clair en lui-même. Il rencontre alors la vérité, et une confirmation qu'il n'a pas herchée, dans l'accord qui s'établit parfois avec les autres lorsque la communication a été réelle, grâce à une uverture d'esprit totale et à une totale absence d'égards. La philosophie ne permet même pas d'affirmer qu'une communication pleine et entière soit possible, et ourtant c'est cette foi qui la fait vivre et qui lui fait affronter tous les risques. La communication est un objet de oi, non de savoir. On l'a déjà perdue quand on croit en avoir la possession. C'est qu'il y a en effet ces terribles limites que la philosophie ne peut pourtant jamais tenir pour définitives : il a tout ce que nous laissons sombrer dans l'oubli, tout ce que nous admettons sans y voir vraiment clair. Nous rononçons tant et tant de paroles, alors que ce qu'il importe d'exprimer pourrait l'être tout simplement, non ertes par quelque phrase générale et toute faite, mais en faisant un signe efficace, adapté à la situation donnée. Au milieu des déviations, lorsque tout s'embrouille et que règne la confusion, l'homme d'aujourd'hui recourt u psychiatre. Il est en effet des maladies physiques et des névroses en relation avec notre état psychologique. es comprendre, les connaître, savoir se comporter à leur égard, tout cela fait partie d'un savoir-vivre réaliste. Il e faut pas éviter l'intervention du médecin, dans les cas où celui-ci, fort de son expérience et de son sens ritique, connaît le mal et le remède. Mais aujourd'hui, sur la psychothérapie, quelque chose s'est greffé qui n'est lus à proprement parler science et médecine, mais philosophie. Il importe donc de soumettre cette recherche à n examen éthique et métaphysique analogue à celui que doit subir toute tentative philosophique. * ** Le but auquel tend une conduite philosophique ne saurait se définir comme un état réalisable une fois pour outes et dès lors parfait. Nos états ne font que manifester constamment notre existence ou son échec. Nous sommes essentiellement en route. Nous voudrions traverser et dépasser la condition temporelle. Cela n'est ossible que par des termes polairement opposés : Ce n'est qu'en existant entièrement dans le moment concret où nous situe notre condition d'êtres istoriquement conditionnés que nous percevons quelque chose d'une présence éternelle. Ce n'est qu'en tant qu'homme particulier, ayant telle physionomie particulière, que nous approfondissons la ondition humaine en général. C'est seulement si nous vivons notre époque particulière comme étant la réalité qui nous englobe qu'il nous evient possible de comprendre le sens de cette époque dans l'unité de l'histoire et de trouver en celle-ci l'éternité. En prenant notre élan, nous parvenons à toucher, au delà de nos états de conscience, la source originelle qui s'éclaire de plus en plus, mais qui menace toujours de s'obscurcir. L'élan qui soulève la vie philosophique est toujours particulier et appartient à un homme particulier. Chacun doit le prendre isolément, dans la communication où il est impossible de se décharger de rien sur autrui. Cet élan ne nous soulève que dans les moments où notre vie nous impose un choix concret, et non lorsqu'il s'agit de choisir telle ou telle conception de l'univers, enfermée dans des formules définitives. Essayons pour finir d'illustrer la situation du philosophe dans le siècle. Imaginons qu'il a cherché à s'orienter sur le terrain solide de l'expérimentation, des diverses disciplines scientifiques, des catégories, de la éthodologie. Aux limites du monde des faits, il a trouvé celui des idées, et il l'a parcouru en toute sécurité. Le oici enfin au bord de l'Océan. Tel un papillon qui bat des ailes en se risquant à peine au-dessus de l'eau, il se ient là, guettant le navire qui lui permettra de partir à la découverte de la réalité unique, de cette transcendance ui se fait présente à son existence. Il guette ce navire - il guette la méthode qui donnera accès à une pensée et à ne conduite philosophiques. Or, ce navire, il l'entrevoit sans pouvoir jamais vraiment l'atteindre ; alors il se onne beaucoup de mal, et il lui arrive, au cours de ses efforts, de faire d'étranges mouvements désordonnés. auvres insectes que nous sommes, nous voilà perdus si nous renonçons à nous orienter sur la terre ferme. Mais nous ne nous contentons pas d'y rester. Nos efforts tâtonnants, si incertains, peut-être si ridicules aux yeux de ui, satisfait, s'est installé en lieu sûr, sont compréhensibles seulement pour ceux que l'inquiétude a saisis. Pour ux, le monde devient une piste d'envol en vue de l'exploration décisive que chacun doit entreprendre seul, risquer en commun avec les autres, et dont aucune doctrine ne saurait faire son objet.

« La sérénité dégénère enpassivité, laconfiance devientunefoiillusoire enl’harmonie universelle, l’artde mourir setransforme enune fuite devant lesréalités, lasagesse secorrompt jusqu’àn’êtreplusqu’un laisser- faire indifférent.

Lemeilleur sepervertit etdevient lepire. La volonté decommunication seleurre ensedérobant derrièredesexigences contradictoires.

Ondemande à être épargné toutencontinuant àprétendre qu’onestabsolument sûrdesoi parce qu’on voitparfaitement clair en soi.

Ondonne sesnerfs pourexcuse, toutenrevendiquant sadignité desujet libre.

Onuse deprécautions et de moyens dedéfense cachés,toutensedéclarant disposéàune communication sansréserve.

Onpense àsoi, tout encroyant parlerdequelque chosed’objectif. Un homme quiveut vivre philosophiquement, quiveut voirclair dans cesdéviations eten triompher, sait qu’il nepeut jamais êtresûrdelui.

Aussi recherche-t-il sanscesse lacritique, l’adversaire ; ilabesoin quel’on conteste lavaleur desaconduite ; ilveut écouter autrui,nonpour sesoumettre, maispourtrouver làune aide dans l’effort qu’ilfaitpour voirclair enlui-même.

Ilrencontre alorslavérité, etune confirmation qu’iln’apas cherchée, dansl’accord quis’établit parfoisaveclesautres lorsque lacommunication aété réelle, grâceàune ouverture d’esprittotaleetàune totale absence d’égards. La philosophie nepermet mêmepasd’affirmer qu’unecommunication pleineetentière soitpossible, et pourtant c’estcette foiqui lafait vivre etqui luifait affronter touslesrisques.

Lacommunication estunobjet de foi, non desavoir.

Onl’adéjà perdue quandoncroit enavoir lapossession. C’est qu’ilya en effet cesterribles limitesquelaphilosophie nepeut pourtant jamaistenirpourdéfinitives : il y a tout ceque nous laissons sombrer dansl’oubli, toutceque nous admettons sansyvoir vraiment clair.Nous prononçons tantettant deparoles, alorsquecequ’il importe d’exprimer pourraitl’êtretoutsimplement, non certes parquelque phrasegénérale ettoute faite,maisenfaisant unsigne efficace, adaptéàla situation donnée. Au milieu desdéviations, lorsquetouts’embrouille etque règne laconfusion, l’hommed’aujourd’hui recourt au psychiatre.

Ilest eneffet desmaladies physiques etdes névroses enrelation avecnotre étatpsychologique. Les comprendre, lesconnaître, savoirsecomporter àleur égard, toutcelafaitpartie d’unsavoir-vivre réaliste.Il ne faut paséviter l’intervention dumédecin, danslescas oùcelui-ci, fortdeson expérience etde son sens critique, connaîtlemal etleremède.

Maisaujourd’hui, surlapsychothérapie, quelquechoses’estgreffé quin’est plus àproprement parlerscience etmédecine, maisphilosophie.

Ilimporte doncdesoumettre cetterecherche à un examen éthiqueetmétaphysique analogueàcelui quedoit subir toute tentative philosophique. * * * Le but auquel tenduneconduite philosophique nesaurait sedéfinir comme unétat réalisable unefoispour toutes etdès lors parfait.

Nosétats nefont quemanifester constamment notreexistence ouson échec.

Nous sommes essentiellement en route . Nous voudrions traverseretdépasser lacondition temporelle.

Celan’est possible quepardes termes polairement opposés : Ce n’est qu’en existant entièrement danslemoment concretoùnous situenotre condition d’êtres historiquement conditionnésquenous percevons quelquechosed’uneprésence éternelle. Ce n’est qu’en tantqu’homme particulier, ayanttellephysionomie particulière,quenous approfondissons la condition humaineengénéral. C’est seulement sinous vivons notreépoque particulière commeétantlaréalité quinous englobe qu’ilnous devient possible decomprendre lesens decette époque dansl’unité del’histoire etde trouver encelle-ci l’éternité. En prenant notreélan,nous parvenons àtoucher, audelà denos états deconscience, lasource originelle qui s’éclaire deplus enplus, maisquimenace toujours des’obscurcir. L’élan quisoulève lavie philosophique esttoujours particulier etappartient àun homme particulier.

Chacun doit leprendre isolément, danslacommunication oùilest impossible desedécharger derien surautrui. Cet élan nenous soulève quedans lesmoments oùnotre vienous impose unchoix concret, etnon lorsqu’il s’agit dechoisir telleoutelle conception del’univers, enfermée dansdesformules définitives. Essayons pourfinird’illustrer lasituation duphilosophe danslesiècle.

Imaginons qu’ilacherché às’orienter sur leterrain solidedel’expérimentation, desdiverses disciplines scientifiques, descatégories, dela méthodologie.

Auxlimites dumonde desfaits, ilatrouvé celuidesidées, etill’a parcouru entoute sécurité.

Le voici enfin aubord del’Océan.

Telunpapillon quibatdes ailes enserisquant àpeine au-dessus del’eau, ilse tient là,guettant lenavire quiluipermettra departir àla découverte delaréalité unique, decette transcendance qui sefait présente àson existence.

Ilguette cenavire – ilguette laméthode quidonnera accèsàune pensée età une conduite philosophiques.

Or,cenavire, ill’entrevoit sanspouvoir jamaisvraiment l’atteindre ; alorsilse donne beaucoup demal, etillui arrive, aucours deses efforts, defaire d’étranges mouvements désordonnés. Pauvres insectes quenous sommes, nousvoilàperdus sinous renonçons ànous orienter surlaterre ferme.

Mais. »

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