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La définition des passions de l'âme.

Publié le 20/02/2012

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Après avoir considéré en quoi les passions de l'âme dif­fèrent de toutes ses autres pensées, il me semble qu’on peut généralement les définir des perceptions, ou des sen­timents, ou des émotions de l’âme, qu’on rapporte parti­culièrement à elle, et qui sont causées, et entretenues, et fortifiées par quelque mouvement des esprits.

 

Explication de la première partie de cette définition. — On les peut nommer des perceptions lorsqu’on se sert généralement de ce mot pour signifier toutes les pensées qui ne sont point des actions de l’âme ou des volontés, mais non point lorsqu’on ne s’en sert que pour signifier des connaissances évidentes; car l’expérience fait voir que ceux qui sont le plus agités par leurs passions ne sont pas ceux qui les connaissent le mieux, et qu’elles sont du nombre des perceptions que l’étroite alliance qui est entre l’âme et le corps rend confuses et obscures. On les peut aussi nommer des sentiments, à cause qu’elles sont reçues en l’âme de même façon que les objets des sens extérieurs, et ne sont pas autrement connues par elle; mais on peut encore mieux les nommer des émotions de l’âme, non seulement à cause que ce nom peut être attribué à tous les changements qui arrivent en elle, c’est-à-dire à toutes les diverses pensées qui lui viennent, mais particulièrement parce que, de toutes les sortes de pensées qu’elle peut avoir, il n’y en a point d’autres qui l’agitent et l’ébranlent si fort que font ces passions.

 

Explication de son autre partie. — J’ajoute qu’elles se rapportent particulièrement à l’âme, pour les distinguer des autres sentiments qu’on rapporte, les uns aux objets extérieurs, comme les odeurs, les sons, les couleurs; les autres à notre corps, comme la faim, la soif, la douleur. J’ajoute aussi qu’elles sont causées, entretenues et fortifiées par quelque mouvement des esprits, afin de les distinguer de nos volontés, qu’on peut nommer des émotions de l’âme qui se rapportent à elle, mais qui sont causées par elle-même, et aussi afin d’expliquer leur dernière et plus prochaine cause, qui les distingue derechef des autres sen­timents.

Descartes.

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