Le Rouge et Le Noir Lascia fare a me.
Publié le 12/04/2014
Extrait du document
«
"Ainsi, partout de la fausseté, dit Julien.
Voilà il signor Geronimo qui va à Londres avec soixante mille francs
d'appointements.
Sans le savoir-faire du directeur de San Carlino, sa voix divine n'eût peut-être été connue et
admirée que dix ans plus tard...
Ma foi, j'aimerais mieux être un Geronimo qu'un Rênal.
Il n'est pas si honoré
dans la société, mais il n'a pas le chagrin de faire des adjudications comme celle d'aujourd'hui, et sa vie est
gaie."
Une chose étonnait Julien: les semaines solitaires passées à Verrières, dans la maison de M.
de Rênal avaient
été pour lui une époque de bonheur.
Il n'avait rencontré le dégoût et les tristes pensées qu'aux dîners qu'on lui
avait donnés dans cette maison solitaire, ne pouvait-il pas lire, écrire, réfléchir, sans être troublé? A chaque
instant, il n'était pas tiré de ses rêveries brillantes par la cruelle nécessité d'étudier les mouvements d'une âme
basse, et encore afin de la tromper par des démarches ou des mots hypocrites.
"Le bonheur serait-il si près de moi?...
La dépense d'une telle vie est peu de chose, je puis à mon choix
épouser Mlle Élisa, ou me faire l'associé de Fouqué...
Mais le voyageur qui vient de gravir une montagne
rapide s'assied au sommet.
et trouve un plaisir parfait à se reposer.
Serait-il heureux, si on le forçait à se
reposer toujours?"
L'esprit de Mme de Rênal était arrivé à des pensées fatales.
Malgré ses résolutions, elle avait avoué à Julien
toute l'affaire de l'adjudication.
"Il me fera donc oublier tous mes serments, pensait-elle!"
Elle eût sacrifié sa vie sans hésiter pour sauver celle de son mari, si elle l'eût vu en péril.
C'était une de ces
âmes nobles et romanesques, pour qui apercevoir la possibilité d'une action généreuse, et ne pas la faire, est la
source d'un remords presque égal à celui du crime commis.
Toutefois il y avait des jours funestes où elle ne
pouvait chasser l'image de l'excès de bonheur qu'elle goûterait, si, devenant veuve tout à coup, elle pouvait
épouser Julien.
Il aimait ses fils beaucoup plus que leur père; malgré sa justice sévère, il en était adoré.
Elle sentait bien
qu'épousant Julien, il fallait quitter ce Vergy dont les ombrages lui étaient si chers.
Elle se voyait vivant à
Paris, continuant à donner à ses fils cette éducation qui faisait l'admiration de tout le monde.
Ses enfants, elle,
Julien, tous étaient parfaitement heureux.
Étrange effet du mariage, tel que l'a fait le XIXe siècle! L'ennui de la vie matrimoniale fait périr l'amour
sûrement, quand l'amour a précédé le mariage.
Et cependant, dirait un philosophe, il amène bientôt chez les
gens assez riches pour ne pas travailler, l'ennui profond de toutes les jouissances tranquilles.
Et ce n'est que les
âmes sèches, parmi les femmes, qu'il ne prédispose pas à l'amour.
La réflexion du philosophe me fait excuser Mme de Rênal mais on ne l'excusait pas à Verrières, et toute la
ville, sans qu'elle s'en doutât, n'était occupée que du scandale de ses amours.
A cause de cette grande affaire,
cet automne-là on s'y ennuya moins que de coutume.
L'automne, une partie de l'hiver passèrent bien vite.
Il fallut quitter les bois de Vergy.
La bonne compagnie de
Verrières commençait à s'indigner de ce que ses anathèmes faisaient si peu d'impression sur M.
de Rênal.
En
moins de huit jours, des personnes graves qui se dédommagent de leur sérieux habituel par le plaisir de
remplir ces sortes de missions, lui donnèrent les soupçons les plus cruels, mais en se servant des termes les
plus mesurés.
M.
Valenod qui jouait serré avait placé Élisa dans une famille noble et fort considérée où il y avait cinq
femmes.
Élisa craignant, disait-elle de ne pas trouver de place pendant l'hiver, n'avait demandé à cette famille
que les deux tiers à peu près de ce qu'elle recevait chez M.
le maire.
D'elle-même, cette fille avait eu
l'excellente idée d'aller se confesser à l'ancien curé Chélan et en même temps au nouveau, afin de leur raconter
à tous les deux le détail des amours de Julien.
Le Rouge et Le Noir
CHAPITRE XXIII.
CHAGRINS D'UN FONCTIONNAIRE 87.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Stendhal, LE ROUGE ET LE NOIR
- Oral Stendhal Le Rouge et le noir
- les personnages féminins dans le rouge et le noir
- Analyse lineaire le rouge et le noir exipit
- Dans quelle mesure peut-on dire que Le Rouge et le noir est un roman d’apprentissage ?