Le Ventre de Paris Celle-ci se leva, terrible, laissant glisser le chale.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
jusqu'au seuil de la boutique.
La vieille dut faire encore deux voyages, de l'une a l'autre, pour bien regler les
points de l'entrevue.
Enfin, elle eut la joie de negocier ce raccommodement qui allait faire tant de bruit.
Comme elle repassait une derniere fois devant la porte de Claire, elle entendit toujours le bruit des ciseaux,
dans le platre.
Puis, apres avoir rendu une reponse definitive a la charcutiere, elle se hata d'aller chercher madame Lecoeur
et la Sarriette.
Elles s'etablirent toutes trois au coin du pavillon de la maree, sur le trottoir, en face de la
charcuterie.
La, elles ne pouvaient rien perdre de l'entrevue.
Elles s'impatientaient, feignant de causer entre
elles, guettant la rue Pirouette, d'ou la Normande devait sortir.
Dans les Halles, le bruit de la reconciliation
courait deja; les marchandes, droites a leur banc, se haussant, cherchaient a voir; d'autres, plus curieuses,
quittant leur place, vinrent meme se planter sous la rue couverte.
Tous les yeux des Halles se tournaient vers
la charcuterie.
Le quartier etait dans l'attente.
Ce fut solennel.
Quand la Normande deboucha de la rue Pirouette, les respirations resterent coupees.
Elle a ses brillants, murmura la Sarriette.
Voyez donc comme elle marche, ajouta madame Lecoeur; elle est trop effrontee.
La belle Normande, a la verite, marchait en reine qui daignait accepter la paix.
Elle avait fait une toilette
soignee, coiffee avec ses cheveux frises, relevant un coin de son tablier pour montrer sa jupe de cachemire;
elle etrennait meme un noeud de dentelle d'une grande richesse.
Comme elle sentait les Halles la devisager,
elle se rengorgea encore en approchant de la charcuterie.
Elle s'arreta devant la porte.
Maintenant, c'est au tour de la belle Lisa, dit mademoiselle Saget.
Regardez bien.
La belle Lisa quitta son comptoir en souriant.
Elle traversa la boutique sans se presser, vint tendre la main a la
belle Normande.
Elle etait egalement tres comme il faut, avec son linge eblouissant, son grand air de
proprete.
Un murmure courut la poissonnerie; toutes les tetes, sur le trottoir, se rapprocherent, causant
vivement.
Les deux femmes etaient dans la boutique, et les crepines de l'etalage empechaient de les bien voir.
Elles semblaient causer affectueusement, s'adressaient de petits saluts, se complimentaient sans doute.
Tiens! reprit mademoiselle Saget, la belle Normande achete quelque chose...
Qu'est-ce donc qu'elle
achete? C'est une andouille, je crois...
Ah! voila! Vous n'avez pas vu, vous autres? La belle Lisa vient de lui
rendre la photographie, en lui mettant l'andouille dans la main.
Puis, il y eut encore des salutations.
La belle Lisa, depassant meme les amabilites reglees a l'avance, voulut
accompagner la belle Normande jusque sur le trottoir.
La, elles rirent toutes les deux, se montrerent au
quartier en bonnes amies.
Ce fut une veritable joie pour les Halles; les marchandes revinrent a leur banc, en
declarant que tout s'etait tres-bien passe.
Mais mademoiselle Saget retint madame Lecoeur et la Sarriette.
Le drame se nouait a peine.
Elles couvaient
toutes trois des yeux la maison d'en face, avec une aprete de curiosite qui cherchait a voir a travers les pierres.
Pour patienter, elles causerent encore de la belle Normande.
La voila sans homme, dit madame Lecoeur.
Elle a monsieur Lebigre, fit remarquer la Sarriette, qui se mit a rire.
Oh! monsieur Lebigre, il ne voudra plus.
Le Ventre de Paris
VI 154.
»
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