L'écureuil (1763). Buffon
Publié le 27/05/2011
Extrait du document

Parmi les portraits d'animaux, celui de l'Écureuil, moins connu que ceux de l'Oiseau-mouche ou du Cheval, est un des plus intéressants, par la précision et le pittoresque des détails. On peut, en le faisant étudier aux élèves, en tirer une méthode d'observation et de description, et leur donner d décrire par le même procédé un animal qu'il leur serait possible d'observer par eux-mêmes. L'écureuil est un joli petit animal qui n'est qu'à demi sauvage, et qui, par sa gentillesse, par sa docilité, par l'innocence même de ses moeurs, mériterait d'être épargné. Il n'est ni carnassier ni nuisible, quoiqu'il saisisse quelquefois des oiseaux; sa nourriture ordinaire sont des fruits, des amandes, des noisettes, de la faîne et du gland; il est propre, leste, vif, très alerte, très éveillé, très industrieux ; il a les yeux pleins de feu, la physionomie fine, le corps nerveux, les membres très dispos : sa jolie figure est encore rehaussée, parée par une belle queue en forme de panache, qu'il relève jusque dessus sa tête, et sous laquelle il se met à l'ombre. Il est, pour ainsi dire, moins quadrupède que les autres; il se tient ordinairement assis presque debout, et se sert de ses pieds de devant comme d'une main pour porter à sa bouche; au lieu de se cacher sous terre, il est toujours en l'air; il approche des oiseaux par sa légèreté : il demeure comme eux sur la cime des arbres, parcourt les forêts en sautant de l'un à l'autre, y fait son nid, cueille les graines, boit la rosée, et ne descend à terre que quand les arbres sont agités par la violence des vents. On ne le trouve point dans les champs, dans les lieux découverts, dans les pays de plaine ; il n'approche jamais des habitations, il ne reste point dans les taillis, mais dans les bois de hauteur, sur les vieux arbres des plus belles futaies. Il craint l'eau plus encore que la terre, et l'on assure que lorsqu'il faut la passer, il se sert d'une écorce pour vaisseau et de sa queue pour voile et pour gouvernail. Il ne s'engourdit pas comme le loir pendant l'hiver, il est en tout temps très éveillé; et pour peu que l'on touche au pied de l'arbre sur lequel il repose, il sort de sa petite bauge, fuit sur un autre arbre ou se cache à l'abri d'une branche. Il ramasse des noisettes pendant l'été, et en emplit les troncs, les fentes des vieux arbres, et a recours en hiver à sa provision ; il les cherche aussi sous la neige, qu'il détourne en grattant. Il a la voix éclatante, et plus perçante encore que celle de la fouine; il a de plus un murmure à bouche fermée, un petit grognement de mécontentement qu'il fait entendre toutes les fois qu'on l'irrite. Il est trop léger pour marcher ; il va ordinairement par petits sauts, et quelquefois par bonds; il a les ongles si pointus et les mouvements si prompts, qu'il grimpe en un instant sur un hêtre dont l'écorce est fort lisse.
(Histoire naturelle, 36 partie.)
QUESTIONS D'EXAMEN
I. — L'ensemble. — Un portrait d'animal. — Quelle faculté doit être très exercée chez un écrivain qui, ainsi que Buffon, décrit la nature? Montrez que Buffon n'est pas seulement un observateur (l'ordre, l'arrangement : le peintre); Quels sont, d'après le morceau étudié, les traits distinctifs de l'écureuil? Si vous ne deviez en désigner que trois, lesquels indiqueriez-vous ? Buffon, en s'adressant à notre esprit, ne parle-t-il pas aussi à nos yeux? Voyez-vous, en imagination, l'animal qu'il décrit? Outre le portrait physique de l'écureuil, ne fait-il pas une sorte de peinture morale de l'animal? (l'innocence de ses moeurs, son aversion pour l'eau, son grognement de mécontentement...) ; Rappelez quelques-uns des aspects sous lesquels Buffon représente l'écureuil; — ne met-il pas sous nos yeux de gracieux petits tableaux? (la jolie figure de l'écureuil, parée par une belle queue en forme de panache, qu'il relève jusque dessus sa tête, et sous laquelle il se met à l'ombre...) ; Quelle impression générale vous laisse la lecture de ce morceau?
II.— L'analyse du morceau. — Distinguez les différentes parties du portrait : a) Quelques traits généraux; un joli petit animal; sa gentillesse, sa docilité... ; b) Sa nourriture; c) Son agilité, sa vivacité; ses yeux, sa physionomie, son corps, ses membres, sa jolie figure, sa queue... ; d) Son domaine; e) Sa voix; Montrez le lien qui rattache les unes aux autres ces différentes parties; De quoi se compose la nourriture de l'écureuil? Quelle précaution prend-il pendant l'été? Comment se tient-il, bien que quadrupède? De quels animaux approche-t-il par la légèreté? Quand descend-il à terre? Marche-t-il? (Il est trop léger pour marcher...)
III. — Le style ; — les expressions. — Montrez que le mouvement général du style, dans ce morceau, est .bien approprié au sujet (quand il fait le portrait du lion, Buffon a recours à la phrase périodique; mais ici, dans le portrait de l'écureuil, il emploie des phrases coupées, "lestes, vives, très alertes, très éveillées"; — le montrer à l'aide d'exemples); De quelle qualité Buffon fait-il preuve en appropriant son style au sujet qu'il traite? (Souplesse...) Montrez le coloris du style dans le portrait de l'écureuil (mots qui peignent : il a les yeux pleins de feu, la physionomie fine, le corps nerveux.... Portrait plein de vie); Quelle différence y a-t-il entre de petits sauts et des bonds? Qu'est-ce qu'un taillis? une futaie?
IV. — La grammaire. — Comment appelle-t-on les animaux qui se nourrissent de fruits? Indiquez la composition des mots quadrupède, — mécontentement; Trouvez un synonyme de cime; Distinguez les propositions contenues dans la première phrase du morceau; — nature de chacune d'elles; Quels sont les compléments du verbe mériterait?
Rédaction. --- Faites 1, portrait d'un petit mammifère, à votre choix.
Liens utiles
- BUFFON (1707-1788) EXTRAITS. - DISCOURS SUR LB STYLE
- Vocabulaire Monter ? Mets une croix dans la case correspondant au sens du verbe monter porter constituer s'élever grimper l'écureuil monte en haut de l'arbre.
- HISTOIRE NATURELLE DE L’HOMME, 1749. Buffon - étude de l'œuvre
- Travailler sur les nombres de 0 à 99 Découvrir Un écureuil prévoyant o Faire écrire puis lire la première égalité : 80 + 3 = 83.
- Ordonner les nombres de 0 à 89 Découvrir Panache l'Écureuil o Laisser les élèves découvrir la situation et la commenter, puis leur faire lire à haute voix l'énoncé (demander ce qu'est un panache) et les consignes.