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L'esprit ne doit jamais obéissance.

Publié le 03/11/2013

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esprit
L'esprit ne doit jamais obéissance. Une preuve de géométrie suffit à le montrer ; car si vous la croyez sur parole, vous êtes un sot ; vous trahissez l'esprit. Ce jugement intérieur, dernier refuge, et suffisant refuge, il faut le garder ; il ne faut jamais le donner. Suffisant refuge ? Ce qui me le fait croire, c'est que ce qui subsiste d'esclavage vient bien clairement de ce que le citoyen jette aux pieds du chef son jugement aussi. Il admire ; c'est son bonheur ; et pourtant il sait ce que cela lui coûte. Pour moi, je n'arrive pas à comprendre que (...) le bon citoyen, l'ami de l'ordre, l'exécutant fidèle jusqu'à la mort, se permette encore de donner quelque chose de plus, j'entends d'acclamer, d'approuver, d'aimer le chef impitoyable. Mais plutôt je voudrais que le citoyen restât inflexible de son côté, inflexible d'esprit, armé de défiance, et toujours se tenant dans le doute quant aux projets et aux raisons du chef. Cela revient à se priver du bonheur de l'union sacrée, en vue d'éviter de plus grands maux. Par exemple, ne point croire, par un abus d'obéissance, qu'une guerre est ou était inévitable ; ne point croire que les impôts sont calculés au plus juste, et les dépenses de même ; et ainsi du reste. Exercer donc un contrôle clairvoyant, résolu, sans c?ur, sur les actions et encore plus sur les discours du chef. Communiquer à ses représentants le même esprit de résistance et de critique, de façon que le pouvoir se sache jugé. Car, si le respect, l'amitié, les égards se glissent par là, la justice et la liberté sont perdues, et la sécurité elle-même est perdue. ALAIN, Propos

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