L'homme et la nature
Publié le 12/06/2011
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« C'est le jour où, après des millénaires de lutte, la main fut définitivement différenciée du pied et l'attitude verticale enfin assurée, que l'homme se sépara du singe, et que furent établies les bases du développement du langage articulé et du prodigieux perfectionnement du cerveau, qui a depuis rendu l'écart entre l'homme et le singe infranchissable. La spécialisation de la main, voilà qui signifie l'outil et l'outil signifie l'activité spécifiquement humaine, la réaction modificatrice de l'homme sur la nature, la production. Il est aussi des animaux au sens étroit du mot : la fourmi, l'abeille, le castor, qui ont des outils, mais ce ne sont que des membres de leur corps ; il est aussi des animaux qui produisent, mais leur action productrice sur la nature environnante est à peu près nulle au regard de la nature. Seul l'homme est parvenu à imprimer son sceau à la nature, non seulement en déplaçant le monde végétal et animal, mais aussi en transformant l'aspect, le climat de sa résidence, voire les animaux et les plantes, et cela à un point tel que les conséquences de son activité ne peuvent disparaître qu'avec le dépérissement général de la terre. S'il est parvenu à ce résultat, c'est d'abord et essentiellement grâce à la main. Même la machine à vapeur, qui est jusqu'ici son outil le plus puissant pour transformer la nature, repose en dernière analyse, parce que c'est un outil, sur la main. Mais la tête a accompagné pas à pas l'évolution de la main ; d'abord vint la conscience des conditions requises pour chaque résultat pratique et plus tard, comme conséquence, chez les peuples les plus favorisés, l'intelligence des lois naturelles qui conditionnent ces résultats utiles. Et avec la connaissance rapidement grandissante des lois de la nature, les moyens de réagir sur la nature ont grandi aussi ; la main, à elle seule, n'aurait jamais réalisé la machine à vapeur si, corrélativement, le cerveau de l'homme ne s'était développé avec la main et à côté d'elle, et en partie grâce à elle. Avec l'homme, nous entrons dans l'histoire. «
Friedrich ENGELS, philosophe allemand (1820-1895), Dialectique de la nature (1882), Les Éditions sociales.
« Le mouton sauvage est adapté à la froideur des climats de montagne par une lourde toison. Mais l'aptitude de l'homme à affronter ces conditions se manifeste dans sa capacité de se perfectionner un vêtement avec la peau ou la laine de ce même mouton. Ses pelles à fouir naturelles permettent au lapin de se creuser des abris contre le froid et autres périls. La pioche et la pelle permettent à l'homme de se constituer de semblables refuges, et son outillage lui permet même d'en construire de meilleurs en brique, en pierre ou en bois. Le lion possède des griffes et des crocs pour se procurer de la nourriture. L'homme fabrique épieux et flèches pour abattre le gibier. Un instinct hérité, l'adaptation innée de son système nerveux rudimentaire, permettent à la méduse de s'emparer des proies qui sont à sa portée. L'homme apprend par l'exemple et le précepte oral à obtenir sa subsistance selon des méthodes plus efficaces. «
V. Gordon CHILDE, préhistorien et philosophe britannique (1892-1957), La Naissance de la civilisation, Bibliothèque Médiations, Gonthier.
« L'homme de la Préhistoire a vécu dans les cavernes et sur les parois de celles-ci, à l'occasion dans les régions les plus profondes, qui ne semblent pas avoir été habitées, mais plutôt utilisées comme lieux de culte, il a dessiné, gravé, peint, des scènes où figurent presque exclusivement des animaux. [...] Le chasseur ne s'avoue pas seulement par le choix du sujet, mais par le mode de traduction qu'il en invente. À l'origine, il ne connaît que la ligne du contour. [...] Chasser, c'est atteindre la bête à l'aide d'une arme ; l'oeil doit donc, pour diriger la main, avoir une connaissance précise des limites de la cible, c'est-à-dire de la zone à l'intérieur de laquelle il est capital de viser, et de frapper. Le contour marque très exactement la frontière au-delà de laquelle le coup ne portera plus et manquera la proie convoitée. «
René HUYGHE, écrivain français contemporain, historien de l'art, Les Puissances de l'image, Flammarion.
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