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l'odeur des truffes.

Publié le 15/12/2013

Extrait du document

l'odeur des truffes. Là, se trouve un grand magasin de comestibles qui souffle jusque sur le trottoir un tel parfum, que adine et Marjolin fermaient les yeux, s'imaginant avaler des choses exquises. Claude était troublé ; il disait que cela le reusait ; il allait revoir la Halle au blé, par la rue Oblin, étudiant les marchandes de salades, sous les portes, et les aïences communes, étalées sur les trottoirs, laissant « les deux brutes » achever leur flânerie dans ce fumet de truffes, le umet le plus aigu du quartier [36] . C'étaient là les grandes tournées. Cadine, lorsqu'elle promenait toute seule ses bouquets de violettes, poussait des ointes, rendait particulièrement visite à certains magasins qu'elle aimait. Elle avait surtout une vive tendresse pour la oulangerie Taboureau, où toute une vitrine était réservée à la pâtisserie ; elle suivait la rue Turbigo, revenait dix fois, our passer devant les gâteaux aux amandes, les saint-honoré, les savarins, les flans, les tartes aux fruits, les assiettes de abas, d'éclairs, de choux à la crème ; et elle était encore attendrie par les bocaux pleins de gâteaux secs, de macarons et e madeleines. La boulangerie, très claire, avec ses larges glaces, ses marbres, ses dorures, ses casiers à pains de fer uvragé, son autre vitrine, où des pains longs et vernis s'inclinaient, la pointe sur une tablette de cristal, retenus plus haut ar une tringle de laiton, avait une bonne tiédeur de pâte cuite, qui l'épanouissait, lorsque, cédant à la tentation, elle ntrait acheter une brioche de deux sous. Une autre boutique, en face du square des Innocents, lui donnait des curiosités ourmandes, toute une ardeur de désirs inassouvis. C'était une spécialité de godiveaux [37] . Elle s'arrêtait dans la contemplation des godiveaux ordinaires, des godiveaux de brochet, des godiveaux de foies gras truffés ; et elle restait là, rêvant, se disant qu'il faudrait bien qu'elle finît par en manger un jour. Cadine avait aussi ses heures de coquetterie. Elle s'achetait alors des toilettes superbes à l'étalage des Fabriques de France, qui pavoisaient la pointe Saint-Eustache d'immenses pièces d'étoffe, pendues et flottant de l'entresol jusqu'au rottoir. Un peu gênée par son éventaire, au milieu des femmes des Halles, en tabliers sales devant ces toilettes des imanches futurs, elle touchait les lainages, les flanelles, les cotonnades, pour s'assurer du grain et de la souplesse de l'étoffe. Elle se promettait quelque robe de flanelle voyante, de cotonnade à ramages ou de popeline écarlate. Parfois ême, elle choisissait dans les vitrines, parmi les coupons plissés et avantagés par la main des commis, une soie tendre, bleu ciel ou vert pomme, qu'elle rêvait de porter avec des rubans roses. Le soir, elle allait recevoir à la face l'éblouissement des grands bijoutiers de la rue Montmartre. Cette terrible rue l'assourdissait de ses files interminables de voitures, la coudoyait de son flot continu de foule, sans qu'elle quittât la place, les yeux emplis de cette splendeur flambante, sous la ligne des réverbères accrochés en dehors à la devanture du magasin. D'abord, c'étaient les blancheurs mates, les luisants aigus de l'argent, les montres alignées, les chaînes pendues, les couverts en croix, et les timbales, les tabatières, les ronds de serviette, les peignes, posés sur les étagères ; mais elle avait une affection pour les dés d'argent, bossuant les gradins de porcelaine, que recouvrait un globe. Puis, de l'autre côté, la lueur fauve de l'or jaunissait les glaces. Une nappe de chaînes longues glissait de haut, moirée d'éclairs rouges ; les petites montres de femme, retournées du côté du boîtier, avaient des rondeurs scintillantes d'étoiles tombées ; les alliances s'enfilaient dans des tringles minces ; les bracelets, les broches, les bijoux chers luisaient sur le velours noir des écrins ; les bagues allumaient de courtes flammes bleues, vertes, jaunes, violettes, dans les grands baguiers carrés ; tandis que, à toutes les étagères, sur deux et trois rangs, des rangées de boucles d'oreilles, de croix, de médaillons, mettaient au bord du cristal des tablettes des franges riches de tabernacle. Le reflet de tout cet or éclairait la rue d'un coup de soleil, jusqu'au milieu de la chaussée. Et Cadine croyait entrer dans quelque chose de saint, dans les trésors de l'empereur. Elle examinait longuement cette forte bijouterie de poissonnières, lisant avec soin les étiquettes à gros chiffres qui accompagnaient chaque bijou. Elle se décidait pour des boucles d'oreilles, pour des poires de faux corail, accrochées à des roses d'or. Un matin, Claude la surprit en extase devant un coiffeur de la rue Saint-Honoré. Elle regardait les cheveux d'un air de profonde envie. En haut, c'était un ruissellement de crinières, des queues molles, des nattes dénouées, des frisons en luie, des cache-peigne à trois étages, tout un flot de crins et de soies, avec des mèches rouges qui flambaient, des paisseurs noires, des pâleurs blondes, jusqu'à des chevelures blanches pour les amoureuses de soixante ans. En bas, les ours discrets, les anglaises toutes frisées, les chignons pommadés et peignés, dormaient dans des boîtes de carton. Et, au ilieu de ce cadre, au fond d'une sorte de chapelle, sous les pointes effiloquées des cheveux accrochés, un buste de emme tournait. La femme portait une écharpe de satin cerise, qu'une broche de cuivre fixait dans le creux des seins ; elle vait une coiffure de mariée très haute, relevée de brins d'oranger, souriant de sa bouche de poupée, les yeux clairs, les ils plantés roides et trop longs, les joues de cire, les épaules de cire comme cuites et enfumées par le gaz. Cadine ttendait qu'elle revînt, avec son sourire ; alors, elle était heureuse, à mesure que le profil s'accentuait et que la belle emme, lentement, passait de gauche à droite. Claude fut indigné. Il secoua Cadine, en lui demandant ce qu'elle faisait là, evant cette ordure, « cette fille crevée, ramassée à la morgue ». Il s'emportait contre cette nudité de cadavre, cette aideur du joli, en disant qu'on ne peignait plus que des femmes comme ça. La petite ne fut pas convaincue ; elle trouvait a femme bien belle. Puis, résistant au peintre qui la tirait par un bras, grattant d'ennui sa tignasse noire, elle lui montra ne queue rousse, énorme, arrachée à la forte carrure de quelque jument, en lui avouant qu'elle voudrait avoir ces cheveux-là. Et, dans les grandes tournées, lorsque tous trois, Claude, Cadine et Marjolin, rôdaient autour des Halles, ils apercevaient, par chaque bout de rue, un coin du géant de fonte. C'étaient des échappées brusques, des architectures mprévues, le même horizon s'offrant sans cesse sous des aspects divers. Claude se retournait, surtout rue Montmartre, près avoir passé l'église. Au loin, les Halles, vues de biais, l'enthousiasmaient : une grande arcade, une porte haute, béante, s'ouvrait ; puis les pavillons s'entassaient, avec leurs deux étages de toits, leurs persiennes continues, leurs stores immenses ; on eût dit des profils de maisons et de palais superposés, une babylone de métal, d'une légèreté hindoue, traversée par des terrasses suspendues, des couloirs aériens, des ponts volants jetés sur le vide. Ils revenaient toujours là, à cette ville autour de laquelle ils flânaient, sans pouvoir la quitter de plus de cent pas. Ils rentraient dans les après-midi tièdes des Halles. En haut, les persiennes sont fermées, les stores baissés. Sous les rues couvertes, l'air s'endort, d'un gris e cendre coupé de barres jaunes par les taches de soleil qui tombent des longs vitrails. Des murmures adoucis sortent des marchés ; les pas des rares passants affairés sonnent sur les trottoirs ; tandis que des porteurs, avec leur médaille, sont assis à la file sur les rebords de pierre, aux coins des pavillons, ôtant leurs gros souliers, soignant leurs pieds ndoloris. C'est une paix de colosse au repos, dans laquelle monte parfois un chant de coq, du fond de la cave aux olailles. Souvent ils allaient alors voir charger les paniers vides sur les camions, qui, chaque après-midi, viennent les eprendre, pour les retourner aux expéditeurs. Les paniers étiquetés de lettres et de chiffres noirs faisaient des ontagnes, devant les magasins de commission de la rue Berger. Pile par pile, symétriquement, des hommes les angeaient. Mais quand le tas, sur le camion, atteignait la hauteur d'un premier étage, il fallait que l'homme, resté en bas, alançant la pile de paniers, prît un élan pour la jeter à son camarade, perché en haut, les bras en avant. Claude, qui imait la force et l'adresse, restait des heures à suivre le vol de ces masses d'osier, riant lorsqu'un élan trop vigoureux les nlevait, les lançait par-dessus le tas, au milieu de la chaussée. Il adorait aussi le trottoir de la rue Rambuteau et celui de a rue du Pont-Neuf, au coin du pavillon des fruits, à l'endroit où se tiennent les marchandes au petit tas. Les légumes en lein air le ravissaient, sur les tables recouvertes de chiffons noirs mouillés. À quatre heures, le soleil allumait tout ce coin e verdure. Il suivait les allées, curieux des têtes colorées des marchandes ; les jeunes, les cheveux retenus dans un filet, éjà brûlées par leur vie rude ; les vieilles, cassées, ratatinées, la face rouge, sous le foulard jaune de leur marmotte. adine et Marjolin refusaient de le suivre, en reconnaissant de loin la mère Chantemesse qui leur montrait le poing, urieuse de les voir polissonner ensemble. Il les rejoignait sur l'autre trottoir. Là, à travers la rue, il trouvait un superbe ujet de tableau : les marchandes au petit tas sous leurs grands parasols déteints, les rouges, les bleus, les violets, ttachés à des bâtons, bossuant le marché, mettant leurs rondeurs vigoureuses dans l'incendie du couchant qui se mourait sur les carottes et les navets. Une marchande, une vieille guenipe [38] de cent ans, abritait trois salades maigres sous une ombrelle de soie rose, crevée et lamentable. Cependant, Cadine et Marjolin avaient fait connaissance de Léon, l'apprenti charcutier des Quenu-Gradelle, un jour u'il portait une tourte dans le voisinage. Ils le virent qui soulevait le couvercle de la casserole, au fond d'un angle obscur e la rue de Mondétour, et qui prenait un godiveau avec les doigts, délicatement. Ils se sourirent, cela leur donna une rande idée du gamin. Cadine conçut le projet de contenter enfin une de ses envies les plus chaudes ; lorsqu'elle encontra de nouveau le petit, avec sa casserole, elle fut très aimable, elle se fit offrir un godiveau, riant, se léchant les oigts. Mais elle eut quelque désillusion, elle croyait que c'était meilleur que ça. Le petit, pourtant, lui parut drôle, tout en lanc comme une fille qui va communier, le museau rusé et gourmand. Elle l'invita à un déjeuner monstre, qu'elle donna ans les paniers de la criée aux beurres. Ils s'enfermèrent tous trois, elle, Marjolin et Léon, entre les quatre murs d'osier, oin du monde. La table fut mise sur un large panier plat. Il y avait des poires, des noix, du fromage blanc, des crevettes, es pommes de terre frites et des radis. Le fromage blanc venait d'une fruitière de la rue de la Cossonnerie ; c'était un adeau. Un friteur de la rue de la Grande-Truanderie avait vendu à crédit les deux sous de pommes de terre frites. Le este, les poires, les noix, les crevettes, les radis, était volé aux quatre coins des Halles. Ce fut un régal exquis. Léon ne oulut pas rester à court d'amabilité, il rendit le déjeuner par un souper, à une heure du matin, dans sa chambre. Il servit u boudin froid, des ronds de saucisson, un morceau de petit salé, des cornichons et de la graisse d'oie. La charcuterie es Quenu-Gradelle avait tout fourni. Et cela ne finit plus, les soupers fins succédèrent aux déjeuners délicats, les nvitations suivirent les invitations. Trois fois par semaine, il y eut des fêtes intimes dans le trou aux paniers et dans cette ansarde, où Florent, les nuits d'insomnie, entendait des bruits étouffés de mâchoires et des rires de flageolet jusqu'au etit jour.   Alors, les amours de Cadine et de Marjolin s'étalèrent encore. Ils furent parfaitement heureux. Il faisait le galant, la menait en cabinet particulier, pour croquer des pommes crues ou des coeurs de céleri, dans quelque coin noir des caves. Il vola un jour un hareng saur qu'ils mangèrent délicieusement, sur le toit du pavillon de la marée, au bord des gouttières. es Halles n'avaient pas un trou d'ombre où ils n'allaient cacher leurs régals tendres d'amoureux. Le quartier, ces files de outiques ouvertes, pleines de fruits, de gâteaux, de conserves, ne fut plus un paradis fermé, devant lequel rôdait leur aim de gourmands, avec des envies sourdes. Ils allongeaient la main en passant le long des étalages, chipant un pruneau, ne poignée de cerises, un bout de morue. Ils s'approvisionnaient également aux Halles, surveillant les allées des marchés, ramassant tout ce qui tombait, aidant même souvent à tomber, d'un coup d'épaule, les paniers de marchandises. Malgré cette maraude, des notes terribles montaient chez le friteur de la rue de la Grande-Truanderie. Ce riteur, dont l'échoppe était appuyée contre une maison branlante, soutenue par de gros madriers verts de mousse, tenait des moules cuites nageant dans une eau claire, au fond de grands saladiers de faïence, des plats de petites limandes jaunes et roidies, sous leur couche trop épaisse de pâte, des carrés de gras-double mijotant au cul de la poêle, des harengs grillés, noirs, charbonnés, si durs, qu'ils sonnaient comme du bois. Cadine, certaines semaines, devait jusqu'à vingt sous ; cette dette l'écrasait, il lui fallait vendre un nombre incalculable de bouquets de violettes, car elle n'avait pas compter du tout sur Marjolin. D'ailleurs, elle était bien forcée de rendre à Léon ses politesses ; elle se sentait même un eu honteuse de ne jamais avoir le moindre plat de viande. Lui, finissait par prendre des jambons entiers. D'habitude, il cachait tout dans sa chemise. Quand il montait de la charcuterie, le soir, il tirait de sa poitrine des outs de saucisse, des tranches de pâté de foie, des paquets de couennes. Le pain manquait, et l'on ne buvait pas. arjolin aperçut Léon embrassant Cadine, une nuit entre deux bouchées. Cela le fit rire. Il aurait assommé le petit d'un oup de poing ; mais il n'était point jaloux de Cadine, il la traitait en bonne amie qu'on a depuis longtemps. Claude n'assistait pas à ces festins. Ayant surpris la bouquetière volant une betterave, dans un petit panier garni de oin, il lui avait tiré les oreilles, en la traitant de vaurienne. Cela la complétait, disait-il. Et il éprouvait, malgré lui, comme ne admiration pour ces bêtes sensuelles, chipeuses et gloutonnes, lâchées dans la jouissance de tout ce qui trônait, amassant les miettes tombées de la desserte d'un géant. Marjolin était entré chez Gavard, heureux de n'avoir rien à faire qu'à écouter les histoires sans fin de son patron.

« cheveux-là. Et,dans lesgrandes tournées, lorsquetoustrois, Claude, CadineetMarjolin, rôdaientautourdesHalles, ils apercevaient, parchaque boutderue, uncoin dugéant defonte.

C’étaient deséchappées brusques,desarchitectures imprévues, lemême horizon s’offrant sanscesse sousdesaspects divers.Claude seretournait, surtoutrueMontmartre, après avoirpassé l’église.

Auloin, lesHalles, vuesdebiais, l’enthousiasmaient : unegrande arcade, uneporte haute, béante, s’ouvrait ; puislespavillons s’entassaient, avecleurs deuxétages detoits, leurspersiennes continues,leursstores immenses ; oneût ditdes profils demaisons etde palais superposés, unebabylone demétal, d’unelégèreté hindoue, traversée pardes terrasses suspendues, descouloirs aériens, desponts volants jetéssurlevide.

Ilsrevenaient toujourslà, à cette villeautour delaquelle ilsflânaient, sanspouvoir laquitter deplus decent pas.Ilsrentraient danslesaprès-midi tièdes desHalles.

Enhaut, lespersiennes sontfermées, lesstores baissés.

Souslesrues couvertes, l’airs’endort, d’ungris de cendre coupédebarres jaunes parlestaches desoleil quitombent deslongs vitrails.

Desmurmures adoucissortent des marchés ; lespas des rares passants affairéssonnent surlestrottoirs ; tandisquedesporteurs, avecleurmédaille, sont assis àla file sur lesrebords depierre, auxcoins despavillons, ôtantleursgrossouliers, soignant leurspieds endoloris.

C’estunepaix decolosse aurepos, danslaquelle monteparfois unchant decoq, dufond delacave aux volailles.

Souventilsallaient alorsvoircharger lespaniers videssurlescamions, qui,chaque après-midi, viennentles reprendre, pourlesretourner auxexpéditeurs.

Lespaniers étiquetés delettres etde chiffres noirsfaisaient des montagnes, devantlesmagasins decommission delarue Berger.

Pileparpile, symétriquement, deshommes les rangeaient.

Maisquand letas, surlecamion, atteignait lahauteur d’unpremier étage,ilfallait quel’homme, restéenbas, balançant lapile depaniers, prîtunélan pour lajeter àson camarade, perchéenhaut, lesbras enavant.

Claude, qui aimait laforce etl’adresse, restaitdesheures àsuivre levol deces masses d’osier, riantlorsqu’un élantrop vigoureux les enlevait, leslançait par-dessus letas, aumilieu delachaussée.

Iladorait aussiletrottoir delarue Rambuteau etcelui de la rue duPont-Neuf, aucoin dupavillon desfruits, àl’endroit oùsetiennent lesmarchandes aupetit tas.Leslégumes en plein airleravissaient, surlestables recouvertes dechiffons noirsmouillés.

Àquatre heures, lesoleil allumait toutcecoin de verdure.

Ilsuivait lesallées, curieux destêtes colorées desmarchandes ; lesjeunes, lescheveux retenusdansunfilet, déjà brûlées parleur vierude ; lesvieilles, cassées, ratatinées, laface rouge, souslefoulard jaunedeleur marmotte. Cadine etMarjolin refusaient delesuivre, enreconnaissant deloin lamère Chantemesse quileur montrait lepoing, furieuse deles voir polissonner ensemble.Illes rejoignait surl’autre trottoir.

Là,àtravers larue, iltrouvait unsuperbe sujet detableau : lesmarchandes aupetit tassous leurs grands parasols déteints, lesrouges, lesbleus, lesviolets, attachés àdes bâtons, bossuant lemarché, mettantleursrondeurs vigoureuses dansl’incendie ducouchant quise mourait surlescarottes etles navets.

Unemarchande, unevieille guenipe [38] de cent ans,abritait troissalades maigres sousuneombrelle desoie rose, crevée etlamentable. Cependant, CadineetMarjolin avaientfaitconnaissance deLéon, l’apprenti charcutier desQuenu-Gradelle, unjour qu’il portait unetourte danslevoisinage.

Ilslevirent quisoulevait lecouvercle delacasserole, aufond d’unangle obscur de larue deMondétour, etqui prenait ungodiveau aveclesdoigts, délicatement.

Ilsse sourirent, celaleurdonna une grande idéedugamin.

Cadine conçutleprojet decontenter enfinunedeses envies lesplus chaudes ; lorsqu’elle rencontra denouveau lepetit, avecsacasserole, ellefuttrès aimable, ellesefitoffrir ungodiveau, riant,seléchant les doigts.

Maiselleeutquelque désillusion, ellecroyait quec’était meilleur queça.Lepetit, pourtant, luiparut drôle, touten blanc comme unefillequivacommunier, lemuseau ruséetgourmand.

Ellel’invita àun déjeuner monstre, qu’elledonna dans lespaniers delacriée auxbeurres.

Ilss’enfermèrent toustrois, elle,Marjolin etLéon, entrelesquatre mursd’osier, loin dumonde.

Latable futmise surunlarge panier plat.Ilyavait despoires, desnoix, dufromage blanc,descrevettes, des pommes deterre frites etdes radis.

Lefromage blancvenait d’unefruitière delarue delaCossonnerie ; c’étaitun cadeau.

Unfriteur delarue delaGrande-Truanderie avaitvendu àcrédit lesdeux sousdepommes deterre frites.

Le reste, lespoires, lesnoix, lescrevettes, lesradis, étaitvoléauxquatre coinsdesHalles.

Cefut unrégal exquis.

Léonne voulut pasrester àcourt d’amabilité, ilrendit ledéjeuner parunsouper, àune heure dumatin, danssachambre.

Ilservit du boudin froid,desronds desaucisson, unmorceau depetit salé,descornichons etde lagraisse d’oie.Lacharcuterie des Quenu-Gradelle avaittoutfourni.

Etcela nefinit plus, lessoupers finssuccédèrent auxdéjeuners délicats,les invitations suivirentlesinvitations.

Troisfoisparsemaine, ilyeut des fêtes intimes dansletrou auxpaniers etdans cette mansarde, oùFlorent, lesnuits d’insomnie, entendaitdesbruits étouffés demâchoires etdes rires deflageolet jusqu’au petit jour.. »

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